L’histoire de la Seconde Guerre mondiale est bien connue en France et à l’étranger. Pourtant, peu sont les auteurs qui abordent ce conflit du point de vue des pays du nord de l’Europe. Dans son ouvrage, Thierry Maricourt propose d’aborder cette vision, en se focalisant sur l’histoire du jeune Stig.
Une Suède neutre, partagée entre résistance et laisser-faire
L’histoire commence au Danemark en 1942, avec Stig, un jeune adolescent suédois, et son père, journaliste, qui est également un des leaders de la résistance scandinave. Le duo se retrouve dans ce pays voisin pour les activités de résistant du père. De fil en aiguille, de rencontres en rencontres, et de frayeurs en frayeurs, Thierry Maricourt promène le lecteur entre Danemark, Suède, et Norvège.
En construisant cette trame fictive, bien que l’on pourrait s’y méprendre, l’écrivain dépeint en fait la réalité de la guerre dans cette partie du globe. Des royaumes de Norvège et de Danemark envahis, mais pas soumis « Hitler avait-il cru qu’en envahissant le Danemark et la Norvège, pays de race pure, il mettrait un pied en terre conquise ? Comme il s’était trompé ! La Résistance n’avait jamais été aussi puissante qu’ici » (P32).
On apprend alors que ces deux pays, bien que rapidement attaqués et assiégés par le régime nazi, se sont dressés contre cette idéologie, prônant leurs idéaux démocratiques. Pour les Nordiques, peuples modestes, les idées nazies n’avaient peu d’impact. D’ailleurs, le Roi de Norvège partit lui-même de ses terres pour trouver refuge en Angleterre, comme signe d’insoumission à la croix gammée. La plume de Maricourt nous transporte dans un Oslo paré du V de la victoire, où toute une population, des pasteurs aux ouvriers, s’affairent dans la lutte contre le nazisme. Mention spéciale est aussi faite au peuple des Lapons, dont le rôle n’est pas à négliger, puisqu’ils « jouaient un rôle de passeurs, permettant aux résistants norvégiens de se réfugier en Suède, ou aux opposants au nazisme et aux espions de tout poil se trouvant déjà sur le sol suédois de gagner la Norvège sans ambages » (P232).
La Suède joue un rôle particulier dans ce conflit
Le gouvernement et les dirigeants ne veulent pas de problèmes avec les Allemands, et de ce fait, tiennent un discours officiel plutôt conciliant. Mais dans l’ombre, la population réagit globalement comme leurs voisins danois et norvégiens. Thierry Maricourt retranscrit ainsi les liaisons entre les pôles de résistance scandinaves, permettant à ce que « des milliers d’enfants furent sauvés et, tant que dura la guerre, répartis dans des familles sur tout le territoire suédois » (P89).
La Suède était alors une terre d’accueil pour bon nombre de juifs, réfugiés de l’Europe persécutée. C’est d’ailleurs le cas de Judit, jeune fille Hongroise juive, devenue une amie proche du héros Stig. Pendant que Danemark et Norvège entrait dans une lutte ouverte et active contre les SS sur leurs territoires, « la Suède était neutre, envers et contre tout. La Suède demeurait neutre dans cette saleté de guerre et les enfants étaient ici à l’abri » (P97). L’auteur justifie cette neutralité par une politique pacifique que la Suède avait adopté depuis bientôt un siècle, lui permettant de nombreuses avancées sociales et sociétales. C’est donc comme une sorte de succursale de la Résistance que la Suède peut être observée, où tout s’organise et où les réfugiés d’Europe se retrouvent « La Suède accueillait, et ce, presque officiellement, des réfugiés de toute l’Europe […] À Stockholm, la Résistance danoise, par exemple, avait presque pignon sur rue » (P120).
Malgré la dureté du récit, due à son contexte terrible, Thierry Maricourt trouve le moyen de souligner dans certains passages de beaux moments. Ils mêlent espoir et optimisme, notamment lorsque Stig se rend compte que la lutte peut se faire autrement que par la violence « Mes dessins étaient mes armes » (P130). Cependant attention, le public est parfois confronté à la réalité de la guerre, qui ne pardonne généralement peu voire pas du tout. Finalement, il y a dans ce livre un véritable message fort, qui oscille entre espoir et réalisme, solidarité et pacifisme, qui aide à comprendre en quoi la Suède, et les pays scandinaves plus globalement, ont eu leur importance entre 1939 et 1945.
Si vous souhaitez vous pencher sur ce pan de l'Histoire, le livre est disponible aux éditions Calicot.
Thierry Maricourt, un auteur à la conquête de l’histoire scandinave
Avec plus de 60 ouvrages à son article, Thierry Maricourt dispose d’une collection déjà bien affutée. La majeure partie de son œuvre est dédiée à la culture et à l’histoire des pays du Nord. Son but est presque celui d’un historien, voire d’un expert, avec une étude poussée sur certaines thématiques de la société scandinave. C’est à ce titre par exemple qu’il rédige Voyage dans les lettres suédoises, avec l’objectif de dresser un portrait précis de la littérature suédoise. Son site est d’ailleurs une véritable encyclopédie sur ces cultures. On apprend ainsi l’histoire du Danemark, de la Finlande, de l’Islande, de la Norvège, de la Laponie, et bien entendu de la Suède. Il démonte plusieurs clichés sur les Nordiques, en essayant de donner une image positive de ces peuples, encore méconnus.