Corsage, le nouveau film de Marie Kreutzer, reprend l’une des plus grandes figures féminines de l’Histoire : Élisabeth d’Autriche (Sissi). Si le film raconte l’histoire d’un corsage trop serré - une métaphore des règles de la cour qui ont étouffé Elisabeth d’Autriche - il semblerait que ce soit au tour du comédien Florian Teichtmeister, inculpé pour pédopornographie, d’étouffer une oeuvre voulue féministe. Décryptage.
Noël 1877. Élisabeth d’Autriche (Sissi), fête son 40e anniversaire. L’Impératice d’Autriche, femme de l’Empereur François-Joseph Ier, n’a pas le droit de s’exprimer et doit rester à jamais la belle et jeune impératrice. Pour satisfaire ces attentes, elle se plie à un régime rigoureux de jeûne, d’exercices, de coiffure et de mesure quotidienne de sa taille. Étouffée par ces conventions, avide de savoir et de vie, Élisabeth se rebelle de plus en plus contre cette image.
Corsage, un regard féministe et fictif de la vie de Sissi
Corsage, réalisé par Marie Kreutzer, est une fiction féministe mettant en exergue la condition difficile des femmes de la cour. Tout comme la série L’impératrice sur Netflix, ce long-métrage s’impose dans un sous-genre très en vogue dans le monde du cinéma actuel : la réinterprétation des grandes figures féminines de l’Histoire.
Mais ne vous y méprenez pas. Corsage n’est pas un documentaire sur Élisabeth d’Autriche. [Attention au spoil] Sissi, interprétée ici par l'actrice luxembourgeoise Vicky Krieps, n’a jamais échangé son identité avec l’une de ses servantes et ne s’est pas suicidée. En réalité, la reine d’Autriche fut assassinée le 10 septembre 1898 à Genève, par Luigi Lucheni. Cet Italien se revendiquait de la mouvance anarchiste.
Sissi, une figure féministe de l’Histoire ?
Sissi semble être l’une des femmes de l’Histoire idéale pour incarner l’héroïne tragique type. Élisabeth d’Autriche était en effet écrasée par le poids de l’étiquette de la cour de Vienne. Dès les premières minutes du film, la reine s'évanouit à cause de son corsage trop serré. Une métaphore des règles de la cour qui ont étouffé Elisabeth d’Autriche, d’où le nom de l'œuvre.
À la la cour, tout est contrôlé. Ses mots, sa posture, son apparence, ses repas, son sport, ses voyages et bien d’autres encore. Sissi se montre dépressive dans cette prison dorée. Le personnage cherche donc, tout au long du long-métrage, à s’émanciper des codes qu’elle estime injustes. Dans cette fiction, le suicide de Sissi est synonyme de libération. Un message tragique, dénonçant l’impossibilité de vivre en tant que femme (du moins à cette époque).
L’acteur Florian Teichtmeister accusé de pédopornographique
Si Corsage est encore en lice pour les Oscars, l’inculpation pour possession de matériel pédopornographique du comédien Florian Teichtmeister - jouant le rôle clé de l’empereur François-Joseph (époux d’Élisabeth d’Autriche) - a ralenti sa diffusion. Il lui est reproché d’avoir possédé en grande quantité du matériel à caractère pédopornographique, entre février 2008 et août 2021. Le comédien risque jusqu’à deux ans de prison.
Face à ce scandale, la télévision publique ORF - qui a cofinancé le long-métrage - déclare sur son site s’abstenir “immédiatement de produire et de diffuser des œuvres avec Florian Teichtmeister”. Selon l’ORF, la chaîne de cinémas Cineplexx (gérant plus de quatre cents salles dans douze pays) a également retiré de l’affiche l’œuvre présentée l’an dernier à Cannes en sélection Un certain regard.
Corsage, un film étouffé par l’affaire de Florian Teichtmeister
Selon l’AFP, l’association professionnelle de l’industrie cinématographique en Autriche a décidé, avec la concertation de la réalisatrice et des producteurs, de maintenir la candidature de Corsage pour les Oscars. La réalisatrice implore de “faire la différence” entre le film et la conduite de l’acteur.
L’avocat de Florian Teichtmeister a quant à lui annoncé vendredi 13 janvier aux médias l’inculpation confirmée par le parquet de Vienne de son client, âgé de 43 ans. Le comédien compte plaider coupable. Il devrait être jugé à partir du 8 février.
À ce jour, Corsage a été présenté dans environ 70 festivals et a été acheté par plus de 90 pays. Sa réalisatrice, Marie Kreutzer, se désole de la situation : “Je suis attristée et en colère qu’un film féministe (…) soit à ce point sali et abîmé par les actions horribles d’une seule personne.”
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