Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--

Cécilia Jourdan “HelloFrench dévoile l’esprit français avec humour et authenticité”

En prenant la vie comme un jeu et avec un certain goût du risque, Cécilia Jourdan, cofondatrice et figure de HelloFrench (@hellofrenchnyc sur les réseaux sociaux) nous raconte son parcours très singulier entre Paris et New York. Déterminée à dévoiler la vie à la française “dans ce qu’elle a de plus authentique”, l’entrepreneure s’adresse aujourd’hui à la plus grande communauté francophile au monde sur Instagram, avec humour et panache.

Cécilia Jourdan, co-fondatrice de Hello FrenchCécilia Jourdan, co-fondatrice de Hello French
Cécilia Jourdan By Jordan Plih
Écrit par Capucine Canonne
Publié le 29 janvier 2024, mis à jour le 14 septembre 2024

Qu’est-ce qui pousse une jeune femme à partir vivre aux Etats-Unis après son baccalauréat en France ? 

Il n’y a pas énormément de raisons pour partir loin de sa famille lorsqu’on est jeune : un coup de tête, une opportunité professionnelle, un coup de foudre. Pour ma part, j’ai décidé de suivre quelqu’un. Mais j’ai le sentiment d’avoir toujours eu envie et besoin de le faire, de part mon background. J’ai eu beaucoup de chance de voyager avec mes parents et mon frère. J’ai aussi toujours été baignée par des récits de voyage. Mes parents souhaitaient nous montrer que ce que nous vivions n’était pas forcément le standard et nous confronter très tôt à l’autre. Je me souviens notamment d’un voyage au Sénégal, qui m’a particulièrement marquée. A mon tour, j’ai eu envie de me confronter à la vie à l’étranger, me construire ailleurs et quitter ma bulle très protectrice en banlieue parisienne. 

 

L'enfance de Cécilia jourdan dans le monde artisitique
Cécilia jourdan, dès le plus jeune âge dans le monde artisitique 

 

A à peine 18 ans, me voilà sur le sol américain, avec mon baccalauréat, mon permis et trois valises. 

Concernant mes études, je ne me sentais pas de tomber dans un schéma traditionnel. J’aime le risque et le challenge. D’ailleurs, je pense qu’un expatrié a la particularité d’être prêt à tout lâcher et se lancer à coeur ouvert dans une expérience, à se prendre des claques et à être confronté à l’inconnu. Bref, j’ai eu envie de tout plaquer pour découvrir qui j’étais vraiment. Je passe le SAT, un examen repère qui permet de réaliser des études aux Etats-Unis. Mes parents me soutiennent. A à peine 18 ans, me voilà sur le sol américain, avec mon baccalauréat, mon permis et trois valises. 

Je suis restée trois ans à Miami, j'y ai appris l’anglais et l'espagnol à l’université. Je ne savais pas encore vraiment ce que je voulais faire. Je dansais, je chantais et je jouais de la musique. Pour vous dire, la Star Academy était mon rêve quand j'étais petite ! Un jour, j’intègre un conservatoire de comédie musicale pendant deux ans. Clairvoyante, je me rends compte que je ne suis pas au niveau et m’oriente vers l’acting. Je pars à New York intégrer un conservatoire de cinéma. En parallèle, je travaille dur, je passe beaucoup de castings et donne des cours de français. 

 

 

Mais d’ailleurs, d’où vient cette appétence pour le langage et l’apprentissage des langues étrangères ? 

J’ai toujours été fascinée par les langues étrangères et leur apprentissage. Une langue est intimement liée à une culture, le langage aussi. Il véhicule plusieurs messages : l’origine, l’humour, la façon d'interagir et les comportements types d’une culture. Le langage impacte notre manière de penser et inversement. Il revêt un caractère d’identité, une mise en abîme de la culture française. 

 

Aujourd’hui, j’ai plutôt un accent continental c'est-à-dire qu’on décèle difficilement que je suis française.

