Patrick Nicolas est un entrepreneur solidaire en Isaan. Quand certains prêtent main forte aux Français de la région, quand d’autres veulent développer les échanges culturels entre Thaïlandais et Français, lui veut montrer que l’Isaan a un avenir économique et que sa main d’œuvre y a d’autres talents qu’agricoles. Il y a investi, créé des marques et, alors qu’il souffle la première bougie de son atelier de confection de maroquinerie, il voit bien plus grand pour l’avenir.


C’est encore un nouveau regard sur l’Isaan que nous propose aujourd’hui Patrick Nicolas. Dans les lignes qui suivent, vous allez lire Isaan. C’est ainsi que lui l’écrit, en vertu du ton allongé qu’il faut appliquer au son « a ». Il s’est établi dans la province de Kalasin. Lui, l’homme de l’Est de la France, y a tout de suite établi des comparaisons. « Ce territoire est méconnu, stéréotypé, il a mauvaise réputation, dit-il. Il a sa langue, sa culture, son histoire. On dirait un mélange d’Alsace et d’Auvergne. Une région très paysanne regardée de travers par les gens de la ville, comme les Parisiens regardent parfois de travers le campagnards. Tout cela fait que l’Isaan est mal connue des étrangers. »
En se promenant en Isaan, il découvre des savoir-faire autres que l’agriculture
Patrick Nicolas analyse le destin de la région à l’aune de sa pauvreté. C’est ce dénuement qui, selon lui, a poussé de nombreuses familles à envoyer les filles se prostituer dans des régions touristiques pour ramener de l’argent à la maison. Lui aussi a rencontré « une fille de l’Isaan » comme il les appelle à Bangkok. Mais elle est une femme d’entreprise, diplômée en archéologie. Pendant la période Covid, ils ont délaissé la capitale pour venir passer un peu de temps avec la belle-famille. Ils ne sont plus repartis. Patrick a connu beaucoup de grandes villes, en Europe et en Asie, et la campagne lui fait du bien. Sauf qu’après quelque temps dans son village, le temps s’est allongé, l’ennui est apparu, et quasiment pas un camarade pour parler anglais à l’horizon. Alors il se promène. Beaucoup. Il découvre des savoir-faire autres que l’agriculture comme le tissage et la couture. Il réalise que ces fermiers travaillent à façon l’après-midi, payés à la tâche de quelques pièces par des entreprises citadines. Leur situation l’agace et lui donne des idées. « À Taïwan et à Canton, j’ai connu la bagagerie et la petite maroquinerie, avec les mêmes pratiques, raconte-t-il. Je me suis dit qu’il fallait aider ces gens en les guidant et surtout sans les exploiter. Je suis donc sorti de ma retraite pour créer un business caritatif, ou philanthropique, et sortir de mon ennui. »
Il y a un potentiel économique en Isaan
Il a donc créé une société de droit thaïlandais avec Isaanbags pour label et Made in Isaan Thailand pour signature. Il a investi 650.000 bahts. Il a recruté quatre ouvrières. Son épouse et lui travaillant bénévolement à leurs côtés. « Mon but est d’avoir cinquante ou cent personnes au plus vite, de pouvoir faire vivre des familles. Je veux être un cobaye pour la communauté des affaires, leur montrer qu’il y a en Isaan une nouvelle génération diplômée, aux savoir-faire complémentaires de ceux des anciens. Je veux leur montrer qu’il y a un potentiel économique en Isaan. Les coûts y sont bien moins élevés qu’à Bangkok et la main d’œuvre, si elle est la même, est déjà sur place, chez elle. »
À la recherche d’influenceuses originaires de l’Isaan
Isaanbags fabrique de la petite bagagerie, notamment de l’objet publicitaire et du cadeau d’affaires, ce qui permet d’amorcer la pompe avec les premiers clients qui ont besoin de pièces en plus grand nombre. Depuis le début de l’année, les comptes sont à l’équilibre, première victoire.
Patrick Nicolas a également créé la marque Isaangirl, dédiée, comme son nom l’indique, aux jeunes femmes. Il y propose petits sacs à main de shopping, tee-shirts, tabliers, chapeaux, … Et pour les faire connaître, il essaie de trouver des influenceuses, idéalement originaires de l’Isaan. En attendant, toutes les créations sont en dépôt-vente dans des coffee shops et cherchent distributeur en Thaïlande.
Isaan Bonjour veut faire connaître et défendre le territoire
Le projet général de Patrick Nicolas est plus grand que deux simples marques. Il l’a baptisé Isaan Bonjour. Son but global est de faire connaître et de défendre ce territoire qu’il a appris à aimer. Isaanbags et Isaangirl ne sont que les projets économiques qui permettent de mettre en avant la région. « La principale influenceuse du pays, avec plus de cent millions de followers, vient de l’Isaan, raconte-t-il fièrement. Le boxeur le plus connu de Thaïlande aussi. Il se passe beaucoup de choses positives ici. Nous sommes un vrai berceau de culture. » Il ne vous reste plus qu’à aller faire un tour en Isaan pour vous faire votre propre idée.
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