Si vous pensiez que le conflit contre Uber et Cabify avait été résolu, c’est loin d’être le cas. La Generalitat adoptera dans les prochains jours deux décrets de lois limitant brutalement Uber et Cabify en Catalogne. Cette nouvelle réglementation pourrait entraîner leur fermeture définitive.
La Generalitat est en phase de porter le coup le plus dur de ces dernières années aux sociétés VTC Uber et Cabify. Selon les documents auxquels Teknautas -le magazine technologique du quotidien en ligne El Confidencial- a eu accès, le gouvernement approuvera dans les prochains jours deux nouveaux décrets qui modifieront le droit catalan des transports et imposeront une nouvelle limitation à l’activité des sociétés VTC. Il faudra réserver son véhicule Uber ou Cabify entre 6 et 12 heures à l’avance. La mesure promue par le conseiller des Transports, Damià Calvet, pourrait annoncer la clôture définitive des deux applications en Catalogne. Comme le reconnaît un responsable de VTC à El Confidencial, "peu importe qu’ils exigent 6, 12 ou 24 heures de précontrat, ils en demandent un, nous sommes morts".
Deux nouveaux décrets de lois
Il s'agit de la plus grande victoire de taxi en Espagne depuis la fermeture d'UberPop en 2014. La Generalitat finalise l'approbation des deux nouveaux décrets de lois qui seront approuvés avant le 25 janvier. L'un de ces décrets autorise tous les conseils municipaux de la communauté autonome à réglementer le VTC ; l'autre autorise l'aire métropolitaine de Barcelone (AMB), une organisation dotée de sa propre réglementation. Les techniciens de l'AMB, sous l'égide d'Ada Colau, ont finalisé aux côtés de la Generalitat la stratégie à suivre pour éviter que les nouvelles mesures puissent être légalement rejetées.
Dans un document interne de l'AMB daté de janvier, l'organisme reconnaît qu'il existe un "engagement de la Generalitat de Catalogne à approuver un décret-loi transposant dans les meilleurs délais à la législation catalane les nouvelles normes en matière de transport de voyageurs et de véhicules de tourisme".
Document interne de l’AMB sur les nouvelles restrictions des VTC
Le principal obstacle imposé par la Généralitat est la nécessité de contacter un Uber ou un Cabify au moins 6 heures à l’avance. Le nombre final d’heures n’est pas encore confirmé, mais il ne sera pas inférieur à six et probablement pas supérieur à 12 heures, même si les taxis réclamaient 24 heures. Mais ce n’est pas tout. Les voitures et les services fournis par chaque voiture devront comporter un dispositif électronique avec lequel ils enverront à tout moment leur mouvements et les services souscrits.
De nouvelles restrictions en prévision
L’AMB inclura également de nouvelles restrictions sur les VTC (qui restent à définir) pour des raisons environnementales, ainsi que des exigences relatives aux contrats de travail et à la sécurité sociale. "Il faudra déterminer d'autres conditions de prestation : la mise en place de jours de repos hebdomadaires, les horaires, l'enregistrement des services, les conditions préalables à la sous-traitance et la transparence des taux appliqués", indique le document.
VTC menace le MWC
Compte tenu de la réglementation imminente de la Generalitat, le secteur des VTC reconnaît que cette mesure marquerait la fin de ses opérations en Catalogne. "C'est infiniment pire que le décret d'octobre. Jusqu'à présent, nous avions au moins quatre années de marge. Suite à cette nouvelle réglementation, nous sommes morts en Catalogne. Nous devons voir comment nous allons réagir, mais pour tout le monde une chose est claire : le Congrès mondial de la téléphonie mobile peut être paralysé par 1.000 taxis mais également par 3.000 voitures VTC. Si la seule réponse des administrations est le chantage, nous n'excluons pas cette voie non plus", explique un responsable du secteur qui demande l'anonymat.
Avec ces mesures, la Generalitat deviendrait la première organisation politique à mettre la main sur le problème le plus sensible de la "guerre des taxis". Et elle le fait avec un atout juridique majeur. Car il serait très compliqué de renverser cette réglementation devant les tribunaux. "En faisant cela par décret-loi, ils font passer les nouvelles exigences au statut de loi et il n’y a qu’une possibilité de les contester : les saisir à la Cour constitutionnelle, qui élimine la possibilité de mesures conservatoires, et ne pourrait tenter que de contester le nombre d’heures, et non la loi en elle-même. En d'autres termes, dès leur entrée en vigueur, ils tuent Uber et Cabify", explique un avocat du secteur.
Tout semble prêt. Le gouvernement envisage d’approuver les deux nouveaux décrets-lois dans les prochains jours. L'AMB, de son côté, s'attend à avoir rédigé son propre règlement avec tous les détails avant le 25 janvier. Il fera l'objet d'une consultation publique au cours du mois de mars, à l'issue duquel il sera définitivement approuvé en avril. Si après le 'decretazo' d'Ábalos d’octobre dernier, il restait quatre ans de vie aux VTC, il ne leur reste plus que trois mois en Catalogne. Et la question est la suivante : que feront les autres régions, en particulier la Communauté de Madrid, l’Andalousie et la Communauté valencienne ? Si le "règlement Colau" a mis le feu au secteur en 2018, la Generalitat vient d’en allumer un autre, avec de bien plus graves conséquences.