L'ancienne première ministre Yingluck Shinawatra, lors de sa fuite, s'est débarrassée de ses téléphones portables et a cessé de se déplacer à bord de ses véhicules habituels durant les jours qui ont précédé son évasion spectaculaire survenue la semaine dernière, a déclaré mardi le chef de l'armée thaïlandaise, tandis que le parti de celle-ci promettait de continuer à se battre.
Yingluck, dont le gouvernement a été renversé par les militaires en 2014, a organisé sa disparition juste avant le verdict prévu vendredi dernier dans le cadre d'un procès au pénal pour négligence.
Elle risquait jusqu'à dix ans de prison et un bannissement à vie de la vie politique si elle était déclarée coupable. Mais au lieu de cela, elle ne s'est pas présentée.
La junte thaïlandaise a essuyé les critiques de certains de ses alliés conservateurs à propos de la disparition de Yingluck, avec beaucoup de questions sur comment le régime autoritaire a-t-il bien pu laisser s'échapper l'ex Première ministre alors qu'elle était étroitement surveillée depuis trois ans.
Le chef de l'armée, le Général Chalermchai Sitthisad, s'est longuement défendu mardi, ce qui a offert un aperçu sur la manière dont les militaires surveillaient Yingluck et comment elle a pu passer entre les mailles du filet.
"Nous savons d'ores et déjà qu'elle a abandonné son téléphone et changé ses voitures, c'était difficile de la suivre en utilisant les méthodes que nous avions l'habitude d'utiliser", a-t-il dit aux journalistes, confirmant que les renseignements militaires avaient déjà utilisé la surveillance électronique et physique.
Mais Chalermchai a aussi ajouté que les officiers chargés de la surveillance de la maison de Yingluck à Bangkok avaient été récemment retirés.
"L'opinion publique estimait que cela violait ses droits personnels et que cela l'intimidait donc nous avons retiré le dispositif", a-t-il dit.
Yingluck se plaignait fréquemment d'être suivie en permanence par les renseignements militaires depuis son éviction du pouvoir.
Dans son premier communiqué depuis la disparition de Yingluck Shinawatra, son parti le Puea Thai a juré de rester uni et se battre pour une Thaïlande démocratique malgré la perte de sa figure de proue.
"Le parti pense que l'ancienne Première ministre expliquera au public (sa décision de fuir) lorsque le moment sera approprié," lit le communiqué.
Les médias thaïlandais ont beaucoup spéculé sur la manière dont elle a pu s'échapper. La plupart suggèrent qu'elle se serait rendue au Cambodge par voie terrestre ou maritime dans les jours précédant le verdict de son procès et qu'elle est ensuite allée à Singapour.
Chalermchai estime peu probable que Yingluckait ait pu directement s'envoler directement hors de Thaïlande étant donné les procédures de sécurité dans les aéroports, même pour les avions privés.
Mais il a ajouté qu'une fois en dehors de la Thaïlande, elle a probablement pris un vol privé organisé par son frère Thaksin.
"Je pense que l'ancien Premier ministre Thaksin avait préparé un plan pour elle, par exemple un appareil privé que des personnes ordinaires ne peuvent pas trouver", a-t-il dit.
La dynastie politique des Shinawatra a démarré sous Thaksin en 2001 avec une série de projets de politiques sociales innovantes qui leur ont permis de gagner des votes et la loyauté des pauvres dans les campagnes.
Cependant, leur popularité a dérangé les royalistes et les élites alliées de l'armée, qui ont agressé systématiquement les gouvernements liés au clan Shinawatra avec des coups d'états, des procès et des manifestations de masse.
Thaksin lui-même a été renversé en 2006 par un coup d'État et s'est enfui à l'étranger deux ans après afin d'éviter la prison pour corruption.
Cette période - surnommée "la décennie perdue" - a vu des manifestations sanglantes cycliques, des gouvernements de courte durée et le retour du régime militaire en 2014.