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SOCIETE - Divorce à la polonaise

Écrit par Lepetitjournal.com Varsovie
Publié le 6 février 2012, mis à jour le 5 janvier 2018

La Pologne a beau être 40% moins peuplée que la France, on y célèbre chaque année autant de mariages. On y divorce par contre deux fois moins. LePetitJournal.com se consacre aujourd'hui à ces divorces et séparations, sans oublier les annulations de mariage, dont ce pays est le champion du monde !

Entre libéralisation des m?urs et traditionalisme
81% des Polonais considèrent le divorce comme un grand problème social. Un sur sept verrait même les divorces interdits contre 50% qui souhaiteraient la procédure facilitée. Les plus menacés sont les jeunes mariés (20 - 24 ans). Le mariage dans cette tranche d'âge est encore trop souvent lié à une grossesse non-désirée, ce qui constitue une base plutôt bancale. On divorce en moyenne au bout de 14 ans de mariage, mais c'est entre la 5e et la 9e année qu'il y a le plus de séparations.

65.000 divorces en 2011
Depuis la seconde guerre mondiale, la tendance est à la hausse : 10.000 divorces en 1952, 20.000 en 1965, 35.000 à la fin des années 70 et un pic à 72.000 en 2006. En Irlande et en Italie, deux autres pays très religieux, à population égale, on divorce deux fois moins qu'en Pologne (à l'inverse ne vous mariez pas en Belgique, votre union pourrait ne pas durer : 40.000 mariages pour 30.000 divorces en 2009 !)

Moins traditionnelles que les campagnes, les grandes villes polonaises recensent 80% des divorces du pays. Le taux de divorce y atteint 40% et égale celui des pays d'Europe du Nord. A noter qu'en France aussi, un Parisien divorce deux fois plus qu'un Breton et trois fois plus qu'un Lozérien...

En Pologne, la moyenne d'âge des divorcés est de 45 ans pour les hommes et 35 ans pour les femmes. 2/3 des divorces sont demandés par la femme (contre 3 demandes sur 4 en France). Sa faute n'est reconnue que dans 3% des cas. Dans 70% des cas il n'y a d'ailleurs pas de faute reconnue. Les causes évoquées le plus fréquemment : incompatibilité des caractères (32%), infidélité (24%), alcoolisme (23%) ? surtout de l'époux, mauvais traitement (9%) et problèmes financiers (9%).

Divorce ou séparation ? 
Rétablie en 1999 après près d'un siècle d'absence, la séparation, appelée aussi « petit divorce » se distingue surtout de ce dernier par la rapidité des procédures et son caractère réversible. Elle reste aussi bien moins chère : 100 zlotys de frais contre 600 zlotys pour un divorce. Contrairement à d'autres pays européens, elle n'est pas l'étape obligatoire avant la prononciation du divorce.

Entre 1999 et aujourd'hui, on est passé de 1.300 séparations à 3.000, avec un pic de 11.600 en 2005. Si on note de rares cas de retour en ménage des époux séparés, l'écrasante majorité des séparés chemine plutôt vers le divorce.

Une spécialité polonaise
Le rôle que conserve encore l'église catholique en Pologne influence bien sûr le nombre de divorces. 70% des jeunes mariés optent pour un mariage religieux (contre 30% en France). Or pour l'Eglise, une fois contractée devant l'autel, une union dure jusqu'à la mort.

Beaucoup espèrent contourner ce problème d'une manière assez inattendue : l'annulation de leur mariage. L'union n'est pas brisée, elle n'a jamais eu lieu. Les raisons susceptibles d'annuler un mariage : non-respect de l'âge minimum, polygamie, inceste, impuissance, ou autre dissimulation de faits essentiels devant le conjoint. Cependant n'importe quel avocat ne fera pas l'affaire. Il existe en Pologne 40 personnes disposant d'une autorisation spéciale de l'évêque pour gérer ce genre de dossiers.

Le nombre de demandes de nullités de mariage a atteint 10.000 en 2010. 3.500 environ obtiennent satisfaction (contre seulement 700 cas en France pour 130.000 divorces...). La Pologne est d'ailleurs le leader mondial des demandes d'annulation de mariage, dépassant depuis peu l'Italie et le Brésil (qui compte pourtant près de 200 millions d'habitants !).
Cette procédure, même au sein de l'église, a cependant un coût : entre 10.000 et 30.000 zlotys.

Divorces et complications...
Les divorcés catholiques pratiquants n'ayant pas obtenu d'annulation du mariage (une majorité) sont censés choisir entre union ou pratique religieuse. Ce dilemme entre vie sexuelle et sacrements reste la source de réelles souffrances pour de nombreux croyants dont la première union n'a pas résisté aux épreuves du temps.

Chaque année près de 60.000 enfants polonais sont aussi confrontés au divorce de leurs parents. Dans plus de 60% des cas la garde est confiée à la mère contre à peine 4% au père. 1/3 des divorcés se partage la garde de leur progéniture. Le divorce signifie généralement un abaissement du niveau de vie pour la femme, surtout en cas de présence des enfants. L'efficacité du recouvrement des pensions alimentaires laissant notamment fortement à désirer.

Le terme « rodzina rozbita » (famille éclatée) est encore largement utilisé pour désigner les familles monoparentales et a du mal à se départir d'une connotation péjorative (tout comme le terme de « concubin » d'ailleurs qui renvoie directement aux chroniques policières). Quant au terme de « famille recomposée » (rodzina zrekonstruowana, ou plus couramment rodzina patchworkowa), il a toujours du mal à prendre racine dans la société polonaise.

Anna Riondet (www.lepetitjournal.com/varsovie.html) lundi 6 février 2012

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Publié le 6 février 2012, mis à jour le 5 janvier 2018