Édition internationale

Emmanuel Macron en Chine : diplomatie, symboles et réalisme économique

Du 3 au 5 décembre 2025, Emmanuel Macron s’est rendu en Chine pour sa quatrième visite d’État depuis le début de son mandat. Ce déplacement intervenait deux ans et demi après sa précédente visite à Pékin en avril 2023 et un an après la venue du président chinois Xi Jinping en France en mai 2024. Retour sur les résultats et suites de ce déplacements.

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Écrit par Maud Cestac
Publié le 9 décembre 2025, mis à jour le 10 décembre 2025

Un voyage stratégique pour la France 

Ce voyage s’inscrit dans un contexte international marqué par la rivalité entre la Chine et les États-Unis, la guerre en Ukraine, ainsi que les discussions entre l’Union européenne et la Chine sur le commerce et la technologie. Un premier objectif de ce voyage était de poursuivre un dialogue politique régulier, de renforcer la coopération culturelle, scientifique et éducative, ainsi que de discuter de sujets économiques et internationaux stratégiques.

En effet, les tensions commerciales entre la Chine et l'Europe, d'exportations chinoises à bas coût, notamment dans le secteur de l'acier, après avoir été évincées du marché américain, constituent un préalable aux échanges. L'Europe s'inquiète aussi de la supériorité technologique croissante de la Chine dans le secteur des véhicules électriques (VE) et de sa domination dans le traitement des terres rares. Mais surtout la France affiche un déficit commercial considérable vis-à-vis de la Chine de 47 milliards d’euros en 2024, soit 46 % du déficit commercial total français.

 

Rencontre à Pékin

À Pékin, Emmanuel Macron a été reçu au Grand Palais du Peuple pour un entretien bilatéral avec Xi Jinping. Les discussions ont porté sur les relations économiques, commerciales et industrielles, avec un accent sur l’accès aux marchés et la coopération technologique. Les deux présidents ont également abordé la coopération scientifique, éducative et culturelle, en mettant en avant les échanges universitaires, les partenariats de recherche et les initiatives culturelles. La question du climat et de la transition écologique a été évoquée, avec un accord sur la poursuite de projets communs dans les domaines de l’énergie propre, de la biodiversité et de la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Ils ont enfin discuté de questions internationales, notamment la situation en Ukraine, les tensions régionales en Asie et la gouvernance mondiale en tant que membres du Conseil de sécurité de l’ONU, afin de renforcer la coordination des deux pays sur des dossiers sensibles. Dans le cadre de cette rencontre, Pékin a annoncé le retour d’un couple de pandas géants en France, un geste symbolique de la « diplomatie du panda », illustrant la volonté de renforcer la coopération bilatérale.

 

12 accords signés 

Cette rencontre a été suivie d’une déclaration conjointe sur les enjeux des thématiques abordées. La France a rappelé son objectif de rééquilibrer les échanges et de faciliter l’accès de ses entreprises au marché chinois, tandis que Pékin a souligné son intérêt pour développer des partenariats industriels et des investissements croisés.

Ainsi, douze accords bilatéraux ont été signés dans des domaines tels que l’énergie nucléaire civile, l’intelligence artificielle, la recherche scientifique, l’innovation, la transition écologique et la coopération culturelle et académique.Le président français a souligné la portée de ces accords et insisté sur l’importance d’augmenter les investissements chinois en France et en Europe, tout en invitant les entreprises chinoises à contribuer avec leurs technologies dans des secteurs stratégiques comme les batteries, les véhicules électriques ou l’énergie solaire.

Xi Jinping, a, quant à lui, qualifié la France de partenaire économique et commercial clé, en appelant à un respect mutuel des intérêts essentiels de chaque pays. La coopération dans le domaine nucléaire, ainsi que dans d’autres secteurs d’envergure mondiale, témoigne de l’évolution des relations économiques et commerciales entre Pékin et Paris. Si ce voyage a permis de maintenir un contact politique de haut niveau, de conclure plusieurs accords sectoriels et de réaffirmer des priorités communes dans les différents domaines abordés, les discussions économiques sur le rééquilibrage commercial et l’accès au marché n'ont donné aucun résultat concret lors de la visite.

 

Un “ultimatum” formulé à Paris, scruté à Pékin

Étonnamment, c'est à son retour à Paris, dans les colonnes de Les Échos, qu'Emmanuel Macron a haussé le ton, prévenant que l’Union européenne pourrait être contrainte d’adopter des “mesures fortes” si Pékin ne réduisait pas ses excédents commerciaux. Parmi ces mesures, Macron cite explicitement l’imposition de tarifs douaniers sur les produits chinois, en s’inspirant de la stratégie protectionniste des États-Unis, ainsi qu’une possible “dé-coopération” sur certains dossiers sensibles.

À Pékin, cette nouvelle mise en garde publique a été interprétée comme un changement de registre calculé, destiné à exercer une pression collective après des avertissements privés. Les autorités chinoises ont réagi avec prudence, réaffirmant leur volonté d’importer davantage de produits français tout en appelant à éviter tout réflexe de découplage. Dans les cercles d’analyse, la menace européenne est perçue comme un signal que Bruxelles pourrait désormais recourir à des outils offensifs si aucun geste concret n’est fait. Un message que Pékin prend au sérieux, même s’il n’en laisse rien paraître, conscient qu’une Europe unie sur le plan commercial pourrait rebattre les cartes d’une relation devenue plus exigeante — et plus transparente dans ses rapports de force.

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