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HISTOIRE – La citadelle de Varsovie et le Pavillon X

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Écrit par Lepetitjournal.com Varsovie
Publié le 13 décembre 2020, mis à jour le 13 décembre 2020

Sur une colline surplombant la Vistule, s’élève la citadelle de Varsovie, fortification impressionnante datant du  19ème siècle, l’un des complexes d’architecture défensive les mieux conservés en Pologne. Elle abrite également le fameux Pavillon X, prison centrale pour les prisonniers politiques. Ce lieu qui a vu défiler des héros de l’indépendance, symbolise la lutte sans relâche menée par les Polonais contre l’occupant russe.

 

La citadelle de Varsovie

En novembre 1830, une insurrection éclate à Varsovie initiée par des mouvements indépendantistes. Le tsar Nicolas Ier, également roi de Pologne fait preuve d’un autoritarisme grandissant et revient sur les libertés et une certaine autonomie accordées aux Polonais par son prédécesseur Alexandre Ier. Il n’en faut pas plus aux Polonais pour se soulever contre l’occupant russe. Mais les forces sont inégales, l’armée polonaise est mal équipée et peu expérimentée et malgré des débuts victorieux le tsar Nicolas Ier reprend Varsovie le 8 septembre 1831. Il exerce une répression féroce et met fin à l’autonomie du pays. Il faudra attendre 1918 pour que la nation polonaise recouvre son indépendance.

 

Afin de maintenir l’ordre dans la ville le tsar fait construire une citadelle qui va servir de prison et de centre d’exécution pour les patriotes polonais. Projet mené par le général commandant Iwan Dehn, la bâtisse se compose de trois bastions et de deux demi-bastions. Plusieurs portes mènent à l'intérieur: la Porte d'Alexandre, appelée aussi la Porte de la Nouvelle Ville, la Porte de Zoliborz et la Porte d'Ivan, appelée aussi la Porte des Exécutions. Pour sa construction, à laquelle travaillent quelque 2.000 ouvriers russes, on rase une partie de la ville, détruisant maisons et palais et expropriant des milliers d'habitants. Le financement est infligé par Nicolas Ier aux habitants de Varsovie : le coût total est évalué à 11 millions de roubles (environ 8,5 tonnes d'or pur ou 128 millions d'euros), ce qui laisse la ville totalement exsangue. 555 canons, dont les obus ont une portée de 1,5 kilomètres et peuvent donc atteindre la Vieille et la Nouvelle Ville, sont installés sur le terrain de la forteresse. Mais la citadelle sert surtout de dépôt d'armes et de munitions. Elle n'a finalement pas à jouer de rôle défensif, sa force dissuasive ayant suffi. Il faut en effet l'imaginer trônant en surplomb de la ville dans un environnement sans arbres ni maisons...

 

Le Pavillon X

 

Ce bâtiment qui n’a pas changé depuis l’époque de sa construction est un centre de détention pour les prisonniers politiques. Sa situation à l’intérieur de l’enceinte de la citadelle rend toute évasion impossible. Et paradoxalement, si les conditions de détention sont plutôt correctes (cellules spacieuses, bien chauffées et prisonniers nourris à leur faim), le Pavillon X est aussi le lieu d’une condamnation assurée. Les prisonniers y sont soit pendus, soit envoyés dans les mines en Sibérie après une marche de milliers de kilomètres. La Commission d’investigation et la Cour martiale qui procèdent aux jugements s’y installent également. Et parce que bon nombre de prisonniers sont instruits, issus de bonne famille et  leaders des mouvements d’indépendance, la citadelle et le Pavillon portent à juste titre le nom de « la mort de la pensée ».

 

Les prisonniers célèbres

Les premiers prisonniers politiques sont des leaders et activistes d’organisations clandestines luttant pour l’indépendance qui voient le jour après l’échec de l’insurrection de novembre 1830. Les premières exécutions ont lieu le 16 mars 1846.

 

Début 1860, des manifestations patriotiques anti-tsar éclatent. Une nouvelle grande vague d’arrestations débute alors et s’intensifie pendant l’insurrection de 1863. Après l’échec de celle-ci, environ 10 000 insurgés sont arrêtés. Le chef de la rébellion, Romuald Traugutt est pendu publiquement le 5 août 1864.  Lors de son emprisonnement il n’a pas le droit de parler, ni de voir sa famille ou de correspondre avec eux.

 

A la fin du 19ème siècle, avec le développement du capitalisme en Pologne, le Pavillon X devient une prison pour les activistes socialistes et s’y retrouvent notamment Roman Dmowski et Józef Piłsudski . Tous deux œuvrent pour l’indépendance de la Pologne mais alors que Roman Dmowski prône une Pologne ethniquement homogène, Józef Piłsudski souhaite une Union fédérale englobant la Biélorussie, la Lituanie et l’Ukraine. Cet homme politique a été condamné à l’exil en Sibérie pour avoir comploté contre le Tsar. Il devient ensuite le chef du Parti socialiste polonais et lutte pour obtenir l’indépendance de la Pologne ce qui le mène à son emprisonnement au Pavillon X. Il en ressort en simulant une maladie mentale qui lui permet d’être envoyé dans un hôpital psychiatrique d’où il réussit à s’échapper pour devenir plus tard le principal homme politique de la IIème République.

 

Le 20 ème siècle

Les années de Révolution de 1905 et 1907  ainsi que les années suivantes marquent une des périodes les plus tragiques et les plus cruelles dans l’histoire de la citadelle et du Pavillon X.

Pendant la première guerre mondiale, la citadelle est occupée par les Allemands et garde son rôle de prison et de lieu d’exécution. A la proclamation d’indépendance de la Pologne en 1918, le Pavillon X devient un endroit où attendent d’être jugés les prisonniers soumis à une juridiction militaire. Plus tard, les officiers se voient attribuer des appartements et l’aile Est est consacrée à l’organisation d’une exposition en mémoire des prisonniers.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, la citadelle devient un bastion de l’armée allemande.

A la fin de la guerre, la citadelle retourne entre les mains de l’armée polonaise. Le Pavillon X et ses environs deviennent accessibles aux visiteurs en 1963, date du 100ème anniversaire de l’insurrection de janvier.

 

Et aujourd’hui

Le Pavillon est à présent une filiale du musée de l’Indépendance. Il est devenu le symbole de la lutte pour l’indépendance, des milliers d’activistes patriotes (environ 40 000) ayant été incarcérés ici. Y sont exposés photos et documents d’époque et les cellules sont toujours (presque) en l’état. Le Pavillon abrite en outre une exposition de peinture de l’artiste Aleksander Sochaczewski, un prisonnier condamné aux travaux forcés en Sibérie. Ses œuvres représentent le voyage en Sibérie et les conditions de travail là-bas.

 

pavillon X

 

 

 

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