 

De 2010 à 2020, j’ai donné des cours privés de français à une centaine d’élèves. Je me suis créé un réseau, tout en poussant l’aspect conversationnel qui m’enrichissait énormément. Car le but premier dans l’apprentissage d’une langue étrangère est pour moi de communiquer et de se faire comprendre. Les fautes ne sont pas graves, l’important est la communication fluide. 

Petit à petit, je me suis rendue compte que je développais ma propre méthode. En parallèle, je réalise aussi que mon accent français limite les opportunités, notamment lors des castings. Je me lance alors dans un training intense de réduction d’accent pendant deux ans. J’apprends énormément sur les sons et l’alphabet phonétique (IPA), essayant de comprendre comment se produisent les sons en anglais américain. Il y a aussi une histoire de rythme et d’intonation. Par exemple, les Français ont tendance à aller vers le bas en fin de mot ou de phrase. Tandis que l’anglais est plus musical. Tout cela me passionne ! Aujourd’hui, j’ai plutôt un accent "continental" c'est-à-dire qu’on décèle difficilement que je suis française. Je me sens plus à l’aise en anglais. Je réfléchis et rève d’ailleurs en anglais. 

 

 

 


Il est très important de comprendre que suivre Hellofrench n’est pas suivre une influenceuse, mais plutôt la vie à la française dans ce qu’elle a de plus authentique.

 

Avec votre femme, Criselis Pérez, vous créez Hello French en 2020, un compte qui “repense la culture et la langue française” et réunit la plus grande communauté francophile au monde sur Instagram. Racontez-nous… 

HelloFrench réunit les pièces d’un puzzle qui représente ma vie. Nous lançons le compte Instagram en juillet 2020, au cœur de la pandémie. Notre objectif aujourd’hui est de transmettre l’esprit français à une communauté francophile grandissante dans le monde entier, par des contenus courts, ludiques, éducatifs et toujours réfléchis ; avec pour meilleur véhicule pour passer un message, l’humour. Il est très important de comprendre que suivre HelloFrench n’est pas suivre une influenceuse, mais plutôt la vie à la française dans ce qu’elle a de plus authentique,  du moins comment moi, Cécilia, je l'appréhende, Aujourd’hui, HelloFrench décrit mais ne prescrit pas. Nous ne dirons pas qu’il faut s’exprimer ainsi ou se comporter comme cela. Les nuances et les différences sont essentielles.

Notre but est d’avoir une portée mondiale avec une valeur éducative. Aujourd’hui, nous sommes suivis aux Etats-Unis, en France, au Canada et au Royaume-Uni mais pas que : la communauté s'étend en Inde, en Amérique Latine et en Asie. Nous avons l’ambition de renforcer nos guides d’apprentissage du français, d'organiser des masterclass, de créer une école de langue avec la méthode Hellofrench et renforcer la communauté hors réseaux sociaux. Je ne peux pas en dire plus pour le moment.

 

Cecilia Jourdan enseigne le français à New York
Cecilica Jourdan donne des cours de français à NY dans l'école Hunter en 2014 

 

 

Pourquoi est-ce important pour vous de présenter, voire défendre la culture et la langue française à l’étranger - de manière ludique et contemporaine -  ? 

Quand je suis arrivée aux Etats-Unis, j’ai bien senti autour de moi un engouement pour la France et la langue française. Ce soft power français m’a beaucoup intrigué. Il y a un désir de comprendre la France. Les étrangers regardent des films, des séries, lisent des livres, s’organisent un voyage touristique. Mais tous n’ont pas forcément la chance de vivre en France et de percevoir son esprit. C’est là que HelloFrench intervient pour montrer l'esprit français sans mystifier la vie à la française. Car, bien sûr, beaucoup de stéréotypes existent, surtout autour de la femme française, l’intouchable…. Pour cela, nous jouons beaucoup avec le cliché pour montrer justement que c’est un cliché . L’humour est notre véhicule car, pour faire passer un message, il ne faut pas être trop direct pour permettre l’adhésion. Les contenus sur la Parisienne amusent beaucoup mais nous essayons aussi de montrer d’autres facettes, avec un guide de Paris par exemple. 

