François Chambraud : "L'Alliance Française de Shanghai soutient la francophonie"

L'Alliance Française fonctionne un peu comme une PME culturelle

Depuis quand êtes-vous en Chine, et qu'est-ce qui vous a amené à Shanghai ? 

Depuis 3 ans, et c’est le poste de directeur de l’Alliance Française qui m’a amené à revenir en Chine, que j’avais quittée en 2014 après un séjour de 6 ans.

Pouvez-vous nous raconter votre parcours avant de devenir directeur de l'Alliance Française à Shanghai ? 

Bien sûr. Je suis professeur d’anglais titulaire depuis 1997 mais, passionné de voyages depuis toujours, j’ai passé les concours du CAPES et de l’agrégation avec l’objectif clair de partir en expatriation, ayant attrapé ce virus lors d’un premier séjour à Quito, en Équateur, pour y accomplir mon service militaire en coopération au lycée français. J’y ai aussi découvert l’Alliance Française et suis tombé amoureux de ce système de « PME culturelle à l’étranger » et de ses valeurs associatives, avec un volet entrepreneurial où l’offre de cours permet de financer le volet culturel et artistique. Depuis, j’ai occupé les fonctions de directeur des Alliances Françaises de Dublin en Irlande, de Pretoria en Afrique du Sud et de Pékin. Je suis rentré à Nice comme professeur de classes préparatoires aux grandes écoles pendant 7 ans et me suis engagé auprès de l’Alliance Française de Nice en tant que président, avant de revenir vers la Chine et Shanghai, cette fois.

Il y a 830 Alliances Françaises dans 130 pays

Quelles sont les principales missions de l'Alliance Française à Shanghai ?

L’Alliance Française de Shanghai, comme les près de 830 Alliances réparties dans 130 pays, a pour mission de diffuser la langue française et les cultures francophones à l’étranger. Celle de Shanghai reste une des plus importantes au monde, malgré une baisse relative de ses chiffres pendant la pandémie. Elle doit comme toutes les autres réaliser un cercle vertueux, grâce auquel ses budgets provenant des inscriptions aux cours permettent de financer son offre culturelle qui, de 2020 à 2023, a beaucoup souffert de l’impossibilité d’inviter des artistes francophones en Chine.

Nous proposons des ateliers sur la gastronomie et l’œnologie

Quelles sont les activités et les cours proposés par l'Alliance Française à Shanghai ? 

Principalement des cours de « Français Langue Étrangère » de niveaux A1 à C1, destinés à permettre à nos étudiants de réaliser divers projets ; soit préparer leurs études en France, soit apprendre le français pour des raisons professionnelles ou personnelles. Nous proposons aussi des ateliers thématiques portant sur notre culture, notamment la gastronomie et l’œnologie, des « Coins Français » pour la conversation, ainsi qu’un volet d’activités culturelles telles que des conférences, des concerts, des cafés littéraires, des projections de films, etc.

Comment percevez-vous l'intérêt des Chinois pour la langue et la culture française ? 

Il est réel et ne se dément pas, en dépit d’un trou d’air récent lié à la situation sanitaire. La France, la langue et la culture françaises conservent une cote d’amour élevée. En dépit des clichés sur notre « romantisme », l’attrait pour la richesse de notre culture et de notre mode de vie est réel. J’en veux pour preuve nos chiffres élevés de fréquentation, pour nos cours comme nos activités culturelles.
Y a-t-il des événements culturels ou des partenariats spécifiques que l'Alliance Française de Shanghai organise ou soutient régulièrement ? Notre partenariat le plus important, car le plus naturel, est celui qui nous lie au réseau culturel français, donc l’Ambassade de France et, ici, le Consulat général de France. Nous en sommes partie intégrante et travaillons ensemble tout au long de l’année, pour la promotion du Festival Croisements et le mois de la Francophonie notamment. L’Alliance de Shanghai conserve d’autres partenariats avec nombre d’organismes culturels locaux.

Le français est perçu comme un avantage comparatif

Quels sont les principaux défis que vous rencontrez dans la promotion de la langue française en Chine ?

Les défis sont nombreux mais stables. La prévalence de l’anglais est évidente, notamment avec le développement des cursus d’études en anglais en France, avec des conséquences négatives évidentes sur le désir d’apprendre le français avant le départ. Mais le français est encore largement perçu comme un avantage comparatif, comme une compétence supplémentaire à faire valoir sur un CV, avec l’accès aux marchés de tous les pays francophones, en Afrique notamment. Et, toujours, ce petit plus de distinction personnelle grâce à l’excellente réputation de notre attachement à la culture et à l’art.

Comment l'Alliance Française s'adapte-t-elle aux évolutions technologiques et aux nouvelles méthodes d'apprentissage ?

Avec la pandémie, tout le réseau des Alliances a dû se mettre aux cours en visio. C’est aujourd’hui une offre attendue et choisie par 30 % de nos apprenants, pour des raisons pratiques évidentes au vu de l’immense taille de la ville. Mais cela n’a pas eu un effet immédiat sur nos méthodes d’apprentissage qui restent basées sur l’approche communicative, visant toujours plus d’oral et d’expression afin de ne pas se faire bloquer par la peur de l’erreur ou la prévalence de la grammaire. Notre système privilégie l’apprentissage en petits groupes avec l’utilisation d'outils pédagogiques modernes (tableaux interactifs tactiles, supports audio et vidéo, recours à tous les supports authentiques pour la compréhension, activités ludiques pour les jeunes publics, etc.). Nous n’avons pas fait le choix du recours à l’intelligence artificielle à ce stade, préférant une approche plus humaine.

Comment voyez-vous l'avenir de l'Alliance Française en Chine, et quels sont vos objectifs pour les prochaines années ?

Notre avenir en Chine restera très dépendant de la situation économique du pays. Je reste persuadé qu’un autre chemin de croissance existe pour l’enseignement du français en Chine ; nos objectifs sont ainsi tournés vers les jeunes publics, qui sont toujours la priorité des parents chinois. Nos relations bilatérales sont excellentes et l’intérêt pour notre langue comme pour nos cultures francophones reste très élevé, ce qui nous garantit un attrait marqué.