Arrivée au Québec pour six mois, Mariana de la Rosa, chanteuse d’opéra mexicaine, a trouvé à Sherbrooke bien plus qu’un simple tremplin académique. Entre défis migratoires, passion musicale et quête de sens, elle raconte comment son parcours atypique reflète son ambition de rendre l'opéra accessible à tous.
Je suis tombée amoureuse du Québec
En 2017, Mariana quitte Monterrey, au Mexique, pour un échange de six mois à l’Université de Sherbrooke. Étudiante en musique, elle prévoit de retourner au Mexique une fois son programme terminé. Mais sa découverte du Québec chamboule tous ses plans. « Je suis tombée amoureuse du Québec », confie-t-elle, évoquant le charme de Sherbrooke, la chaleur de ses collègues et un mode de vie qui lui correspond. Prolonger son séjour, pourtant, ne fut pas simple. Elle raconte les défis administratifs liés au renouvellement de son statut, ainsi que les sacrifices financiers nécessaires pour rester. « Sans l’aide de mes parents, je n’aurais jamais pu réussir », admet-elle avec gratitude.
Quand la passion devient boussole
La musique n’est pas un choix récent pour Mariana, mais une vocation enracinée dans son histoire familiale. « J’ai appris le piano avec ma grand-mère puis, plus tard, à 12 ans, la batterie. La musique a toujours été dans ma vie», explique-t-elle. Ce qui a commencé comme un loisir est devenu un fil conducteur, surtout pendant les périodes d’incertitude. À Sherbrooke, elle approfondit son amour pour l’opéra, une discipline qu’elle décrit comme exigeante mais gratifiante. « L’opéra m’a permis de poser ma voix, de me recentrer, et surtout de m’exprimer pleinement. » Ce genre, qui combine technique vocale et interprétation scénique, devient pour elle un outil pour se connecter à son public et à sa propre identité.
Artiste et productrice
Mariana ne s’arrête pas à l’interprétation. Refusant les contraintes du milieu classique souvent jugé rigide, elle choisit d’organiser ses propres spectacles. « Je voulais briser les barrières entre l’artiste et le public », affirme-t-elle, ajoutant que ces événements lui permettent d’explorer des thématiques qui lui tiennent à cœur.
Elle met en scène des concerts qui mêlent opéra, musique folklorique mexicaine et chansons classiques internationales, avec un style interactif et accessible. Ses productions se démarquent par leur originalité et leur capacité à toucher un large public. « L’opéra n’a pas besoin d’être élitiste ; tout le monde peut s’y retrouver. »
Créer des ponts entre deux mondes
Avec ses six productions à ce jour, Mariana ne cesse d'innover. Racine transposée, un spectacle inspiré de son propre parcours migratoire, mélange chansons francophones et influences mexicaines, explorant des thèmes universels comme le déracinement et l’intégration. « Ce concert était très personnel pour moi ; c’était ma manière d’exprimer ce que vivre ailleurs m’a appris », explique-t-elle. Cette œuvre a connu un vif succès, avec plusieurs représentations au Québec et même une prestation au consulat du Mexique à Montréal. En parallèle, elle travaille sur des projets qui visent à démocratiser l’opéra et à le rendre accessible à tous, même dans des régions où ce genre reste peu connu.
Un avenir à la croisée des chemins
Aujourd’hui, Mariana aspire à explorer davantage le répertoire lyrique traditionnel tout en continuant ses productions. « J’aimerais que la musique soit mon métier à temps plein », partage-t-elle. Récemment, elle a signé avec une agence qui lui permettra de se consacrer également aux rôles classiques dans de plus grandes productions. Cependant, elle tient à garder sa liberté artistique. « Produire mes propres spectacles me permet de raconter mes histoires, et je ne veux pas perdre cette connexion directe avec mon public. »
Un modèle pour les nouveaux arrivants ?
Le parcours de Mariana de la Rosa est une véritable source d’inspiration pour les immigrants qui cherchent à s’intégrer tout en restant fidèles à leurs passions. Elle montre qu’il est possible de transformer les défis en opportunités, même dans un environnement inconnu. Cependant, son histoire soulève des questions cruciales : comment les institutions québécoises peuvent-elles mieux soutenir les talents étrangers ? Combien d'autres artistes, freinés par des obstacles administratifs ou financiers, pourraient enrichir la scène culturelle québécoise si on leur en donnait les moyens ?