26 millions. C’est le nombre de touristes que la Grèce a perdu l’été dernier. Malgré la bonne gestion de la crise, le secteur touristique du pays a été lourdement impacté. Lors de cette dernière année, le Berceau de la Démocratie n'a accueilli que 8 millions de touristes, contre 34 millions en 2019. Depuis la crise sanitaire, quel est le bilan économique et comment la Grèce peut-elle se sauver ?
L’été dernier, « seulement » 200 morts de la Covid-19 étaient à déplorer en Grèce, pour 10,8 millions d’habitants. Le gouvernement avait donc un objectif en tête : faire du pays une « destination sûre » afin de maintenir le tourisme à flot. Un échec.
L’Etat a réussi, malgré tout, à soutenir l’économie, avec un programme et des interventions évaluées à plus de 20 milliards d’euros. Ce mécanisme porte sur 3 points : le soutien à l'emploi, la réduction des impôts, ainsi que le renforcement de l'esprit d'entreprise.
Un plan de relance national
Pour le pays le plus endetté de l'Union Européenne, qui commençait tout juste à se relever après dix années de crise économique et financière, il n'est pas question de rater cette nouvelle chance ! Le gouvernement grec a finalisé son plan de relance national de 30 milliards d'euros du fonds de relance européen. Si cette aide est bien utilisée, elle permettra de transformer en profondeur le modèle économique du pays.
Ce sont plus de 2000 pages qui ont été lues et examinées par les hauts fonctionnaires de Berlaymont. Des mois de travail quotidien avec les équipes du Premier ministre grec, Kyriákos Mitsotákis, pour rendre ce projet ambitieux sur le plan économique et crédible dans sa mise en oeuvre. Le Premier ministre voit une possibilité historique de faire repartir l’activité de son pays sur des bases plus solides, une réelle aubaine pour rebattre les cartes de l'économie grecque.
Le retour du tourisme
La Grèce devrait être prête à s’ouvrir pleinement aux touristes le 14 mai prochain. Ce secteur est un élément clé qui représentent des milliers d’emplois saisonniers par an.
L’autorité de l’aviation civile a levé la quarantaine obligatoire de sept jours pour les visiteurs étrangers en provenance de l’Union Européenne, de l’espace Schengen, des États-Unis, du Royaume-Uni, d’Israël, de Serbie et des Émirats Arabes Unis.
Les visiteurs de ces pays qui souhaitent séjourner en Grèce doivent être munis soit d’un certificat autorisé attestant qu’ils ont reçu toutes les doses de vaccin au moins deux semaines avant leur arrivée, soit d’un test PCR négatif effectué dans les 72 heures précédant leur vol.
La nouvelle législation et l’assouplissement des mesures visent à attirer les visiteurs et à renflouer les caisses des entreprises touristiques. Le gouvernement attend beaucoup de la saison touristique et prend donc toutes les mesures disponibles pour éviter les pertes désastreuses comme l’année dernière.
À noter que les travailleurs du secteur touristique seront vaccinés afin d’être prêts pour la saison estivale, a déclaré le ministre grec du développement du tourisme, Haris Theocharis.
Malheureusement, en même temps, des voix s’élèvent contre le peu de vaccination qui est faite auprès des européens et étrangers qui vivent en Grèce et qui ont pourtant passé depuis bien longtemps la tranche d’âge requise. Les résidents, tout comme les Grecques, s'inquiètent de voir revenir à grands pas les restrictions, comme l'année dernière, juste après les vacances d'été. Dimitris, qui vit sur l'île d'Aegean (seulement une heure d’Athènes en ferry) s'inquiète « je suis producteur de pistaches et l'année dernière, le festival annuel de la pistache en septembre a été annulé en raison du trop grand nombre de cas de Covid dans le pays. J'ai perdu toute ma récolte faute de pouvoir la vendre. Le gouvernement, lui, a continué à accepter les touristes comme si de rien n'était. On est tous confinés depuis novembre, c’est une honte. » La Grèce compte seulement 16 pour cent de sa population à avoir été vaccinée au moins une fois.
Et si le tourisme ne sauvait pas la Grèce ?
Depuis de nombreuses années, la Grèce entreprend des réformes pour assurer une meilleure stabilité de son économie. « Il en résultera très certainement une nouvelle récession et des mesures fortes faisant peser un poids lourd sur les générations actuelles et futures. » déclare Tamer Hagag, analyste et responsable des prévisions économiques au Ministère des solidarités et de la santé.
L’expert annonce que dans ce cas de figure probable, les conséquences seront irrévocables, et prévoit pour le pays de nombreux changements. « La baisse de la notation du pays, l’augmentation du risque de défaut, des taux d’intérêt élevés sur le marché, de l’inflation… Ce sont les changements que va engendrer une nouvelle crise économique. »
Pire encore, dans les scénarios les moins favorables, si le pays ne se redresse pas de lui-même, « il sera mis sous tutelle d’une Institution internationale » déclare, pensif, l’analyste en économie.
Quelles autres pistes pour sauver la Grèce ?
Lors de l’interview, Tamer émet de nombreuses pistes envisageables mais développe les plus probables. « La Grèce pourrait demander à l’Union européenne une solution de facilité, c’est-à-dire une annulation d’une partie ou de toute la dette. » Autre piste plausible, sur le court terme, le pays devra développer et soutenir les secteurs agricoles, et tertiaires, qui sont deux des trois piliers de l’économie grecque.
L’analyste persiste et conclut ; malgré toutes les démarches et les aides mises en place, « les réformes entamées ne produiront pas d’effet significatif stable avant plusieurs années…»
Encore une fois, la réouverture est compliquée, aussi accueillante soit-elle. Les nouveaux variants du coronavirus sont un souci constant. Les compagnies aériennes ont encore coupé les itinéraires. Les voyageurs pourraient être forcés de se mettre en quarantaine après leur retour à la maison. Là-dessus, il faut rajouter le prix des tests PCR (pour ceux qui n’ont pas encore eu le vaccin) qui risquent de refroidir plus d’un voyageur. En moyenne 120 euros (Londres) alors que le prix d’un billet, pour la Grèce, sur une compagnie "low cost" dépasse rarement, en ce moment, 55 euro aller/retour.
Bonne chance et bonnes vacances.
Article réalisé par : Sarah Fenzari en collaboration avec Yvan Honorat