Atteinte aux libertés, Giorgos Karaivaz, journaliste d'investigation de 52 ans, spécialiste du reportage policier, a été assassiné ce vendredi dernier devant son domicile. Passionné et consacrant sa vie à ses enquêtes, il a été tué violemment par balles, 10 au total ont été retrouvées dans son corps. Il est mort sur le coup.
La présence de plus de 17 douilles présentes et relevées par la police, fait penser que le crime a été réalisé par des professionnels, et que l'attaque était bien "programmée". Selon Pavol Szalai, responsable UE de Reporters sans frontières, l'assassinat de M.Karaivaz a été causé par le crime organisé. L'ONG pour la liberté de la presse nous affirme suivre de très près l'affaire et plus globalement la situation en Grèce : "Nous avons appelé à tous les moyens possibles pour trouver l'assassin. Nous sommes en contact avec plusieurs journalistes d'investigation en Grèce qui nous tiennent au courant le plus rapidement. La police n'a pas encore confirmé que le meurtre est lié à son travail. On attend une arrestation et de trouver le véritable meurtrier pour pouvoir nous positionner ensuite."
« Certains ont choisi de le réduire au silence, et de l'empêcher, avec des balles, d'écrire ses articles. »
Des investigations qui ne plaisent pas
Ce sont ces mots que les collègues de Giorgos Karaivaz ont écrit sur son blog Bloko. En effet, le meurtre de Giorgos Karaivaz qui travaillait sur plusieurs affaires sensibles, inquiète. Il est notamment à l'origine de l'arrestation de Dimitris Lignadis, ancien directeur du Théâtre national grec, accusé d'agressions sexuelles sur mineurs. Il travaillait également sur la protection policière démesurée du présentateur de télévision, Menios Fourthiotis aux fortes ambitions politiques, en lien étroit avec le parti au pouvoir, Nouvelle Démocratie. Il recevrait également des subventions fréquentes pour son émission. Giorgos Karaivaz enquêtait régulièrement sur la corruption chez les hauts responsables et dans la police.
Si le premier ministre grec a demandé la "résolution rapide" de l'enquête après que Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne aie qualifié le meurtre du journaliste, comme un "acte odieux et lâche", des questions se posent sur la sécurité actuelle de la liberté de la presse et plus globalement de ses journalistes en Grèce. De son coté Les propos d'Alexis Tsipras, ex-Premier ministre de gauche critiquant l'actuel gouvernement sont claires : « Ceux qui avaient fait de la loi et de l'ordre leur étendard ont laissé le pays devenir une colonie du crime organisé et le terrain incontrôlé de gangs mafieux».
Vers un recul des libertés ?
La Grèce est 65ème au Classement mondial de la liberté de la presse de 2020, score faible pour un pays de l'Union Européenne. A titre comparatif, la France est 34ème. Reporters sans frontières nous indique : "La situation en Grèce s'est détériorée depuis plusieurs années. Comme vous le savez, les médias télévisés ont été soumis directement au bureau du Premier ministre et nous pouvons constater plusieurs cas de censures. Nous avons relevé plusieurs entraves au droit à l'information, notamment sur l'immigration en Grèce. Nous observons alors des tendances très inquiétantes. Mais nous ne pouvons pas encore précisément affirmer le lien entre cette tendance et le nouveau gouvernement Nouvelle Démocratie."
En effet, peu de temps après la victoire aux élections du parti centre-droit Nouvelle Démocratie, un décret présidentiel a placé l'audiovisuel public ERT ainsi que l'agence de presse d'État ANA-MPA sous la supervision du Premier ministre Kyriákos Mitsotákis. Cette mesure fait craindre de plus grandes restrictions en matière de liberté, où les journalistes continuent tant bien que mal à travailler dans des conditions difficiles. On rappelle qu'un reporter a été brutalement attaqué par la police lors d'une manifestation à Athènes en novembre tandis qu'un photojournaliste a été arrêté et détenu après son rapport sur l'évacuation d'un squat.