Le ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères et l’Unesco ont organisé une rencontre autour de la thématique de l'antisémitisme et des discours de haine lors d’une brillante soirée organisée le lundi 23 septembre à Manhattan, au sein du restaurant Cipriani -Midtown.
Le ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères et l’Unesco ont organisé une rencontre autour de la thématique de l'antisémitisme et des discours de haine lors d’une brillante soirée organisée le lundi 23 septembre à Manhattan, au sein du restaurant Cipriani -Midtown.
Sous la houlette de la modératrice Stefania Giannini, assistante auprès du Directeur Général pour l’Education de l’Unesco, et devant un auditoire très fourni, dont les représentants du corps diplomatique français aux États-Unis, un grand nombre de personnalités de haut niveau ont pris place sur la tribune pour exprimer comment et par quels moyens mener ce combat universel grâce aux vertus de l’éducation. Le tout nouveau ministre de l’Europe et des Affaires Étrangères, Jean-Noël Barrot, fut le premier à s’exprimer sur cette initiative et son sens.
Jean-Noël Barrot : “L’intolérable prend souvent racine dans l’intolérance”
“C’est mon premier jour de travail après ma récente nomination et je ne pouvais penser à un évènement plus important que celui ci pour débuter la mission que le Président de la République Française, Emmanuel Macron et son Premier ministre Michel Barnier viennent de me confier”, a déclaré le ministre en préambule de son propos. Le ministre a rappelé que son grand-père, Noël Barrot, fut un résistant actif qui contribua à mettre en sécurité de nombreux enfants juifs durant l’Occupation allemande.
“Ne pas oublier que l’antisémitisme menace gravement l’unité de nos sociétés et de nos démocraties. Il n’épargne aucune partie du monde et requiert notre vigilance absolue. Pour combattre les discours de haine et l’antisémitisme, la prévention est essentielle, au premier rang de laquelle figure l’éducation. L’enseignement de l’histoire de la Shoah est essentiel pour transmettre le sens de cette mémoire aux nouvelles générations. Je pense aux plus jeunes exposés aux discours de haine, extrémistes et négationnistes des réseaux sociaux”, a poursuivi Jean-Noël Barrot.
Le ministre a souligné le rôle essentiel joué par l’Alliance Internationale pour la Mémoire de l’Holocauste. Son travail sert de référence commune et le ministre a annoncé que la France se porterait candidate à la présidence de cette organisation internationale pour 2025.
La France soutient plusieurs programmes impulsés par l’Unesco, notamment celui de la prévention de l’antisémitisme par l’éducation, qui permettent notamment d’agir dans les établissements scolaires et de former et sensibiliser les professionnels de l’éducation aux formes contemporaines de l’antisémitisme.
Audrey Azoulay, Directrice Générale de l’Unesco: “Nous sommes tous témoins de la résurgence de l’antisémitisme à grande échelle”
“Il est de la responsabilité des organisations internationales, donc de l’Unesco, de participer au combat contre cette tendance. Combattre les discours de haine et l’antisémitisme par l’éducation est une des raisons d’être de l’Unesco depuis sa fondation en 1945”, a déclaré la Directrice Générale de l’Unesco. L’antisémitisme prospère aussi dans l’espace virtuel. C’est un nouveau champ des batailles politiques a-t-elle ajouté.
Les algorithmes amplifient le négationisme comme l’a montré une étude récente à laquelle a participé l’Unesco. Une information sur cinq publiée sur Meta, X ou TikTok concernant la Shoah est fausse. L’Unesco propose ainsi la définition de principes pour réguler le contenu des réseaux sociaux.
Un panel très diversifié et engagé dans le combat mondial contre l’antisémitisme
Par la suite un panel réunissant diverses personnalités s’est tenu autour du thème suivant : "combattre l’antisémitisme et la négation de l’Holocauste : le rôle de l’éducation et de la société civile à l’heure de l’ère digital". L’auditoire a ainsi pu entendre un certain nombre de remarques percutantes.
Ronald Lauder, President du World Jewish Congress: “Combattre l’antisémitisme nécessite une bonne coordination entre les gouvernements, la société civile et les organisations internationales.”
Keren Yarhi-Milo, Dean, School of international and Public Affairs, Columbia University:
“Les établissements scolaires et universitaires aux États-Unis ont tous les moyens nécessaires pour combattre l’antisémitisme par l’éducation. Aussi la vraie question n’est pas pouvons nous, mais voulons-nous ?” Keren Yarhi-Milo a-t-elle posé.
“L’antisémitisme est devenu un faire valoir et un fonds de commerce pour certains politiciens en mal d’inspiration” H.E. Mr. Nasser Bourita, ministre marocain des Affaires Étrangères, de la Coopération Africaine et des Marocains Expatriés.
Yonathan Arfi, Président du Conseil Représentatif des Institutions Juives de France : “La seule manière de combattre efficacement la haine et l’antisémitisme est d’enseigner l’histoire de l’Holocauste. Je suis un juif heureux. Pourquoi? Parce que je vis dans un des rares pays dans le monde, la France, où le déni de l’Holocauste est un délit pénal et qui a reconnu sa propre part de responsabilité dans l’Holocauste en 1995, où les juifs sont des citoyens comme les autres, et où on a pu dire: ”heureux comme un juif en France". Cependant nous avons failli à protéger les juifs contre l’antisémitisme. Après les attentats du 7 octobre, les juifs auraient pu s’attendre à une vague de solidarité. Au lieu de cela ils ont été confrontés à un déferlement de haine.”
Diana Mondino, ministre argentine des Affaires Étrangères du Commerce International et du Culte: “Enseignons trois principes fondamentaux pour bâtir une meilleure société : respecter la vie, la liberté et la propriété."
Igli Hasani, ministre pour l’Europe et les Affaires Étrangères d’Albanie: “L’Albanie fut le seul pays d’Europe à compter plus de juifs après la seconde guerre mondiale qu’avant.”
Caspar Veldkamp, ministre néerlandais des Affaires Étrangères: “l’enseignement de l’Holocauste aux jeunes générations est crucial. Ils doivent connaître les insupportables souffrances qui ont eu lieu.”
Olivier Nduhungirehe, ministre des Affaires Étrangères et de la Coopération Internationale du Rwanda : “en 1994, ce n’est pas uniquement le gouvernement et l’armée, ou les extrémistes qui ont pris part au génocide des Tutsis, mais aussi la population ordinaire, à cause de la propagation des discours de haine.”
Deborah Lipstadt, Envoyée Spéciale américaine pour mener le combat contre l’antisémitisme: “les génocides ne commencent jamais par les chambres à gaz, mais par les mots”.