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A 9 ans à peine, il a hâte de remonter sur le ring malgré les risques

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REUTERS / Athit Perawongmeth - Un jeune boxeur Muay Thai s'entraîne dans un gymnase de boxe dans la province de Chachoengsao, le 25 août 2020.
Écrit par Lepetitjournal.com Bangkok avec Reuters
Publié le 8 avril 2021, mis à jour le 8 avril 2021

Le jeune Pornpattara "Tata" Peachaurai, boxeur thaïlandais âgée de neuf ans, est impatient de remonter sur le ring après l’arrêt des combats il y a plusieurs mois. Ses revenus sont vitaux pour sa famille.

"Tout l'argent issu de la boxe, le salaire régulier et les pourboires, tout va à maman", s’exclame Pornpattara "Tata" Peachauraide son nom de boxeur Tata Por Lasua, jeune "nak muay" au corps affuté âgée de neuf ans à peine.

"Je suis fier d'être boxeur et de gagner de l'argent pour ma mère", dit-il.

Le dernier combat de Tata a eu lieu en octobre dernier, quelques semaines avant qu'une  nouvelle épidémie de coronavirus en Thaïlande n’amène les autorités à interdire les grands rassemblements, mettant à l’arrêt les événements sportifs.

"Je ne peux pas boxer. Je ne m’entraine pas non plus (...) J'aide ma mère à vendre des choses", se lamente Tata, qui vit avec sa mère et sa sœur de 16 ans, Poomrapee, qui est également boxeuse au sein de l'équipe nationale juniors.

La famille compte sur les revenus du jeune Tata pour sortir de la pauvreté et espère qu'il pourra réussir en tant que professionnel de Muay Thai, ou alors représenter la police ou l'armée sur le ring et être récompensé par des promotions et des bonus.

Un enfant boxeur thailandais se fait masser apres un match
Le jeune Tata Por Lasua, de son nom de boxeur, s’apprête à participer à un match de Muay Thai dans la province de Chachoengsao, le 26 octobre 2020. Photo REUTERS / Athit Perawongmetha 

"Ma maman m’a dit que si je continuais à boxer comme ma sœur, un jour je pourrais lui acheter une maison, une voiture et gagner davantage d’argent pour elle", confie Tata dans une interview à Reuters.

"Il donne généralement ses revenus à maman", confirme la mère de Tata, Sureeporn Eimpong. "Parfois, il demande un jouet après un combat", ajoute la jeune quadragénaire.

Effets néfastes sur la santé

Les combats d'enfants en Thaïlande sont parfois aussi populaires que les combats d'adultes et se déroulent dans les temples à l’occasion de tournois, de festivals et de foires. Il y aurait environ 300.000 boxeurs de moins de 15 ans en Thaïlande, selon l'Association de boxe professionnelle de Thaïlande. Un peu plus de 10.000 seraient licenciés.

Mais certains experts médicaux prônent l'interdiction pure et simple de la boxe pour les mineurs. Ils estiment que la pratique intensive de ce sport brutal peut entraîner des retards de croissance, des problèmes neurologiques à long terme, des lésions cérébrales et diverses formes d'incapacités.

Le jeune boxeur Tata Por Lasua sur le bord du ring avec sa mere
Le jeune Tata Por Lasua avec sa mère, Sureeporn Eimpong, après une séance d'entraînement dans un gymnase à Bangkok, le 3 octobre 2020. Photo REUTERS / Athit Perawongmetha

Le consentement parental est la seule exigence actuellement pour permettre aux enfants de devenir boxeurs.

"Je ne suis pas inquiète de le voir boxer", affirme Sureeporn, ajoutant que les nak muay sont formés pour se protéger.

"Il n'y a pas beaucoup de blessures chez les enfants boxeurs. J'ai confiance dans le système", dit-elle.

Le jeune Tata aide sa mere a vendre des produits dans la rue
Le jeune Tata aide sa mère à vendre des produits dans les rues de Bangkok. Photo REUTERS / Athit Perawongmetha

Mais le système ne fonctionne pas toujours.

En 2018, Tata a participé à un tournoi dans lequel un garçon de 13 ans est mort d'une hémorragie cérébrale sur le ring après avoir été mis K.O. Sureeporn estime que l'arbitre avait alors été trop lent à intervenir.

Le directeur de l'Institut national du développement de l'enfance et de la famille de l'Université de Mahidol, Adisak Plitponkarnpim, fait partie d'une équipe de recherche qui a effectué des scanners cérébraux sur 250 enfants boxeurs, dont certains ont montré d’importants dégâts pouvant avoir un impact sur le développement du cerveau et les niveaux d'intelligence.

"La boxe crée des lésions cérébrales comme nous pouvons le voir clairement chez les boxeurs plus âgés", souligne-t-il.

"Les parents qui comptent sur les revenus de leurs enfants à l'âge de huit ou neuf ans devraient s’interroger sur ce qu'ils sont réellement en train de leur demander."

Le jeune boxeur Tata Por Lasua devant des trophees de Muay Thai
Tata s’entraîne devant des trophées et les portraits de ses idoles. REUTERS / Athit Perawongmetha

Des députés thaïlandais ont cherché à faire interdire la boxe aux moins de 12 ans, mais un projet de loi a échoué au parlement et le texte aurait probablement rencontré une forte résistance compte tenu de la popularité des combats d'enfants et des revenus qu'ils génèrent.

Sureeporn estime que la boxe, c’est toute la vie de son fils.

"Je suis de la classe inférieure et je gagne juste assez d'argent pour survivre et je n'ai pas d'économies ni de maisons luxueuses", dit-elle.

"J’ai mal pour lui quand il souffre, je sais bien qu’il se fait toujours mal quand il est sur le ring, mais il cherche toujours à le cacher et ne me le dit que plus tard", avoue la mère de famille les larmes aux yeux.

"L'avenir de Tata est dans la boxe."

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