Comment se présente le marché de l’emploi francophone en Autriche début 2023 ? À l’aube de cette nouvelle année, lepetitjournal.com s’est entretenu avec Franck Runge, le directeur général de Servithink, qui a créé la principale plateforme de recherche d’emploi et de mise en relation francophone d’Autriche, l'EFA.
Quel est le pouls du marché du travail en Autriche en ce début d’année 2023 ?
D’une manière générale, l’Autriche est un peu un Eldorado. Le taux de chômage est très bas, il était de 4,6% en décembre 2022, c’est quasiment une situation de plein-emploi. D’une manière générale, il est devenu difficile de recruter des candidats car les postes recherchés sont tellement pointus. Parallèlement à cela, les changements sociétaux, le Covid-19, les désirs de la nouvelle génération et la numérisation font que les métiers et les conditions de travail changent.
Aujourd’hui, trouver un candidat prêt à rester cinq ans sur un poste à temps complet, ce n’est plus évident. Cependant, l’Autriche est un petit pays et les conditions d’emploi ici sont quasiment luxueuses, même pour les Français et francophones.
Quel est le profil type du Français ou de la Française qui vient travailler en Autriche ?
Sociologiquement, c’est une sorte de millefeuille. Nous avons des jeunes qui partent à l’aventure avec leur valise et qui arrivent directement de l’aéroport à mon bureau - c’est déjà arrivé ! Ces personnes sont généralement débrouillardes et trouvent vite du travail. Plus compliqué, ce sont les partenaires des expatriés qui sont souvent moins préparés et qui affrontent la barrière de la langue. Enfin, les jeunes diplômés sont très nombreux à venir en Autriche. La plupart des personnes qui viennent en Autriche y restent, elles y sont très bien.
Comment fonctionne la plateforme de l'emploi francophone en Autriche (EFA) ?
L’entreprise Servithink a créé la plateforme EFA qui fonctionne avec trois volets. D’abord, nous nous occupons des Français et francophones installés en Autriche et qui cherchent un emploi. Nous nous entretenons avec eux systématiquement, de manière personnalisée. Les entretiens permettent de cerner le parcours et les envies, et de faire un peu de coaching.
L’autre axe concerne les entreprises qui nous envoient des fiches de postes recherchés. Dans ce cas, nous faisons le lien entre les candidats et les entreprises.
Le troisième et dernier axe concerne les associations, institutions et organisations qui nous aident pour la communication. Il peut s’agir de l’ambassade, la Chambre de commerce, les centres culturels, les universités etc.
Nous sommes présents en Autriche depuis presque quinze ans et nous avons récemment ouvert cette plateforme aux Russes et russophones qui sont présents en Autriche.
Quel est l’avantage concurrentiel d’un ou d’une Française en Autriche ?
Cette question est essentielle dans la recherche d’un emploi à l’étranger. Les meilleures opportunités sont dans les entreprises autrichiennes qui exportent vers la France. Dans ces cas-là, l’intérêt n’est pas que la maîtrise de la langue, c’est aussi la connaissance du marché français, des produits, de la culture. En tant que Français installé en Autriche, il n’est pas tant intéressant de travailler dans une filiale d’un groupe français qui préfère envoyer quelqu’un de sa boîte en expatriation ou recruter directement un Autrichien ou une Autrichienne. Selon le métier qu'on exerce, postuler dans les entreprises françaises n'est donc pas obligatoirement le bon réflexe.
Dans quels secteurs travaillent les Français en Autriche ?
Ce n’est pas tant une question de secteurs que de métiers. Les métiers commerciaux sont très demandés, des key account managers, des business development, mais aussi des métiers de la recherche. Les ingénieurs français sont très demandés. En revanche il faut généralement parler l’allemand, c’est compliqué sinon - ceci dit c’est la même chose en France avec le français ! Excepté peut-être de la recherche scientifique ou la langue de travail est l’anglais.
Les Français et les Autrichiens travaillent-ils bien ensemble, culturellement ?
Les deux cohabitent très bien mais il existe surtout une différence : ce petit muret que nous, Français, établissons entre le privé et le travail. L’Autriche est un petit pays qui fonctionne comme un village : si les volets du voisin sont fermés, ça ne passe pas très bien. Les Autrichiens parlent très facilement mais il faut aller vers eux.
Y a-t-il de l'entraide et de la solidarité entre les expatriés français ?
La communauté des Français en Autriche est très soudée, même au niveau professionnel. Je suis aussi conseiller du commerce extérieur de la France et j’ai l’occasion de voir les expatriés de tous types de profils se serrer les coudes. Nous avons de nombreux événements et organisations pour faire du lien : le Club VIE, le dispositif “Adopte un CCEF”, des associations d’expatriés, et cela fonctionne très bien !