Bartolomeu Calderón est un jeune guitariste lisboète de 23 ans. Lepetitjournal est parti à la rencontre de cet autodidacte afin qu’il partage sa vision du métier, ses projets ainsi que sa passion.
Lepetitjournal : Pourriez-vous vous présenter?
Bartolomeu Calderón : Je m’appelle Bartolomeu Calderón, je suis né et j’ai grandi à Lisbonne. Je suis un guitariste de 23 ans. J’ai évolué dans un milieu artistique, puisque mon père est poète, et que ma mère crée des bijoux. J’ai toujours été entouré de personnes qui parvenaient à vivre de leur art et cela m’a inspiré. J’ai commencé par jouer spécifiquement du jazz manouche et aujourd’hui je m’ouvre à des styles différents par le biais de nouveaux groupes auxquels j’appartiens. Je vis de la musique, en ce sens que je gagne ma vie en jouant ainsi qu’en enseignant la guitare. Bien que j’ai suivi une formation académique en musique pour quelques temps, j’ai véritablement appris à jouer devant un public. C’est une manière assez vieille école de faire, mais cela m’a très vite poussé à m’investir dans cette passion.
Depuis quand êtes-vous capable de vivre de la musique?
Depuis 2 ans et demi. J’ai passé deux ans à étudier la musique à la Hot Club jazz school de Lisbonne. J’avais déjà joué de cet instrument puisque j’ai commencé de manière plus informelle lorsque j’avais 14 ans. C’était une histoire de famille car c’est le mari d’une de mes soeur qui a commencé à m’enseigner cet instrument. J’ai joué ainsi durant deux ans puis j’ai soudainement arrêté. J’aimais toujours cela mais ce n’était pas encore une partie de ma vie. Lorsque j’ai fini le lycée, j’ai réalisé que je n’aspirais pas à une vie rangée et très conventionnelle « métro boulot dodo ». A ce moment là, ma partenaire était une chanteuse de jazz et grâce à elle, je me suis aperçu que j’aimais vraiment cette musique. Alors j’ai retrouvé ma guitare et j’ai décidé de m’investir dans le projet de devenir guitariste à100%. Dès lors, j’ai développé une relation assez obsessionnelle avec cette discipline car je pensais n’avoir aucune chance de bien jouer ayant commencé très tard. Cela m’a motivé à donner le meilleur de moi-même tous les jours de manière assez acharnée. A cette époque, je jouais environs huit heures par jours, tous les jours, en plus des scènes. A vrai dire je passais littéralement tout mon temps à jouer.
Quels types de musique jouez-vous?
Lorsque j’étais à la Hot Club jazz school, j’ai commencé par apprendre les bases du jazz. Cette école m’a énormément apporté et m’a amené à découvrir le jazz manouche qui est devenu mon style de prédilection. Le jazz est d’un académisme qui me correspond moins que la liberté que l’on retrouve dans le jazz manouche, bien que j’adore le jazz! Bien sur cela reste du jazz, mais le jazz manouche prend une dimension presque enfantine, dans le bon sens du terme. Selon ma perspective c’est un style musical plus abordable, qui touche plus facilement le grand public. Je pratique aussi la musique irlandaise, avec un groupe qui s’appelle Magmell depuis environs 3 ans. Cette découverte était assez hasardeuse puisque c’est à la suite du départ de leur guitariste que j’ai été amené à les rencontrer. Je ne connaissais rien de ce style, puis j’ai réalisé que j’aimais beaucoup jouer ce genre de musique, qui parfois même était emprunte de sonorités galiciennes.
Entretenez-vous un lien particulier avec la France?
Oui! Pour la petite histoire je suis déjà allé à Paris, sans raison particulière, Je ne jouais pas encore de jazz à cette époque. Je ne réalisais pas ce qui pouvait se passer musicalement dans cette capitale. Depuis que je joue du jazz manouche, je me suis aperçu que cette ville était le berceau de cette musique, et la scène jazz à Paris me semble extrêmement créatrice. Depuis cette découverte j’aimerai y retourner. De grands noms du jazz comme Adrien Moignard dont je suis fan inconditionnel s’y produisent et j’aimerais beaucoup passer quelques mois dans la capitale afin d’apprendre encore aux côtés de jazzmen et de me produire dans les boîtes de jazz françaises. J’appartiens aussi à un groupe de jazz manouche aux influences rock appelé Les Voltages, un nom français pour dire quelque chose sur les origines de cette musique que nous jouons en y apportant la dimension électrique donnée par la guitare.
Où vous produisez-vous?
Je joue énormément à Camones. Je joue également à la Fábrica do Braço de Prata, à Ma lingua où je joue presque toutes les semaines, ou encore à Casa do Fauno à Sintra où je joue trois fois par mois. En été, je me produis beaucoup avec le groupe Magmell, et nous nous produisons dans des événements culturels comme les foires médiévales. Il m'arrive aussi de jouer pour des mariages. Camones est certainement l’endroit où je me produis le plus. Bien sûr je me produis dans bien d’autres endroits mais ce ne sont pas ceux où je joue de manière régulière.
Dans combien de groupes jouez-vous?
Je joue dans six groupes. Il y a Magmell qui est un groupe de musique irlandaise, mais aussi Les Voltages, pour le jazz manouche, le groupe des Tributo Django, ou encore aussi Klezmer avec qui je joue de la musique juive traditionnelle. Depuis peu, je joue également avec Gringo Washboard. S’ajoutent à ces groupes un tout nouveau projet de groupe de musique qui s’appelle Folkaccia.
Est-ce difficile de vivre de la musique à Lisbonne?
Je ne pourrais pas dire que c’est facile dans la mesure où ce n’est pas la même chose que d’avoir un travail traditionnel qui apporte un salaire fixe. Mais ce n’est pas insurmontable, et je ne voudrais pas considérer ma condition comme précaire dans la mesure où c’est un choix de vie que j’assume et que j’aime beaucoup. A ce titre je n’ai pas réellement de critères particuliers lorsqu’il s’agit de choisir les endroits dans lesquels je me produis. J’aime énormément ce que je fais mais cela relève d’un métier aujourd’hui. Bien entendu j’ai mes préférences, j’aime jouer à Camones par exemple. Mais avant, je travaillais avec des chanteurs et nous pouvions nous produire dans des endroits où le public ne venait pas spécialement pour nous écouter. Cela fait partie du jeu.
Avez-vous de nouveaux projets pour l’année 2024?
Oui, je veux que le groupe Les Voltages se produise davantage. Nous allons produire des videos et nous sommes aussi en train de développer cette influence rock au sein d’un groupe de jazz manouche que j’espère pouvoir mettre en forme dans un album cette année. Nous sommes aussi en plein enregistrement d’un nouvel album avec Tributo Django. Nous en avions déjà enregistré, on peut acheter le CD en boutique. Je pense que d’autres albums vont sortir, bien que je me concentre presque totalement aux concerts live. Avec Magmell également, nous avons déjà enregistré trois musiques en prévision d'un album de huit titres. Je pense que tout cela prendra forme en 2024.
Quels sont les artistes que vous écoutez le plus?
J’écoute principalement du Fado. J’aime beaucoup certains artistes comme Gonçalo Salgueiro, ou encore Sara Correia, et plus récemment j’ai commencé à écouter Stevie Ray Vaughan. Mais lorsqu’il s’agit de la musique qui m’influence émotionnellement et artistiquement, je me dois de citer Stochelo Rosenberg ou encore Andy Timmons, et évidemment le français Adrien Moignard.