Pauline Charoki crée, avec son associée Alexandrine Brami, l’Institut d’études françaises et européennes de São Paulo « IFESP » en 2007, dédié à l’apprentissage de la langue française et l’accompagnement de milliers de Brésiliens ayant un projet d’études ou de recherche en France, un défi relevé avec succès. Aujourd’hui, l’Institut n’est plus un simple centre de formation, mais un univers de possibiltés regroupant diverses solutions de formations en ligne. Découvrez le parcours de Pauline dans ce portrait d’expat’.
Lepetitjournal.com : Pauline, comment êtes-vous arrivée au Brésil ? Et pourquoi le Brésil ?
Pauline Charoki: Je suis arrivée au Brésil à 23 ans. C’est un parcours de circonstance. Je n’avais jamais pensé au Brésil. Mon ex-mari avait un projet professionnel au Brésil, quant à moi, j’étais encore étudiante, destinée à la carrière universitaire. C’était le moment ou jamais de tenter l’expérience à l’étranger. Donc, je l’ai suivi en m’organisant pour terminer mon master en droit à distance.
Enseigner le français au Brésil, comment est venue l’idée du projet ?
Après avoir conclu mon cycle universitaire, j’ai compris que je ne pourrais pas exercer le droit au Brésil, car les lois sont différentes et je ne voulais pas être avocate. Le dilemme était le suivant : je reste et me fais ma place au Brésil car je m’y sens bien ici ou je repars et la vie suit son cours. Je me suis rapprochée de la communauté française de São Paulo, où j’ai rencontré Alexandrine Brami, mon associée. Alexandrine, avait initié ce projet en 2002 en partenariat avec « Sciences Po » et cherchait justement un personne pour l’accompagner dans cette aventure.
Comment s’est passé votre installation professionnelle ?
Je suis devenue entrepreneur sans le vouloir, c’est une opportunité qui m’a été offerte, j’ai plongé sans jamais revenir à la surface ! J’ai trouvé ma voie grâce aux Brésiliens qui me donnent la sensation de participer au changement. Je véhicule une langue, une culture, de nouveaux horizons et le retour est chaleureux et reconnaissant. Je suis certaine que je n’aurais pas eu le même succès professionnel en France. Bien sûr, tous les débuts sont difficiles, le Brésil est un pays de « NETWORKING » où votre réseau compte plus que votre qualification, donc il a fallu se créer un bon réseau de professionnels et surtout de mentors quand on est entrepreneur novice. Un avantage du Brésil est que le contact et l’entraide sont naturels.
Est-ce que c’est plus difficile de faire sa place quand on est femme et étrangère ?
Ma mission est de démocratiser l’accès à la langue française et orienter les Brésiliens dans leur projet. Donc, avec mes clients, aucun problème. Le monde des affaires et de l’innovation est cependant très masculin mais, là encore, cela n’a jamais été une barrière.
Au contraire, être étrangère dans mon cas a été un atout, je ‘’vends la France ‘’ et les Brésiliens sont admiratifs de cette culture et langue !
Enfin, la ville est cosmopolite et axée sur le travail alors pas vraiment de place à la différence culturelle ! En revanche, c’est différent à Rio qui est une ville touristique.
L’IFESP a 12 ans ; comment votre entreprise a traversé les différentes périodes économiques du pays ?
En 12 ans, nous avons eu un échec en voulant se lancer sur le marché des écoles d’anglais. Cela n’a pas fonctionné tout simplement car nous n’étions pas crédibles dans ce rôle. Et concernant les périodes de crise, pour nous, elles représentent des moments propices à notre développement. Quand il y a de l’emploi, les Brésiliens travaillent, quand la crise s’installe, les Brésiliens investissent en eux en se formant.
Vos collaborateurs sont-ils français ou brésiliens ?
Nous travaillons avec une équipe mixte. Les Brésiliens et Français se complètent dans leur manière de communiquer et travailler. Une bonne intégration de management culturelle est neanmoins nécessaire !
Qu’est-ce que le Brésil vous a enseigné ?
Aujourd’hui, ma maison c’est le Brésil, je me sens différente des Français, un peu spectatrice. D’ailleurs, je profite de la France comme une touriste. Mon expérience au Brésil m’a appris à rêver grand, être un leader, suivre et défendre une cause et voir en l’échec ou situation critique une opportunité.
Une anecdote, un message à partager avec nos lecteurs ?
Quand on s’expatrie, on reste toujours un étranger, on est perçu comme différent . Alors, je pense qu’il faut essayer de donner un sens à cela, en tentant de faire de cette différence, un projet de partage, d’échange. Ouverture, humilité, résilience, empatie et reseau sont les clés du succès.
Quels sont vos projets pour l’avenir ?
Je me suis tellement dédiée à ma vie professionnelle, que je ressens le besoin de faire une pause pour mieux me connaître, faire un bilan de cette belle aventure, apprendre à nouveau et être une mère ‘’hors du commun’’. Benjamin a 2 ans !