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Que se passe-t-il quand on accouche en Indonésie ?

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Écrit par Athénaïs Pinard Legry
Publié le 10 février 2020, mis à jour le 10 février 2020

Il y a quelques années encore, en cas de grossesse, la majorité des étrangers choisissaient de rentrer donner naissance dans leur patrie, ou de s’envoler pour Singapour. Aujourd’hui, la plupart font confiance aux hôpitaux de Jakarta. Quelques facteurs de méfiance subsistent pourtant. Quels sont les principaux points de vigilance à garder en tête lorsque l’on souhaite accoucher en Indonésie ? Plongée dans un système différent du français. 

Dans les communautés d’expatriés, les recommandations d’hôpitaux et les contacts d’obstétriciens se passent de bouche à oreille. Oubliant parfois que la bonne expérience de l’une ne sera pas celle de l’autre. L’un des premiers conseils que l’on entend lorsque l’on sonde le terrain auprès de celles qui ont donné la vie à Jakarta c’est :

« Attention à la césarienne »

L’accouchement par césarienne est plus « normal » en Indonésie qu’en France (césarienne : opération chirurgicale consistant à inciser le ventre pour mettre l’enfant au monde, au contraire de la « voie basse » qui consiste à laisser le bébé passer par le col de l’utérus. Se traduit par « c-section » en anglais, « caesar » en bahasa).

Il peut être choisi : dans la culture asiatique notamment, beaucoup de femmes craignent les conséquences physiques d’un accouchement par voie basse. Il peut aussi y avoir d’autres motivations, par exemple le choix de la date (la numérologie a un fort impact dans les superstitions).

Il peut aussi être subi, car les médecins locaux ont le scalpel plutôt facile lorsqu’il s’agit de mettre au monde un bébé. Les motivations ne manquent pas : tarification plus élevée pour commencer, mais aussi peur voire manque d’habitude des accouchements par voie basse, ou croyances sans fondement scientifique (par exemple : « le bébé n’a plus à boire si la poche des eaux est rompue »).

De son côté, le système français voit la césarienne comme un acte d’urgence vitale pour la mère et l’enfant. Le point de vue occidental est qu’un accouchement le plus naturel possible est meilleur pour l’un et l’autre, pour de multiples raisons que toute sage-femme sera ravie de détailler avec passion : cocktail d’hormones bénéfiques, mise en place de l’allaitement, lien mère-enfant, appropriation de son corps par la maman…

Ainsi, pour celles qui souhaitent éviter la césarienne, le premier défi sera de trouver un docteur dont les convictions sont aussi proches que possible de celles d’un médecin européen, et qui a de l’expérience sur les accouchements par voie basse.

Déroulement du travail, péridurale… 

Les contractions sont régulières, douloureuses, c’est parti pour l’hôpital ! Le personnel médical indonésien s’attend le plus souvent à ce qu’une fois installée en chambre, une femme reste allongée sur le dos pour le temps de son travail. En France, l’approche est différente. Dans la mesure du possible, la maman est souvent encouragée à marcher, utiliser un ballon de gym pour varier les postures, rester active avec l’aide de son conjoint qui peut prodiguer massages, étirements, rappeler les bons réflexes appris en préparation à la naissance… Par ailleurs, les sages-femmes européennes recommandent de diminuer la lumière au maximum et d’écouter de la musique afin de créer un environnement agréable pour la maman. En Indonésie, tout cela doit être imposé à un personnel médical peu habitué à ces incongruités. Ce sera la mission du conjoint de mettre en place les dispositions dont vous serez convenus en amont.

Pour ce qui est de la péridurale (anesthésie de la femme enceinte par injection dans le dos), « la plus utilisée en Indonésie est la méthode ILA, qui consiste à anesthésier tout le bas du corps » nous affirme Gee, sage-femme britannique vivant depuis plusieurs années à Jakarta. C’est la plus facile à réaliser et elle ne demande pas de réinjecter des doses régulièrement, mais « elle bloquera la femme et le risque d’effets secondaires est accru. Il faut donc demander une péridurale classique (avec injonctions régulières de liquide). Le conjoint devra veiller à ce que l’anesthésiste respecte cela ».

De manière générale, il est important de se renseigner sur les pratiques en cours dans l’hôpital choisi. L’obstétricien-gynécologue qui vous suit est là pour répondre à vos questions. Vous pouvez vous faire accompagner par une sage-femme indépendante qui orientera vos préoccupations. Elle sera également en mesure de vous proposer des séances de préparation à l’accouchement comme vous en auriez en Europe – c’est ce que fait Gee en se déplaçant au domicile des couples. Il y a quelques professionnels de santé occidentaux tels que Gee à Jakarta, n’hésitez pas à prendre contact avec eux afin de profiter de leurs conseils avant le jour J.

