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Quel marché pour les énergies renouvelables en Asie du Sud-Est ?

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Écrit par Cécile Brosolo
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 12 mars 2018

Quel marché pour les énergies renouvelables en Asie du Sud-Est ? Comment développer et financer des projets d’envergure en énergies renouvelables ? Quelles sont les principales difficultés pour s’implanter et financer ses projets ? Autant de questions auxquelles les spécialistes du secteur ont apporté des éléments de réponse lors de la conférence organisée par la FCCS (French Chamber Singapore) la semaine dernière.

 

L'ASEAN est une des régions du monde les plus dynamiques et en plus forte croissance économique. Pour alimenter cette croissance, la demande en énergie primaire devrait croître d'une moyenne de 4,7% par an pour atteindre 1685 Mtep[1] en 2035, selon l’ASEAN Centre for Energy (ACE).

L’énergie fossile y est aujourd’hui la principale source d’énergie, dont le pétrole reste le principal combustible, puis le gaz naturel et le charbon. L’utilisation de sources d’énergie renouvelable est en augmentation, en particulier la biomasse, la géothermie et l'hydroélectricité. Les énergies éolienne, solaire et marémotrice ont également un énorme potentiel dans la région.

En 2014, l’ASEAN a adopté le plan d’action « APAEC 2016-2025[2] » pour améliorer l’inter connectivité énergétique et l’intégration du marché de l’énergie dans la région. En 2015, l’objectif ambitieux de 23% d’énergies renouvelables dans le mix énergétique en 2015 a été adopté par l’ASEAN, soit une augmentation de 10% par rapport à l’état existant en 2015.

Financementenergies renouvelables
(c) ASEAN Centre for Energy

Le financement du développement des énergies renouvelables en ASE

L'agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA) et l’ASEAN Centre for Energy (ACE) estiment que la région devra investir en moyenne 1% de son PIB par an (27 milliards de dollars EU) dans les énergies renouvelables pour atteindre l'objectif de 23% d'énergies renouvelables.

Mais pour Allard Nooy, CEO de INFRACO ASIA, société de développement et d'investissement qui vise à stimuler les investissements du secteur privé dans les infrastructures des économies émergentes d'Asie du Sud et du Sud-Est, « les investissements du secteur privé sont à la traîne avec seulement 32 % des investissements actuels en infrastructures, ce qui reflète clairement les préoccupations des investisseurs privés quant aux risques liés aux investissements en infrastructures à forte intensité de capital (y compris le secteur des énergies renouvelables). Le problème ne vient pas du manque de projets, mais du manque de projets finançables, c’est-à-dire à même d’attirer des investisseurs privés et des banques internationales. Le spécialiste Marsh & McLennan Companies estime qu'entre 55 % et 65 % des projets en Asie ne sont pas finançables sans le soutien des banques de développement gouvernementales ou multilatérales ».

Samantha Campbell, partner chez Hogan Lovells Lee & Lee in Singapore, confirme : « certains pays prennent l'initiative de formuler des objectifs en matière d'énergies renouvelables à atteindre et une base pour le tarif de rachat, mais l’élaboration d'accords internationaux types d'achat d'électricité et de cadre réglementaire est plus lente. L’absence de cadre légal stable et de visibilité sur les tarifs freine les investisseurs. Aujourd’hui, le risque et les coûts sont supportés par le producteur ».

Les trois principales difficultés qui freinent les investisseurs privés sont :

  • les processus d'autorisation complexes faisant intervenir de multiples intervenants et des procédures administratives laborieuses qui entraînent souvent des retards et des coûts supplémentaires pour les entreprises.
  • Un cadre réglementaire faible, voire l’absence de cadre réglementaire fiable et stable. Le manque de transparence dans le processus d'approvisionnement et d'approbation dissuade les investisseurs. Le système juridique, y compris les mécanismes de règlement des différends et des réclamations, est souvent sous-développé pour protéger les droits des investisseurs.
  • Des politiques protectionnistes. La restriction de la propriété étrangère complique souvent les décisions de structuration et d'investissement, ce qui entrave les investissements étrangers directs. Aussi, souvent, les monnaies locales en Asie émergente ne sont pas librement convertibles et la restriction dans la conversion ou la remise des rendements décourage les investisseurs étrangers.

L’Asian Development Bank (ADB) estime néanmoins que le secteur privé devra augmenter ses dépenses d'infrastructure en Asie émergente de 63 G$US actuellement à 250 G$US par an pour maintenir son élan de croissance, éradiquer la pauvreté et répondre aux changements climatiques.

Developing and Financing Renewable Energy Projects in SEA

 

Différents pays, différents marchés, différents potentiels

En 2016, la consommation d'énergie de l'ASEAN s'élevait à environ 630 Mtep. L'Indonésie, Thaïlande, Malaisie, Philippines et Vietnam sont les plus gros consommateurs d’énergie (plus de 90%). De nombreux pays membres ont formulé ces dernières années leurs politiques énergétiques respectives et leurs feuilles de route pour atteindre cet objectif collectif ambitieux. Par exemple :

L’Indonésie s’est fixé un objectif de puissance installée d’ici à 2025 de 12.6 GW en géothermique, 2 GW en hydraulique, 157MW en solaire et100 MW en éolien. Ce qui représentera 26% d’énergies renouvelables. Mais le manque de régulation et l’imprévisibilité de l’évolution de la loi en Indonésie est malheureusement un grand frein à l’heure actuelle pour le financement international de projets d’envergure dans ce pays.

