De l’eau a coulé sous les ponts depuis une étude de juin 2018 qui décrivait les internautes chinois comme des « voyageurs digitaux », prêts à sacrifier leur anonymat et leur vie privée en échange de plus de sécurité et de confort. Un think tank affilié au journal Southern Metropolis Daily révélait début décembre des résultats diamétralement opposés : après avoir interrogé près de 6 200 personnes sur la question de la reconnaissance faciale, environ 74 % des sondés déclaraient qu’ils devraient avoir le droit de choisir entre ce système ou les méthodes d’identification traditionnelles. Plus de 70% d’entre eux s’inquiètaient des fuites de données liées à cette technologie, tandis que 83% aimeraient pouvoir y accéder et avoir la possibilité de les supprimer. 39 % des citoyens chinois préféraient ne pas utiliser la reconnaissance faciale dans leur vie quotidienne. Ces résultats étaient publiés juste après l’entrée en vigueur de l’obligation de scanner son visage pour acheter une nouvelle carte SIM ou souscrire un abonnement téléphonique, et quelque temps après l’annonce de l’introduction de la reconnaissance faciale dans le métro pékinois. Ces mesures suscitèrent un vif débat à l’échelle nationale, dont deux professeurs de droit étaient les figures de proue. Le premier se nomme Guo Bing et enseigne à l’université des Sciences et Technologies du Zhejiang. En octobre dernier, il portait plainte pour violation des droits du consommateur contre un zoo à Hangzhou qui obligeait désormais tous ses visiteurs à s’enregistrer par reconnaissance faciale et non plus par empreintes digitales. C’est la première procédure judiciaire lancée à ce sujet en Chine.
A Pékin, Lao Dongyan, spécialiste en droit pénal à Tsinghua, dressait sur son compte WeChat un véritable réquisitoire contre la reconnaissance faciale, s’enquérant de la légitimité de la collecte de ces données personnelles, de l’utilisation qui en sera faite (par l’Etat ou des entreprises privées), et s’inquiétant de leur potentiel piratage. « Si les autorités font mauvais usage de nos données, nous pourrions aussi bien perdre notre richesse, notre réputation, notre travail, nos libertés, et même notre vie », alertait-elle. Elle dénonçait également le manque de consultation de la population, l’absence de consentement, et l’impossibilité de refuser ce système (même si l’on n’a rien à se reprocher). Elle pointait du doigt l’optimisme aveugle de la population : « si notre société n’est pas encore complètement tombée dans la paranoïa, il est encore temps de dire stop. La quête hystérique de sécurité va amener notre société à plus en avoir du tout ». Face à ce tollé, un groupe de 27 firmes chinoises, mené par le leader de l’intelligence artificielle SenseTime, se réunissaient fin novembre pour ébaucher des normes portant sur l’encadrement de la reconnaissance faciale. A ce jour, aucune loi n’existe pour protéger les données personnelles.
Autre sondage instructif dans un autre domaine, l’Académie chinoise des Sciences Sociales (CASS) révélait fin décembre que les maris sont généralement plus heureux que leurs épouses. Un résultat qui trouvait un fort écho sur les réseaux sociaux, l’annonce ayant été lue plus de 380 millions de fois. Un commentaire en particulier recevait l’approbation de plus de 70 000 internautes : « c’est logique, la plupart des épouses vivent comme des veuves ». L’auteur faisait allusion au déséquilibre de la répartition des tâches ménagères dans les foyers. Selon le Bureau des statistiques, les épouses y passent en moyenne deux heures de plus chaque jour par rapport à leurs maris. C’est aussi quatre fois plus que les jeunes couples.
Le lieu de vie impacte également l’épanouissement des couples. La CASS dévoilait que ceux vivant dans les villes de premiers tiers (Pékin, Shanghai, Canton, Shenzhen) sont souvent moins heureux que ceux installés dans de plus petites villes, offrant de meilleures conditions de vie, souvent moins polluées et moins chères.
Par contre, l’argent fait apparemment le bonheur. La plupart des concubins établissent un lien de corrélation entre niveau de revenus et satisfaction conjugale. Par contre, les femmes ne sont pleinement heureuses que lorsqu’elles se rapprochent de l’élite sociale, tandis que leurs conjoints se contentent de se hisser vers les catégories sociales supérieures.
Dernière trouvaille, malgré une charge mentale plus élevée, la santé psychologique des Chinoises est meilleure que celle de leurs compatriotes masculins – ces derniers étant davantage en proie au stress, à l’anxiété, voire à la dépression. Cependant, les jeunes, particulièrement ceux nés après 1990, sont moins touchés par le phénomène que leurs aînés. Mais si cette génération peut se permettre de privilégier l’épanouissement au travail (et en dehors), c’est souvent grâce au labeur acharné de leurs parents !