Renee Kaddouch est avocat au Barreau de Paris depuis 2003, pratiquant essentiellement en matière de fusions acquisitions, private equity, venture capital, finance et restructurations. Elle a quitté Paris pour Bali en 2012, où elle a vécu 5 ans et a fondé Erka Consulting Pte Ltd, une société d'aide à l'investissement étranger en Asie du Sud-Est, et vient d’ouvrir à Singapour Genesis Avocats Singapore Pte Ltd, le bureau pour l’Asie du Sud-Est du cabinet parisien Genesis Avocats, également présent à Milan et à Bruxelles. Elle évoque avec nous son parcours asiatique, sa passion pour son métier et le début d’une nouvelle aventure entrepreneuriale à Singapour.
Qu’est-ce qui vous a amené en Asie après presque 15 ans de pratique à Paris ?
Renée Kaddouch – Pour des raisons personnelles, j’ai eu envie de changer, de quitter Paris. J’ai découvert Bali au hasard de mes voyages et ça a été un véritable coup de cœur. J’ai rencontré des expatriés et, au fil des discussions, j’ai compris l’isolement de la communauté française à Bali et sa vulnérabilité face aux arnaques fréquentes lors d’investissements immobiliers et achats de terrains notamment. J’ai alors tout quitté en 2012 pour m’installer à Bali, dans l’idée de lancer une société pour assister les expatriés français qui souhaitent investir en Indonésie. Ce fut là le grand départ.
Je m’étais donné une année pour réussir mon projet, mais en fait très vite, j’ai été mise en relation par une connaissance de Paris avec un de ses amis qui lançait sa start-up à Singapour et en Indonésie. Il était en pleine levée de fonds et négociation du contrat d’affaires, et m’a demandé de mener à bien ces négociations. Et c’est là que tout a commencé. Je n’ai finalement pas mis en œuvre l’idée que j’avais en tête, mais je suis revenue à mon cœur de métier, le droit des affaires.
D’un coup de tête à un coup de cœur, vous êtes finalement restée en Asie...
- J’ai réellement découvert l’Indonésie, les gens, et c’est un pays que j’aime. J’ai appris les bases du système juridique indonésien, et surtout comment le pays fonctionne. J’ai aussi beaucoup appris sur la mentalité asiatique, sur la façon de travailler ici.
Bali a été un formidable incubateur, pour développer mon réseau et ma clientèle, mais j’ai malgré tout vite compris que pour les affaires, cela se passe à Singapour, vraie capitale économique de la région et plateforme pour tous les investissements dans la zone. J’ai donc travaillé depuis Bali et je me suis toujours dit que je m'établirais un jour à Singapour.
En quoi consiste votre de métier, corporate lawyer ?
- Il s’agit d’aider des personnes physiques, des entrepreneurs, ou des entités étrangères, c’est-à-dire des entreprises françaises ou européennes essentiellement, à s’implanter et à se développer en Asie du Sud-Est. De par mon expérience, j’interviens principalement à Singapour et en Indonésie, mais pas seulement. J’ai traité certains dossiers aux Philippines et au Cambodge, en liaison avec des partenaires locaux dans chaque juridiction bien entendu.
Concrètement, j’assiste mes clients dans toutes les étapes de l’implantation et du développement de leur société, et notamment pour les levées de fonds, les négociations d’acquisition ou de cession, les négociations des contrats de joint-venture, des contrats d’affaires, ou encore des contrats avec les employés, etc.
Mes clients sont aussi bien des entrepreneurs individuels que des grandes entreprises. L’Agence Française de développement (AFD) fait notamment partie de mes clients depuis 2007 pour des projets en Chine et en Afrique, et en Indonésie depuis quelques années.
Vous venez de fonder le bureau de Genesis Avocats à Singapour. Une nouvelle étape dans votre parcours d’entrepreneur ?
- J’ai été mise en relation en 2015 avec le cabinet parisien Genesis Avocats, qui cherchait à se développer en Asie. Nous avons commencé progressivement à collaborer, d’abord sur quelques dossiers, avant de prendre la décision d’ouvrir à Singapour le bureau local pour l’Asie du Sud-Est.
C’est ce qui a déclenché mon installation ici cette année. J’ai co-fondé Genesis Avocats Singapore Pte Ltd, dont je suis coactionnaire et directrice. J’ai obtenu en Juillet la licence en vue de l’ouverture d’une Foreign Law Practice, qui me permet de monter un cabinet d’avocats étrangers à Singapour et donc indirectement d’exercer sur place en tant qu’avocat inscrit à un barreau étranger.
Je poursuis mon aventure entrepreneuriale, et Genesis Avocats m’apporte notamment un support, une notoriété indéniable et un réseau d’envergure de clients et de partenaires avocats, de par leurs bureaux à travers le monde.
Que retenez vous de cette expérience indonésienne dans votre métier ?
- C’est un pays extrêmement complexe, rien n’est jamais simple et les règles changent tout le temps. C’est un peu le négatif, au sens photographique du terme, de Singapour. Mon expérience indonésienne m’a conféré un savoir-faire et une connaissance rare et précieuse dans mon métier. Je connais le mode de fonctionnement du pays et ses rouages, ... et bon nombres d’arnaques à éviter ! Et je m’appuie sur un réseau de partenaires locaux que j’ai développé, notamment un cabinet d’avocats d’envergure internationale, et en qui j’ai confiance.
A Singapour, il y a bien sûr des avocats locaux qui connaissent l’Indonésie, mais qui parlent aussi français, beaucoup moins à ma connaissance. Or, il me semble que les gens aiment travailler avec quelqu’un qui parle leur langue, en particulier pour des termes techniques ou juridiques. Cela supprime un niveau d’incompréhension, même si on parle très bien l’anglais.