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D’où viennent les noms des quartiers, places et rues d’Athènes ?

Chaque quartier, chaque rue porte une mémoire : une anecdote, un paysage disparu ou un lien diplomatique avec une puissance ou une personnalité étrangère. Derrière les noms des rues et des quartiers se cachent souvent des histoires inattendues.

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Écrit par Laurette Buchart
Publié le 25 novembre 2025, mis à jour le 27 novembre 2025

Des noms inspirés des lieux et de la géographie

Beaucoup de quartiers doivent leur nom à leur environnement d’origine

Par exemple, le quartier d’Ambelokipi signifie “vigne”. En effet, jusqu’à la fin du XIXe siècle, la zone était une étendue de vignobles et de vergers.

La place Vathi, qui veut dire “profonde”, a été baptisée ainsi en 1926 parce qu’elle se trouve dans la partie basse de la ville.

Le quartier de Gazi porte le nom de l’ancienne usine à gaz qui s’y trouvait. Longtemps pauvre, le secteur s’appelait d’abord “Gazohori”, le “village du gaz”. Même si l’usine a été transformée en lieu de concerts et d’expositions, et que Gazi est désormais surtout connu pour sa vie nocturne vibrante et animée, le nom est resté.

La place Votanikos rappelle ses jardins botaniques, tandis que Monastiraki doit son nom au monastère de l’Assomption de la Vierge Marie, installé sur la place. 

 

Des noms nés d’anecdotes du quotidien

D’autres lieux tirent leur nom de petites histoires locales, inconnues de la plupart des Athéniens. Une manière de rendre immortelles des personnes ordinaires qui ont marqué le quotidien de la capitale il fut un temps.

Klafthmonos, la “place des pleurs”, en est un bon exemple. Au XIXe siècle, le ministère des Finances la dominait. À chaque changement de gouvernement, tous les fonctionnaires qui y travaillaient étaient licenciés. Ils sortaient alors sur la place en pleurant, lettre de renvoi à la main. C’est du moins ce que racontait l’écrivain Dimitrios Kambouroglou à la fin du XIXe siècle, et ce qui a inspiré le nom de cette place.

Exarchia a été nommé ainsi autour de 1900, parce que la famille d’Exarchos y tenait une épicerie appréciée des locaux.

Anafiotika, sous l’Acropole, a été construit vers 1860 par des ouvriers venus de l’île d’Anafi pour participer aux fouilles de l’Acropole. Le quartier, avec ses bâtiments blancs qui rappellent les îles grecques, leur rend hommage : Anafiotika signifie “petite Anafi”.

Quant au quartier de Mets, il porte le nom de la brasserie du bavarois Karl Fix. Celui-ci l’avait baptisée en hommage à la ville de Metz, après la guerre franco-prussienne. Les troupes prussiennes y avaient renversé l’armée française en 1870, ce qui a inspiré le nom de la brasserie et, finalement, du quartier entier. Le quartier est aujourd’hui surnommé “petit Montmartre”, en raison de son atmosphère bohème et des nombreux artistes qui y ont trouvé refuge, un clin d'œil au célèbre quartier parisien.

 

Les rues qui honorent les alliés diplomatiques et les philhellènes

Athènes rend aussi hommage aux pays et personnalités qui ont soutenu la Grèce

Plateia Amerikis (place de l’Amérique) a été renommée ainsi en 1927 pour saluer le philhellénisme des Etats-Unis, alliés majeurs de la Grèce au XXe siècle.

D’autre part, de nombreuses rues portent le nom de philhellènes français liés à la guerre d’indépendance grecque (1821-1829). À l’époque, la Grèce, encore soumise à l’Empire ottoman, se soulève. Des personnalités étrangères, comme Lord Byron, militent activement pour sa cause et poussent les gouvernements européens à intervenir. 

Par gratitude, Athènes a donné leur nom à plusieurs rues : 

  • Didotou, en hommage à Ambroise Firmin-Didot, un imprimeur et éditeur français qui a financé des publications pro-grecques dès 1821 et a fait connaître la cause grecque dans le monde intellectuel parisien.
  • Lenorman, pour Charles Lenormant, un archéologue français ayant milité politiquement pour l’indépendance grecque. Il a notamment créé des travaux archéologiques prouvant une continuité flagrante entre la Grèce antique et moderne, un argument central dans les débats en faveur de l’indépendance.
  • Viktor Ougko, en référence au célèbre poète, auteur de poèmes philhellènes comme “L’enfant” en 1828 ou “Navarin” en 1829, qui dénoncent les massacres ottomans.
  • “Ντελακρουά” ( Delacroix) en hommage à Eugène Delacroix, une des principales figures du philhellénisme européen. Ses tableaux “Les Massacres de Scio” en 1824 et “La Grèce sur les ruines de Missolonghi” en 1826, ont profondément marqué l’opinion européenne, et ont été à l’origine d’une pression populaire majeure qui a poussé le gouvernement français à intervenir.

 

À Athènes, rien n’est nommé au hasard. Derrière chaque rue, chaque place, se cache une trace du passé : un monument disparu, un métier oublié, un geste de solidarité transnationale ou une simple scène de vie. En parcourant la ville, on marche ainsi sans le savoir à travers des siècles d’Histoire.

 

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