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Résultat du premier tour vu de Pologne : les conservateurs polonais insatisfaits !

Election présidentielle vue de PologneElection présidentielle vue de Pologne
Écrit par Lucien Boddaert
Publié le 13 avril 2022, mis à jour le 13 avril 2022

Dans le contexte de l’invasion russe en Ukraine, l’élection française est cette année particulièrement suivie en Pologne. Sélection de réactions dans la presse polonaise à l’issue du premier tour qui a vu la qualification du président sortant, Emmanuel Macron, et de sa rivale du Rassemblement National, Marine Le Pen.

 

Une lutte pour le futur de la France et de l’Europe

L’hebdomadaire de centre-gauche Polityka souligne l’enjeu particulier de cette élection pour l’Europe en raison du poids économique, mais également militaire, de la France. L’article souligne le positionnement pro-Européen et libéral d’Emmanuel Macron, candidat de la stabilité politique. L’hebdomadaire note que si Emmanuel Macron a connu un regain de popularité lié à la situation internationale, il a perdu en vigueur dans les derniers jours de la campagne avec la question de la réforme des retraites.

La proposition électorale trumpiste de Marine Le Pen a séduit une partie de l’électorat français, la candidate parvenant dans le même temps à se faire discrète sur la question russe malgré ses contacts passés avec Vladimir Poutine et le fait qu’elle ait bénéficié de prêts russes pour financer sa campagne de 2017.

Considéré comme victorieux malgré son absence au deuxième tour, le candidat de la France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon est parvenu à élargir son électorat en tempérant notamment son discours sur le protectionnisme économique qui le rapprochait des nationalistes.

Polityka considère que l’avenir de la France et l’Union européenne dépend du soutien de Mélenchon - véritable arbitre du second tour, à Emmanuel Macron.

 

 

Le destin de l’Europe entre les mains de la gauche

Dans une interview pour OKO.press, publication en ligne classée à gauche, le politologue Aleksander Smolar estime également que le destin de la France et de l’Europe se trouve désormais entre les mains de la gauche. Aleksander Smolar note que le résultat pour Emmanuel Macron est meilleur qu’anticipé dans les derniers jours de la campagne. Ce dernier payait ces jours passés un refus de faire campagne, l’affaire McKinsey et l’annonce de mesures peu populaires, dont la réforme des retraites. Les dégâts pour lui sont donc limités mais l’incertitude demeure pour le second tour en raison notamment de l’effondrement spectaculaire du gaullisme et du Parti Socialiste.

Le comportement de l’électorat de Jean-Luc Mélenchon sera crucial, s’oriente-t-on vers une abstention massive? Quel sera le niveau de porosité des électeurs de la France Insoumise avec l’extrême droite ?

Pour gagner cette élection, Emmanuel Macron va devoir faire campagne et aller chercher les voix de gauche en axant son discours sur la politique sociale et la lutte contre l’inflation.

En raison de sa posture européenne, de sa vision des relations avec la Russie et de la reconnaissance de sphères d’influence qui pénaliserait l’Ukraine, la victoire de Marine Le Pen serait une menace pour la Pologne selon le politologue.

« Après les élections, la France se réveille avec la gueule de bois » : positionnements pour le second tour

« Après les élections, la France se réveille avec la gueule de bois » titre Rzeczpospolita. Et le pays de se demander ce qui se passera le 24 avril. Les partis piliers de la 5ème République sont à terre et vont connaître une situation financière difficile dans un avenir très proche en raison du non-remboursement de leurs frais de campagne.

Un des principaux enseignements du premier tour est que l’électorat du parti gaulliste s’est dirigé dès le premier tour soit vers l’extrême droite soit vers la candidature d’Emmanuel Macron.

Le front républicain se répètera-t-il ? C’est la question principale que pose le quotidien qui note qu’à l’exception d’Éric Zemmour, tous les candidats ont appelé à soutenir Emmanuel Macron ou, dans le cas de Jean-Luc Mélenchon, à ne donner aucune voix pour Marine Le Pen.

Pour réussir le pari de sa réélection, Emmanuel Macron devra s’adresser dans sa campagne de l’entre-deux-tours à l’électorat de gauche et lui donner des gages en revoyant ses propositions sur la réforme des retraites ou sur la conditionnalité des aides sociales.

 

Les conservateurs polonais insatisfaits

Les médias conservateurs insistent davantage dans leur analyse des résultats sur les intérêts immédiats, ou les dommages, pour la Pologne. Les enjeux principaux sont la perspective d’une pression plus ou moins forte sur l’état de droit en Pologne, la possibilité ou non d’avoir un allié sur la scène européenne, ainsi que la redéfinition de la politique européenne vis-à-vis de la Russie.

Pour son émission matinale au lendemain du premier tour, la radio publique d’information PolskieRadio24 donne la voix à deux analystes représentatifs du camp conservateur qui considère que la Pologne n’a rien à gagner de ces élections.

D’après un premier invité, chef de la rubrique monde du quotidien conservateur Gazeta Polska :

« Il n'y avait pas de bon choix pour la Pologne. J’ai l’impression qu’Emmanuel Macron est, et reste un mauvais choix pour notre pays. - Mais dans la situation de guerre en Ukraine, sa victoire peut toutefois présenter certains avantages par rapport au choix de Marine Le Pen ».

Même si idéologiquement Marine Le Pen est plus proche du camp conservateur polonais, son positionnement international est considéré comme dangereux pour la Pologne avec la perspective d’une sortie du commandement intégré de l’OTAN et d’une politique étrangère pro-russe.

Les intervenants relativisent toutefois ces risques et concentrent leurs critiques sur Emmanuel Macron en rappelant également les propos fort peu diplomatiques du Président français à l’égard de Mateusz Morawiecki.

Dans ce contexte Jerzy Mosoń, de la FIBRE (Fundacja Inicjatyw Bezpieczeństwo-Rozwój-Energia, Fondation pour les initiatives sécurité-développement-énergie) estime que, du point de vue de la Pologne, le deuxième tour sera un « choix entre peste et choléra » et d’ajouter :

« Je suis à nouveau plein d'inquiétudes quant à la victoire de Macron, qui n'aime tout simplement pas les autorités polonaises actuelles ».