Malgorzata Saadani est une coach et consultante polonaise qui intervient dans les thématiques variées liées aux solutions des conflits, à la succession en entreprise, au développement du leadership et de la créativité, à l'efficacité personnelle et à l'équilibre de vie.
En observatrice pluriculturelle et analyste-stratège, elle porte son regard détaché et engagé en même temps sur les réalités qui nous entourent et qui évoluent en permanence.
Les consignes sanitaires identiques, à lectures et ressentis variables
La diversité culturelle face aux contraintes du Covid-19
Bien qu’existante dans tous les pays simultanément, la pandémie du Covid-19 ne laisse pas la même empreinte partout, et les stratégies pour la combattre n’y sont pas identiques non plus. En finalité, en fonction de l’appartenance culturelle et de la situation socioprofessionnelle, nous vivons cette crise de manière différente même si nous la traversons dans des pays relativement proches, comme la Pologne et la France. Bien sûr, il s’agit d’une conclusion extrêmement générale se basant sur certains stéréotypes. Le raisonnement qui suit sera donc en quelque sorte une analyse intuitive basée sur l’observation personnelle avertie et objective.
Afin d’évaluer le ressenti des gens face à la situation de la pandémie dans toute sa complexité, j’ai choisi quatre critères : la liberté des mouvements (sorties, voyages, couvre-feu), l’existence des restrictions sanitaires (quarantaine, masque, distance, hygiène), la situation au travail comme les soutiens à l’économie et enfin, la rigueur dans l’application des règles édictées.
Parmi les compétences personnelles qui peuvent faciliter le passage du cap difficile, j’en ai mis aussi quatre au premier plan : la capacité d’adaptation aux conditions difficiles (l’endurance), la discipline et le respect de la loi, la solidarité humaine et la résilience.
Pour les besoins du présent écrit, j’ai voulu me concentrer sur l’aspect le plus tangible et pratique pour tout le monde, à savoir, la fameuse consigne officielle sur les comportements préconisés : la distanciation sociale, la désinfection des mains et des surfaces et le port du masque. C’est simple et concis, mais notre perception n’est pas la même ni à l’échelle locale, ni à l’internationale comme nous le verrons dans la comparaison entre la Pologne et la France. Qu’elle soit nommée « DDM » (Pologne) ou « les gestes barrières » (France), il s’agit donc de l’application des règles en théorie identiques, pourtant variables.
La distanciation
Les scientifiques et les médecins s’accordent à recommander une distance de sécurité de 1,5 m entre les personnes. Mais en tant qu’êtres sociaux, nous avons besoin de fréquenter et d’échanger avec les autres, tout en observant nos codes sociaux et culturels de bienveillance et de la bonne éducation. Les Français, surtout ceux qui s’identifient à la culture dite méditerranéenne, apprécient la proximité physique avec leurs interlocuteurs, la salutation par la bise et les fréquentations amicales groupées en lieux publics. Pour les Polonais, c’est l’aspect familial qui est très important : les visites chez les grands-parents et les fêtes familiales et religieuses qui constituent le lien social fort.
Au-delà de la distanciation physique, nous sommes aussi encouragés (et parfois même forcés) à réduire notre bulle sociale c’est-à-dire le nombre de personnes rencontrées habituellement dans la vie de tous les jours.
Face à ces contraintes, notre nature humaine se révolte ou démissionne, en tout cas, elle ne reste pas intacte. Polonais, Français et tous les autres, nous nous laissons convaincre par des arguments rationnels ou par les contraintes légales, bon gré mal gré…
L’hygiène
C’est la partie qui est à mon avis, la plus facile des recommandations à appliquer, et qui – en plus de son contexte actuel covidien – apporte un bénéfice collatéral à nos sociétés : davantage de propreté au quotidien et la baisse des infections habituellement provoquées par le manque d’hygiène. Les anecdotes et les statistiques sur la consommation moyenne de savon par pays et par habitant sortiront de la présente crise certainement redressées d’une manière significative. Ceux qui avaient depuis toujours les bonnes habitudes sanitaires n’ont même pas senti ce changement dans leur vie. En revanche, la communication anxiogène peut provoquer des problèmes d’ordre psychique et physique chez les personnes exposées aux TOCs : quand l’attention excessive à l’hygiène nécessite une thérapie à long terme.
Les masques
C’est le vrai sujet qui fâche et qui provoque des débats enflammés et même des mouvements de résistance en Pologne. La communication officielle changeante et l’inconfort évident en sont les raisons apparentes, mais la vraie résistance à ce geste barrière se situe beaucoup plus profondément dans nos esprits. En masquant nos visages, nous sommes temporairement privés d’une partie importante de notre identité visuelle et d’un canal de communication non verbale avec l’entourage, en plus des difficultés d’allocution. Il y a aussi une forte symbolique de « muselage » apparentée à la privation du droit de parole. Tous ces facteurs conjugués provoquent une réaction de rejet chez les Polonais qui chérissent particulièrement leur liberté. Les Français ont globalement une attitude plus disciplinée, certainement convaincus par les explications cartésiennes sur les bienfaits de cet ultime geste barrière.
Des gestes barrières aux gestes solidaires
Sur ces trois exemples simples, nous pouvons constater à quel point notre humanité, notre identité, notre style de vie et notre liberté personnelle et collective se retrouvent aujourd’hui bousculés dans leurs habitudes. A défaut d’avoir une perspective précise de sortie de cette situation, nous avons le choix rationnel d’apprivoiser cette Nouvelle Normalité, nous y forger notre propre style, calmer nos peurs en cultivant le courage et surtout, en plus de respecter les gestes barrières choisir aussi d’appliquer les gestes solidaires.
Malgorzata Saadani
Coach ICC, conférencière et médiatrice
www.coachonline.net
Économiste en relations internationales et gestionnaire de formation initiale, lauréate de la prestigieuse Warsaw School of Economics et haut cadre certifiée par l’École nationale d’administration publique de Pologne, elle a exercé pendant plus de 28 ans à l’international dans les différents milieux professionnels aussi bien du secteur public que celui privé, avant de se consacrer au coaching à partir de 2007. Cette vocation qui dure déjà depuis de 13 ans lui a permis d’accompagner de nombreuses personnes dans leur quête du développement personnel et de mettre en valeur leurs potentiels par la voie de l’évolution audacieuse et rationnelle.