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La Chine réinvente le mariage : des nightclubs aux réformes nationales

Face à la chute historique des mariages et au vieillissement rapide de sa population, la Chine mise sur une double stratégie : simplifier les démarches administratives et moderniser l’image du mariage. Des réformes inédites permettent désormais aux couples de se marier partout dans le pays, tandis que des lieux inattendus comme les nightclubs deviennent de véritables temples du « oui » urbain et festif.

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Écrit par Nils Van Caeneghem
Publié le 29 novembre 2025, mis à jour le 25 décembre 2025

En Chine, le mariage est devenu un enjeu national. Avec seulement 6,1 millions d’unions enregistrées en 2024, contre 7,68 millions l’année précédente, le pays connaît son plus bas niveau depuis trois décennies. Face à une jeunesse hésitante et à une natalité en chute libre, Pékin a décidé de reprendre la main.

Des règles d’enregistrement largement assouplies

Depuis mai 2025, les autorités ont profondément simplifié la procédure d’enregistrement des mariages. Une simple carte d’identité et une déclaration sur l’honneur suffisent désormais, sans avoir à fournir une longue liste de justificatifs ou de certificats intermédiaires. Les couples peuvent aussi se marier partout en Chine, sans devoir retourner dans leur ville d’origine, ce qui est essentiel pour une génération très mobile, souvent installée loin de son hukou.

Ces réformes réduisent considérablement le caractère administratif et parfois dissuasif de la démarche. L’objectif est double : lever les barrières pratiques, rendez‑vous compliqués, documents difficiles à rassembler, et envoyer un signal politique fort en montrant que l’État souhaite accompagner, plutôt que contraindre, les projets de vie des jeunes adultes.

Des services publics au plus près des couples

Au‑delà des textes, les gouvernements locaux expérimentent de nouvelles façons d’amener le mariage au plus près du quotidien. Certains bureaux des affaires civiles ont étendu leurs horaires d’ouverture, y compris en soirée ou le week‑end, pour s’adapter aux contraintes des actifs. D’autres ont mis en place des services en ligne plus fluides, permettant de prendre rendez‑vous, de préremplir les formulaires ou de suivre son dossier depuis une application.

Dans plusieurs grandes villes, des guichets temporaires sont installés dans des lieux de passage très fréquentés, centres commerciaux, parcs, zones de loisirs, pour faciliter l’accès aux démarches. L’idée est claire : faire en sorte que le mariage ne soit plus associé à une demi‑journée passée dans un bureau impersonnel, mais à une expérience facile, intégrée à la vie urbaine.

Redonner une image positive au mariage

Les autorités cherchent aussi à travailler l’imaginaire autour du mariage, longtemps perçu par une partie de la jeunesse comme une obligation sociale, coûteuse et source de pression. Des campagnes de communication mettent davantage l’accent sur la dimension affective, le soutien mutuel et la construction d’un projet commun, plutôt que sur la seule injonction au mariage et à la parentalité.

Dans certaines provinces, des programmes de “services aux jeunes couples” se développent : conseils juridiques et psychologiques, accompagnement à la parentalité, ateliers sur l’équilibre entre vie professionnelle et vie familiale. L’objectif est de montrer que l’institution peut évoluer avec les aspirations contemporaines, en particulier celles des femmes, plus diplômées et plus exigeantes sur la qualité de la relation.

Un pari démographique, mais pas seulement

Les premières statistiques montrent un rebond du nombre de mariages après l’entrée en vigueur des nouvelles règles, avec une hausse sensible des enregistrements au second semestre 2025. Ce mouvement reste à confirmer dans la durée, mais il suggère que la simplification administrative et la modernisation de l’image du mariage peuvent produire un effet réel sur les comportements.

Pour autant, les obstacles structurels demeurent : coût du logement, cherté de l’éducation, concurrence sur le marché du travail et fatigue sociale d’une génération marquée par des années de pression scolaire. Les réformes ne suffiront pas, à elles seules, à inverser toutes les tendances démographiques, mais elles marquent un changement de posture.

En rendant le mariage plus simple, plus souple et mieux adapté au mode de vie des jeunes urbains, la Chine tente de rapprocher une institution traditionnelle des réalités du XXIᵉ siècle. Le message envoyé est celui‑ci : se marier ne doit plus être un parcours du combattant, mais un choix personnel, assumé et facilité, un premier pas pour espérer, à terme, soutenir la natalité et stabiliser une société en pleine transition.

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