

Par Pascale Brites
Lors d'une balade dans la Concession Française cet été, sans doute vous êtes vous retrouvé bercé par un air d'accordéon, des accords de guitare et la voix d'Hélène chantant du Edith Piaf. Ce groupe qui s'est produit tous les week-end en terrasse des Cotton's Bar, c'est Rendezvous. Et c'est aussi l'histoire d'une belle amitié entre Hélène, Marc et Shengji, deux Français et une Chinoise de Shanghai.
Shengji, à l'accordéon, et Marc, à la guitare, se sont rencontrés dans un groupe de musique tzigane.
Tout a commencé en 2012, quand Marc de Viviés, un guitariste français installé à Shanghai depuis dix ans rencontre Zhuo Shengji, une accordéoniste chinoise. Tous deux jouent dans un groupe dont les influences sont fortement marquées par les rythmes de la musique tzigane. Shengji est Shanghaienne, mais c'est aussi une artiste internationale qui a parcouru le monde pour passer des concours en Australie, en France ou au Japon. "Shengji avait un excellent niveau technique", nous précise Marc. "En musique, la nationalité n'a pas d'importance, ce sont les affinités avec des styles qui comptent.". Alors quand ils rencontrent Hélène Meunier, une chanteuse en quête d'un accordéoniste pour l'accompagner sur un répertoire de chansons françaises, ils se soucient peu du parcours et de la nationalité de chacun. "Ce qui était important, nous précise Hélène, c'était surtout de partager les mêmes goûts musicaux, d'avoir le même feeling et d'être disponibles pour s'investir dans un même projet.".

Un groupe marqué par la culture française
Si la nationalité de chacun ne joue pas vraiment sur l'amitié qui s'installe alors entre les trois musiciens, le trio porte tout de même fortement les couleurs de la France dans son répertoire. "Quand j'ai commencé à chanter du Piaf, j'ai senti de grandes attentes", nous explique Hélène, avant de préciser que : "Tout ceci est possible à Shanghai parce que la scène musicale y est spéciale, influencée par son essor des années 20". Et si Rendezvous ne se prive pas de reprendre aussi des classiques de la chanson américaine et chinoise, c'est naturellement en français qu'ils ont choisi d'écrire leurs propres morceaux. "J'ai beau vivre à Shanghai depuis treize ans, je reste Française, ça me parle plus et je raconte plus en français." précise Hélène. Ce qui ne minimise absolument pas l'influence de Shengji dans le trio. "Elle apporte beaucoup au groupe en tant que musicienne" insiste Marc avant de renchérir : "Elle est aussi internationale que nous. Elle connaît la musique traditionnelle chinoise mais beaucoup d'autres aussi !". Pour Marc comme pour Hélène, le milieu artistique y est pour beaucoup dans cet exemple d'intégration. Et s'ils concèdent que Shengji fait partie d'une catégorie de Chinois qui s'est intégrée à la communauté étrangère, ils reconnaissent qu'elle est loin d'être un cas isolé. "La musique et les arts en général rapprochent et cassent les barrières" précise Marc.

Une idée pas toujours acceptée
On pourrait penser que la présence d'une Chinoise de Shanghai dans le trio est un atout dans les contacts et les négociations avec les clients. Mais en réalité, c'est parfois la situation inverse qui se présente et oblige Marc et Hélène à imposer leur accordéoniste. "Ce sont souvent les intermédiaires chinois qui posent problème", nous explique Hélène, "ils veulent des étrangers pour que ça fasse plus classe, que ça ressemble à leur idée caricaturale et ils ne veulent pas payer un Chinois autant qu'un étranger !". Mais pas question pour les deux Français de céder. Tous deux savent alors très bien mettre à profits leurs années de commerciaux dans des entreprises internationales. "Quand les gens nous contactent, c'est qu'ils nous veulent !" lance Marc avant d'ajouter "On a le pouvoir de négociation". Il nous est arrivé de refuser des plans, généralement des événements commerciaux" nous explique Hélène pour qui la notion de groupe est primordiale. Car si la musique est le principal lien entre les trois personnages, Marc et Hélène sont catégoriques sur le fait que leur histoire est également celle d'une amitié, dans laquelle chacun est libre d'exprimer sa personnalité. Une philosophie qu'ils appliquent aussi à leur deux nouvelles recrues, puisque du trio d'origine, Rendezvous est aujourd'hui devenu un quintet avec l'arrivée de Gilles de Hovre, un batteur belge, et Mickael Hicks, Américain et violoncelliste. "Dès le départ, nous voulions être quatre ou cinq", nous explique Marc, "mais il fallait d'abord un noyau solide en trio pour que le projet soit intéressant pour d'autres gens". Ce qui ne fait en rien du trio originel, trois leaders dans le quintet. "Maintenant, nous sommes cinq et nous pensons à cinq. Chacun a son mot à dire" insiste Marc, avant qu'Hélène ne précise en rigolant "Chacun apporte ses richesses. Par exemple, Gilles est Belge, il apporte un peu de bizarrerie dans notre groupe !". Preuve que pour Rendezvous, la musique rassemble autant que le sens de l'humour.
Pascale Brites pour lepetitjournal.com/shanghai Lundi 4 janvier 2016