Ça y est, après quelques poussées (dans la mesure du possible, quand la mère l’aura senti et non parce que le personnel médical aura décidé de commencer les poussées au moment choisi par lui – la pratique du « direct pushing » peut bien entendu être refusée)… bébé est là !

Le rituel des premiers gestes  

En France, les premiers gestes de l’équipe médicale sont le plus souvent les suivants : le bébé est placé directement sur le ventre de sa maman pour un premier peau-à-peau. Après une dizaine de minutes, le conjoint est invité à couper le cordon ombilical. L’expulsion du placenta intervient peu après, guidée par la sage-femme qui contrôlera au passage les risques d’hémorragie. Bébé reçoit alors ses premiers soins et passe ses premiers tests, puis est replacé dans les bras de sa maman pour au moins deux heures de surveillance avant le passage en chambre.

En Indonésie dans certains hôpitaux, le rituel s’approche plus de celui du temps de nos mamans : une fois sorti, le bébé est montré brièvement aux parents et le cordon ombilical est coupé sans trop attendre. Ceci peut- être dommageable dans le cas où tout le sang ne serait pas encore passé du placenta au bébé ; il vaut mieux s’assurer que le cordon soit blanc au moment de le couper. C’est le rôle du conjoint, qu’il désire pratiquer lui-même ce geste ou pas.

Le bébé passe ensuite les tests réglementaires, avec quelques étapes supplémentaires par rapport à la France sur lesquelles alerte Gee, sage-femme britannique installée à Jakarta. D’abord, l’aspiration du mucus hors de la bouche et du nez du nourrisson : elle n’est pas forcément nécessaire si l’accouchement s’est passé sans encombre et elle peut comporter des risques pour le bébé. Ensuite, une injection d’antibiotiques, quasi systématique car en Indonésie toutes les mères n’ont pas eu de dépistage des maladies sexuelles. Elle peut être refusée.

Ces gestes ne sont pas pratiqués dans tous les hôpitaux : aux futurs parents de se renseigner avant le jour J et de décider ce qu’ils acceptent ou pas. Enfin, on peut bien sûr demander à pratiquer un peau-à-peau immédiat avec son enfant, même si ce n’est pas dans les habitudes de l’hôpital.

Le séjour à la maternité : la durée est comparable à la France

3 jours, c’est le temps qu’une maman reste en moyenne à la maternité en Indonésie, comme en France. En Indonésie, les bébés sont parfois placés dans une nurserie, les éloignant de leur mère afin qu’elle se repose. En France, sauf nécessité médicale, la mère n’est pas séparée de son enfant. Si l’on ne souhaite pas quitter son bébé, il faut très fermement refuser qu’il soit emmené hors de la chambre sans la présence d’un parent.

Des massages de la poitrine peuvent être proposés à la maman. L’objectif est de favoriser l’allaitement. De même, vous pouvez être sanglée dans une gurita– un corset traditionnel qui permet de resserrer le ventre et les hanches. A vous de voir si vous souhaitez tester ou pas !

Le bébé se verra quant à lui proposer un bain quotidien. En France, les nouveau-nés attendent parfois deux jours pour prendre leur premier bain. Ils conservent ainsi au maximum la couche protectrice blanchâtre qui les couvre à la naissance.

Deux choses à garder à l’esprit :

Deux choses sont à garder à l’esprit lorsqu’on prépare son accouchement en Indonésie : d’abord, tout peut être remis en question. En cas de doute sur une pratique, informez-vous, demandez un second avis médical, « exigez que l’on vous expose le rapport bénéfices/risques et les alternatives » recommande Gee. Le conjoint a toute son importance pour mettre en œuvre cet esprit critique.

Ensuite, tout peut être refusé. Il ne faut pas hésiter à vous montrer très ferme si vos convictions et votre instinct vous le commandent.

Et si tout se passe bien, vous pourrez alors profiter de tous les avantages que l’Indonésie offre après un accouchement : massages spécialisés, aide à domicile, températures qui favorisent les séances de peau-à-peau, etc. !

 

 

 

Article intéressant sur les césariennes : https://www.vice.com/en_asia/article/d7qbea/more-indonesian-women-are-getting-c-sections-than-ever-before

 

Athens PinardLegry Petitjournal Jakarta
Publié le 10 février 2020, mis à jour le 10 février 2020
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