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SUD THAILANDE – Les Musulmans pleurent leur "chef spirituel" mort en exil

Écrit par Lepetitjournal.com Bangkok avec AFP
Publié le 18 janvier 2017, mis à jour le 11 novembre 2020

De nombreux musulmans à travers l'extrême sud de la Thaïlande pleurent la mort de Sapae-ing Basor, le leader spirituel de la rébellion violente contre l'autorité de Bangkok qui fait rage dans la région depuis 13 ans et a coûté la vie à près de 7.000 personnes.

Sapae-ing avait fondé une école islamique de renom et était devenu un personnage très populaire auprès de nombreux Malais-musulmans bien qu'il vivait en exil depuis 2004.

L'insurrection séparatiste mène des attaques quasi-quotidiennes sur les forces de sécurité et ceux qu'ils considèrent comme des collaborateurs de l'Etat thaïlandais qui a annexé la région il y a un peu plus d'un siècle.

Dans ce conflit où les deux parties sont accusées d'abus des droits de l'homme, la plupart des morts sont des civils.
Sapae-ing, octogénaire, est décédé paisiblement le 10 janvier de l'autre côté de la frontière, en Malaisie, où il vivait après avoir fui des accusations de trahison.

L'école qu'il avait fondée est soupçonnée d'avoir formé nombres de troupes rebelles.

"Il était un philosophe qui jouait un rôle important dans l'éducation", lit un communiqué du Mara Patani, un groupe représentant certaines factions rebelles dans les pourparlers avec la junte thaïlandaise, confirmant son décès.

Depuis que sa mort a été confirmée, les mosquées se sont remplies pour des prières spéciales.

Selon l'analyste Don Pathan, les écoles de Sapae-ing sont devenues des "piliers  de l'identité malaise" irritant les autorités thaïlandaises alors que l'insurrection s'accélérait.

"Il était comme une sorte de Yoda, il avait une part de mystère", raconte Don Pathan, expliquant que la réputation de Sapea-ing s'est développée dans les années 80 et 90 lorsqu'il "parlait pour l'identité malaise et refusait de s'incliner devant l'Etat thaïlandais".

L'élite militaire thaïlandaise est accusée depuis longtemps par les minorités du royaume de développer la notion de "Thaïté" aux dépens de la diversité ethnique qui caractérise la population de l'ancien Siam.

Dans le sud où les habitants parlent un dialecte malais, par exemple, la langue thaïe ainsi que son écriture sont imposées depuis des décennies, alimentant colère et ressentiment.

La légende de Sapae-ing s'est répandue à travers les provinces du sud touchées par l'insurrection malgré son silence relatif depuis son exil.

Selon Zachary Abuza, un expert des groupes militants d'Asie du Sud-Est, Sapae-ing a galvanisé la rébellion – bien qu'on ne lui connaisse pas de liens opérationnels avec les soldats insurgés.

"Il s'agit d'un mouvement n'ayant quasiment aucun chef de file connu. Il en était le plus proche qu'il lui était possible… le fait d'être en cavale pendant 13 ans lui a conféré une sorte d'image à la Robin des Bois."

La fin de la lutte semble encore éloignée malgré quelques contacts pris dans une perspective de paix.

Les insurgés en armes, dominés par le Barisan Revolusi Nasional (BRN), veulent une amnistie pour leurs agents et des discussions sérieuses sur la décentralisation avec en perspective l'indépendance.

Mais la junte thaïlandaise demeure réticente à céder de l'autorité et ne croit pas que les groupes rebelles qu'elle a en face d'elle contrôlent totalement les militants armés sur le terrain.
 

lepetitjournal.com bangkok
Publié le 18 janvier 2017, mis à jour le 11 novembre 2020

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