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ANIMAL-MASCOTTE – Mais qui peut remplacer Wojtek ?

Wojtek, oursWojtek, ours
Écrit par Hervé Lemeunier
Publié le 30 mai 2018, mis à jour le 30 mai 2018

Cela fait maintenant 55 ans que Wojtek nous a quittés. Trouvé en Iran en 1942, cet ours brun de Syrie a adopté la nationalité polonaise en devenant le seul ours engagé militairement dans la Seconde Guerre Mondiale, aux côtés de l’Armée polonaise de l’Ouest. Fêtard, buveur, mangeur de mégots et même grand stratège de guerre – la bête a fini avec le grade de caporal, tout de même -, Wojtek meurt en 1963 en laissant derrière lui une place de mascotte désespérément vide. Et si les modestes jumeaux Slavko et Slavek n’ont pas eu les armes nécessaires pour prendre la relève lors de l’Euro 2012, leur échec révèle au moins un critère de sélection pour les autres candidats : la mascotte de la Pologne sera un animal ou ne sera pas. Quelle créature a pu, peut ou pourra se hisser au niveau de charisme de Wojtek ? Quel autre animal peut donner une image positive de la Pologne dans le monde ? Short-liste des candidats les plus crédibles au titre.

 

Baska Murmanska 

 

Wojtek, un ours qui fait la guerre la clope au bec et la vodka à la patte : une histoire incroyable, pour nous autres Français. Pourtant, en Pologne au temps de Wojtek, on s’en lassait presque. Comme Wojtek, Baska Murmanska est un ours, polaire et femelle cette fois. Comme Wojtek, Baska a été adoptée par un bataillon de polonais : la Légion Murmansk, constitués de Polonais exilés et envoyés en 1917 dans le chaos de la guerre civile soviétique. Et comme Wojtek, elle s’est engagée militairement aux côtés de la Pologne, obtenant même le grade spécial de « Fille du régiment ». Un grade, que, contrairement à son cadet dépravé et alcoolique, Baska mérita amplement : Baska était « entraînée à marcher en rangs, se tenir au garde-à-vous aux moments appropriés et même faire le salut militaire », d’après le diplomate de l’époque Jan Meysztowicz. Ce comportement exemplaire lui valut même le droit de serrer la main du Maréchal Pilsudski lors de son arrivée à Varsovie, peu après avoir été le centre d’attention d’Edimbourg où les Polonais s’étaient réfugiés pendant quelques mois. Petit signe du destin, Edimbourg vit un autre animal lors de sa retraite militaire : un certain Wojtek.

 

La note LPJ : 17/20. L’histoire est classe. S’il fallait être tatillon, on notera que Baska s’est rendue coupable de la mort du chien d’un officier haut-gradé anglais lorsqu’elle était encore en Sibérie. Pas d’incident diplomatique toutefois.

 

 

Tuzinka

 

Parfois, les histoires commencent mieux qu’elles ne finissent. En 1937, les éléphants indiens Kasia et Jas donnent naissance à un petit éléphanteau femelle au Zoo Praga de Varsovie, ce qui constitue déjà un petit événement en soi. La nouvelle provoque ainsi très rapidement un émoi énorme auprès des Varsoviens, qui pensent alors vivre la première naissance d’un éléphant en Pologne, ainsi que la douzième mondiale dans un parc zoologique. On apprendra plus tard que cette naissance ne sera que la 27e, mais qu’importe : Tuzinka, de « douzième » en polonais, a déjà trouvé son prénom. Elle et ses parents ne feront finalement trembler les foules que deux ans, le temps pour l’Histoire au grand H de gober la petite. En septembre 1939, Kasia est tuée par une bombe allemande. Dans le même temps, Jas est sacrifié par les autorités du zoo, trop angoissées à l’idée que des mastodontes puissent déambuler dans une Varsovie en ruines. Et Tuzinka ? Orpheline, elle est déportée, comme de nombreux animaux polonais, dans des zoos allemands. Installée définitivement au zoo de Koningsberg en 1940, elle n’y survivra que quatre ans, bien loin des 48 ans d’espérance de vie de son espèce.

 

La note LPJ : 18/20. Tombée dans l’oubli, la martyre Tuzinka mériterait une meilleure mise en valeur. Pour elle et pour les 30 millions d’animaux mobilisés pendant la Seconde Guerre Mondiale, désespérément ignorés de l’Histoire.

 

 

Le bébé Jung

 

Seul animal encore en vie de cette sélection, Jung fait figure de petit poucet au titre de nouvelle mascotte. Quoi de plus normal pour un bébé rhinocéros indien, né il y a tout juste deux mois et demi. Pour autant, Jung apprend vite. A peine mis au monde, le solide poupon de 44 kilos commençait déjà à faire ses premiers pas sur la paille de sa cage et sur le compte Facebook du Zoo de Varsovie. Et s’il ne quitte toujours pas sa mère, Shakai – qui, au passage, est mère des trois seuls rhinocéros indiens nés en Pologne -, Jung est enfin autorisé à sortir de sa cage pour prendre bains de foules et de soleil. Ses petites foulées maladroites et ses oreilles de lapin ont très rapidement conquis les habitants de la capitale polonaise, aficionados des réseaux sociaux en tête. La Journée des Animaux de Varsovie, qui a eu lieu le samedi 19 mai dernier, affichait même une tête de rhinocéros dessinée en guise de logo. Ces premières semaines ont tout l’air de lui offrir une belle success-story à venir, ce qui se démarquerait beaucoup de l’évolution inquiétante de son espèce, menacée d’extinction et toujours massivement recherché pour les potentiels bienfaits scientifiques de sa corne nasale.

 

La note LPJ : 14/20. Dur, dur de concurrencer les deux autres mastodontes du concours, tant leurs histoires respectives sont fortes. Mais une mascotte sans conflit international au second-plan, ça serait quand même pas du luxe non plus pour un pays qui cultive déjà son passé de martyr.

 

 

Créez votre propre mascotte polonaise

 

Instant partage : vous aussi, amusez-vous à créer votre mascotte polonaise. Après avoir trouvé un nom bien polonais avec un quota minimum de 75 % de consonnes, sélectionnez un animal parmi les suivants : pygargue à queue blanche, bison, aigle blanc, cigogne, sirène – débat sur la crypto-zoologie à prévoir. Ne reste alors plus qu’à le croiser avec un événement marquant de l’Histoire de Pologne de votre choix.

Publié le 30 mai 2018, mis à jour le 30 mai 2018