Symbole ultime du luxe vertical, les gratte-ciel de la “Billionaires’ Row” à Manhattan fascinent autant qu’ils inquiètent. Érigées à coups de milliards de dollars, certaines de ces tours ultrafines et vertigineuses montrent de sérieuses failles : défauts de construction, nuisances, voire risques structurels. Entre prouesse architecturale et pari risqué, ces monuments posent une question simple mais essentielle : sont-ils vraiment sûrs ?


La skyline de Manhattan ne cesse de s’enrichir de nouvelles tours, parmi les plus hautes des États-Unis, particulièrement le long de South Central Park.
Ces nouvelles constructions dépassent toutes les 400 mètres de hauteur, à l’instar de Central Park Tower (472 mètres), de la Steinway Tower (435 mètres), la Summit One Vanderbilt (427 mètres), 432 Park Avenue (425 mètres), même si aucune tour n’est autorisée à surpasser la hauteur du One World Trade Center (541 mètres), construite à la suite des attentats du 11 septembre 2001, et dont la hauteur de 1776 pieds correspond à l’année de la Déclaration d’Indépendance des États-Unis.
La 57ème rue au sud de Central Park, qui accueille la majorité des ces nouvelles tours résidentielles de luxe, lui vaut désormais le surnom de “Billionaires’ Row”, car la plupart des appartements se sont vendus à des prix s’échelonnant d’une dizaine de millions de dollars à plus de 100 millions de dollars, en fonction de la hauteur et de la surface.
Steinway Tower, la plus emblématique des tours de “Billionaires’ Row”
Située 111 West 57th Street, la Steinway Tower doit son nom au fait qu’elle a été érigée sur l’emplacement d’un ancien magasin Steinway & Sons ouvert en 1925.

Si elle n’est pas la plus haute tour des États-Unis, sa particularité est d’être la tour la plus fine au monde. Située idéalement en plein milieu du sud de Central Park, elle comprend 59 appartements répartis sur 84 étages. Son coût de construction a été de 2 milliards de dollars. Durant sa construction, en octobre 2020, de fortes rafales de vent entrainèrent la chute d’une partie de la grue de construction érigée au sommet de la tour, heureusement sans faire aucune victime.
432 Park Avenue : la tour de toutes les polémiques
Située au coin de Park Avenue et de 57th Street, cette tour de 425 mètres de haut, fut un temps la plus haute tour résidentielle au monde, ce qu’elle n’est plus maintenant.

Elle a aussi été celle vendue la plus chère par appartement, puisqu’il fallait en moyenne débourser plusieurs dizaines de millions de dollars pour en acquérir un, sachant que la construction a coûté 1,25 milliard de dollars. Parmi les célébrités ayant acheté figure Jennifer Lopez.
La tour comprend 147 appartements au total répartis sur 96 étages.dont certains étages ont été laissés volontairement vides et ouverts sur l’extérieur, pour améliorer la résistance au vent.
Actuellement le board de l’immeuble a introduit des recours en justice contre les promoteurs pour environ 1500 défauts constatés de construction ou d’aménagements et d’un préjudice estimé de 250 millions de dollars.
Les plaintes ne portent pas que sur des sujets mineurs puisque certains d’entre eux, outre infiltrations d’eau, dysfonctionnements des ascenseurs, vide-ordures très bruyants, défauts électriques, posent carrément question sur la solidité de la structure, notamment à cause d’inquiétantes fissures apparues sur l’ossature en béton.
Quels sont les principaux risques de ces tours de grande hauteur ?
Les tours de Billionaires’row sont conçues pour résister aux vents forts, souvent présents à Manhattan, été comme hiver, en incorporant des systèmes de balancier à l’intérieur même de leur structure. Par ailleurs elles ont toutes des équipes de maintenance et de surveillance sur place 24h sur 24.
Cependant, un article paru fin 2021 dans le New York Times indiquait que seulement 3 tours sur les 25 plus hautes de Manhattan remplissaient toutes les conditions de sécurité requises par le Department of Buildings de New York City, ce qui est problématique dans la mesure ou une défaillance d’un système, même peu importante, peut entraîner, par effet de cascade, des incidents beaucoup plus sérieux sur d’autres systèmes essentiels à la sécurité de la tour.
Parmi les risques recensés figurent toujours en premier lieu l’incendie, suivis des effets du vent, qui avait atteint la vitesse de 130km/h lors Hurricane Sandy en octobre 2012. On peut aussi citer la collision avec un aéronef, compte tenu de la hauteur de ces tours et la survenue fréquente de temps de brouillard ou de plafonds très bas en hiver, les tremblements de terre, le dernier survenu en avril 2024 d’une magnitude de 4,8, ainsi que les risques de terrorisme, comme New York City en a malheureusement connu le 11 septembre 2001.

Un investissement plutôt qu’un “home sweet home” ?
Force est de constater que le taux d’occupation de ces tours est loin d’être de 100%. La plupart des très riches acquéreurs ont acheté davantage pour réaliser un bon investissement, plutôt que d'en faire leur résidence principale et s’y sentir bien chez eux.
Les mésaventures de la 432 Park Avenue Tower montrent que ce calcul s’avère parfois désastreux, les appartements de ladite tour étant largement devenus invendables aujourd’hui, et que pour le prix de leur acquisition, beaucoup des acheteurs auraient sûrement trouvé avantage à devenir preneur de biens de luxe sur la Côte d’Azur française, à Monaco, en Espagne, ou même dans des hôtels particuliers de Tribeca, SoHo ou de l’Upper East Side, beaucoup plus charmants et rentables.
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