 

 

 

Nous aborderons un jour le sujet de la sexualité, de la manière la plus impactante et nuancée possible 

 

Vos contenus couvrent une large gamme de sujets, allant de la langue, aux différences culturelles entre Français et Américains, mais aussi de la culture LGBTQ+ à la santé mentale. Peut-on en savoir plus sur les prochaines thématiques abordées ? 

La santé mentale et les femmes sont au centre des réflexions de HelloFrench. Nous souhaiterions aller plus loin et aborder la place de la femme dans la société, le rapport à l’homme notamment. Je réalise qu’à New York la reconnaissance de la femme est plus avancée : elle est entrepreneure, indépendante, elle a de l’argent, du pouvoir, elle réussit sans être forcément attachée à une figure masculine ou à un chemin de tradition, à la maternité ou au statut marital. En France, les mentalités changent doucement à ce niveau là. Je ne critique évidemment pas du tout le fait d’avoir des enfants ou de se marier mais plutôt cette potentielle pression morale et sociale de se conformer. Nous sommes encore trop souvent scrutées et HelloFrench souhaite aborder plus fortement ce thème. 

Il y en a un autre qui nous tient à cœur : la sexualité. Je réfléchis à des angles et des formats car nous ne pouvons pas parler de tout n’importe comment. Je n’ai pas encore trouvé la façon d’aborder un tel sujet. Si HelloFrench existe, c’est pour la communauté francophile qui interagit énormément et je veux respecter cette interaction. Nous aborderons un jour ce sujet, de la manière la plus impactante possible et nuancée. 

 

Cecilia Jourdan et son épouse Criselis Pérez
Cecilia Jourdan et son épouse Criselis Pérez, By Cassell Ferere  

 

 

Je considère que la vie est un jeu. Tous les jours, nous jouons une partie et le jeu ne se termine qu’à la fin de la vie. Si bien qu’il est impossible de perdre.

 

Parisienne à New York ou New-Yorkaise à Paris, comment vous identifiez-vous aujourd’hui ? 

Concrètement, j’ai la nationalité américaine et française. Mais notre identité est-elle le reflet de notre passeport ? Je ne pense pas. La mienne est très fluide et pas figée. Je suis parisienne de naissance sans l’avoir choisi. En revanche, j’ai choisi d’aller vivre à New York. A l’image du puzzle qu’est HelloFrench, je suis toujours en train de constituer le mien. Qui sait, un jour je partirai vivre ailleurs avec mon épouse. J’adorerai vivre au Japon et y apprendre la langue. 

Je considère que la vie est un jeu. Tous les jours, nous jouons une partie et le jeu ne se termine qu’à la fin de la vie. Si bien qu’il est impossible de perdre. L’échec est vu simplement comme une manche qui sera rejouée le lendemain. J’ai eu des échecs dans ma vie, beaucoup de galères, des emplois différents. Je me suis pris des claques professionnelles et sentimentales. Je trouve que la vision du jeu enlève énormément de pression. En France, nous avons encore trop peur de l’échec et du changement. J’aime me tromper. Mon égo un peu moins forcément ! 

 

Cécilia Jourdan By Ryan Sides
Cécilia Jourdan By Ryan Sides


 

Selon vous, le secret d’une vie heureuse est “du vin, du fromage et du pain”. Et aux Etats-Unis en tant qu’expatriée là-bas ? 

Avoir du temps, du bacon et un bon cocktail ! 

 

L'interview de Cécilia Jourdan est disponible dans notre 4e numéro du magazine Expats consacré au rayonnement sportif français

 

Pensez aussi à découvrir nos autres éditions