Le Vietnam mise sur le géothermique et l’éolien avec des objectifs respectifs à 19.2 GW et 1 GW d’ici 2020, soit  5% d’énergies renouvelables. Le pays a mis en place récemment un cadre réglementaire prometteur, mais des difficultés persistent pour lever des fonds internationaux, et notamment la structure des PPA (Power purchase agreement - Accord d'achat d'électricité qui fixe le tarif, la durée, les guaranties et autres conditions) qui font porter les couts et les risques par le producteur, sans garantie de tarif à long terme.

Les Philippines sont avancés dans le développement des énergies renouvelables, et ont fixé un objectif de 40% d’ER en puissance installée d’ici à 2020. Cette réussite est en partie liée à une volonté politique forte et la mise en place d’un cadre réglementaire robuste dès 2008.

Pour Hugo Virag, Directeur Asie de ASTRIS FINANCE, société de conseil en financement de projets, fusions et acquisitions, dans les secteurs énergétiques et  infrastructures, les pays de l’ASEAN peuvent être classés en 3 grands groupes de « bancabilité » : les pays avec un marché des énergies renouvelables développé (Thaïlande, les Philippine, Malaisie), ceux avec un marché en développement, avec des profils de « bancabilité » différents (Vietnam et Indonésie), et enfin les pays avec un marché des énergies renouvelables « opportuniste » (Myanmar, le Laos, Cambodge).

 

Developing and Financing Renewable Energy Projects in SEA

 

Le potentiel de l’éolien et du solaire dans la région

Selon Samantha Campbell, « l'énergie solaire et éolienne a un très fort potentiel dans la région. Elle devient moins chère au fil du temps et constitue une part viable mais encore balbutiante du mix énergétique sur les marchés émergents de l'ASEAN. Le marché actuel de l'énergie éolienne et solaire est dominé par des sponsors locaux, mais les investisseurs internationaux manifestent un vif intérêt ».

Au Vietnam, une cinquantaine de projets éoliens ont été enregistrés pour des investissements d'une capacité de 1 à 200 MW. La taille des projets varie entre 10 MW et 3000 MW pour certains investisseurs locaux. Vietnam electricity (EVN) investirait dans une vingtaine de projets solaires d'une puissance installée totale de 2 000 MW.

En Indonésie, d'ici 2026, le développement de l’éolien devrait atteindre 465 MW et celui du solaire 87 MW. Le Gouvernement a mis en place un programme « 1000 Islands Solar Power Plant Program » pour la construction de centrales solaires dans les îles/zones isolées où l'accès au transport est limité.

The Blue Circle, société de développement, financement, construction et exploitation de projets éoliens à grande échelle en Asie du Sud-Est, est devenue en 5 ans le leader de l’éolien dans la région, avec un total de 2034 MW en développement. Pour Olivier Duguet, CEO de The Blue Circle, le potentiel pour l’éolien dans la région se situe principalement en Thaïlande, au Vietnam, aux Philippines et dans une moindre mesure au Cambodge. Le marché en Indonésie ne semble pas prometteur en raison de l’absence de vent dans les zones les plus habitées.

Selon Olivier Duguet, les principaux défis pour le développement des projets d'énergies renouvelables en SEA et les principaux obstacles à une meilleure pénétration sont « les stop & Go dans les politiques gouvernementales et l'absence d'accès direct au PPA, le manque de régulations locales et d'expérience en matière de développement, et l'intermittence des énergies renouvelables et les coûts. L’énergie renouvelable n'en est qu'à ses débuts en SEA, les premiers acteurs doivent donner des exemples à suivre et éduquer les populations ».

Selon Nicolas Renon, Chief Operating Officier de LYS Energy, producteur d’énergie solaire indépendant, spécialisé dans l’installation de panneaux solaire sur les toits de bâtiments, « la demande en énergie solaire dans la région est croissante, poussée par une sensibilisation accrue à l'environnement, par une appétence pour l'autoconsommation, une poussée des collectivités locales et une volonté de se couvrir contre la volatilité de l'énergie conventionnelle ».

Pour Nicolas Renon, « les principaux challenges techniques sont de trouver des partenaires, fournisseurs et sous-traitants locaux compétents et fiables, de maîtriser les coûts tout en assurant des rendements de qualité à long-terme. La solution réside, à mon sens, dans des réseaux hybrides interconnectés, comportant du solaire mais également d’autres énergies renouvelables, et des solutions de stockage ».

 

 

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Developing and Financing Renewable Energy Projects in SEA, FCCS Breakfast Talk. 08 Mar 2018

Opportunities and challenges in the development and financing of renewable energy projects in “Indo-Vietnam” and satellite South-east Asia market”

Breakfast Talk. 08 Mar 2018 FCCS

   

Speakers :

Allard Nooy, Chief Executive Officer, INFRACO ASIA

Olivier Duguet, Chief Executive Officer of THE BLUE CIRCLE

Samantha Campbell, Partner HOGAN LOVELLS LEE & LEE Singapore

Nicolas Renon, Chief Operating Officer, LYS ENERGY

Hugo Virag, Director ASTRIS FINANCE

Modérateur:

Philippe Wind, Director Energy, ACTIS CAPITAL PARTNERS

 

 

 

 

 

 

[1] tep : tonne équivalent pétrole, (ou toe en anglais : tonne of oil equivalent)

Elle vaut, par définition, 41,868 GJ (10 Gcal), ce qui correspond au pouvoir calorifique d'une tonne de pétrole. Elle sert aux économistes de l'énergie pour comparer entre elles des formes d'énergie différentes. Les équivalences sont calculées en fonction du contenu énergétique ; ce sont des moyennes choisies par convention.

 

[2] APAEC : ASEAN Plan of Action for Energy Cooperation

http://www.aseanenergy.org/wp-content/uploads/2015/12/HighRes-APAEC-online-version-final.pdf

 

 

 

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