Édition internationale

OLIVIER BEGUIN - "En Suisse, on n´a pas un star system international... Ou alors, il faut faire un film avec Federer"

Écrit par lepetitjournal.com Madrid
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 13 juin 2014

Olivier Beguin, un jeune réalisateur suisse né à Neuchâtel, vient de présenter à Madrid au festival international de cinéma fantastique ("Nocturna") son premier long métrage intitulé "Chimères". Primé dans de nombreux festivals, le film revisite le mythe vampirique tout en montrant une métaphore des relations de couple.  Comme dit son réalisateur, "Chimères" est un film d´horreur romantique. Olivier Beguin est sans aucun doute un des réalisateurs les plus prometteurs du cinéma suisse francophone actuel.

Lepetitjournal.com : "Chimères" a déjà remporté beaucoup de succès dans plusieurs festivals internationaux.
Olivier Beguin (photo lepetitjournal.com) : Oui, on a fait une vingtaine de festivals et on a eu sept prix. Le meilleur étant le prix du jury à Fantasporto (au Portugal) où la protagoniste (Jasna Kohoutova) a aussi eu trois prix à la meilleure actrice. Elle fait un travail excellent. Déjà au cinéma, il n´y a pas souvent de beaux rôles de femmes et dans les  films fantastiques il y en a encore moins. Dans "Chimères", elle a un rôle clé. A part ça, à Cannes, au marché du film, on a trouvé un agent de ventes de Los Angeles. A ce stade, on sait qu´on a le Canada, les Etats-Unis et l´Allemagne. Pour un petit film, c´est vraiment bien. Pour l´Espagne, comme "Chimères" est une coproduction hispano-suisse, le coproducteur espagnol est en train de voir pour la sortie dans les salles. De toutes façons, je pense que le film sortira en DVD ou VOD car pour un film sans publicité, sortir en salle, c´est plus dur. En tous cas, le distributeur canadien va essayer de sortir le film au Québec, en salles.

Comment avez-vous financé le film et quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées pour le réaliser ?
D´abord, il y a un petit 10% de crowfunding. Après, il y a eu des aides locales, liées à Neuchâtel, mais rien de fédéral. Malheureusement, on n´a pas trop de respect ou de compréhension pour le cinéma fantastique en Suisse, alors que paradoxalement on a, à Neuchâtel, le festival international du film fantastique (NIFFF) qui existe depuis quatorze ans et qui est très réputé. L´année passée, on a fait la première de "Chimères" au festival et c´était la première fois en treize ans qu'il y avait en compétition un film suisse ! On défend un peu trop un évènement un peu glamour avec des variétés américaines face à la production d´un film d´horreur francophone avec des vampires. Il faut donc se battre ! En Suisse, par exemple, c´est impensable de donner un Quartz (César suisse) à un film fantastique, comme ça a été le cas de l´Espagne avec huit Goyas au film d´Alex de la Iglesia "Las brujas de Zugarramurdi". En Suisse, il faudra attendre 50 ans pour qu´on ait une situation pareille !

Pourquoi le choix du thème du mythe vampirique et du genre fantastique ?
J´ai toujours fait du fantastique. J´avais envie de faire un film de monstres. Déjà, le court-métrage que j´avais fait avant c´était sur un office de chômage spécialisé dans les monstres. On a pensé, pour "Chimères" au loup-garou comme monstre mais c´était un autre niveau de maquillage et de budget. On a pensé aussi à Jacques l´éventreur mais c´était plus difficile de le faire en Suisse. On a pensé alors au vampire, qui s´adaptait plus à notre budget et qui est un personnage fascinant. En plus, le vampirisme est toujours lié à l´amour, au sexe. "Chimères", au départ, c´était parti comme une comédie horrifique avec un vampire. Mais, au fond de moi, il y avait une histoire d´amour que je voulais raconter, inconsciemment. Le vampirisme sert de décor, en quelque sorte. Ce qui m´intéresse dans le cinéma fantastique, ce sont les émotions avec lesquelles le public peut s´identifier. Tout ça, depuis que j´ai vu "La mouche" de David Cronenberg, à quatorze ans. C´est lui qui m´a fait réaliser que les films d´horreur méritaient du respect et qu´on peut faire des chefs-d´?uvres dans ce genre.

Le film a été tourné en Suisse ?
L´appartement est à Neuchâtel mais la ville est en partie Bruxelles. Neuchâtel est une trop belle ville. Ça aurait été trop paisible pour l´histoire du film : l´eau, le lac, les oiseaux? On n´a pas de quartier assez sale pour montrer cette racaille du film ! Une des productrices habitait Bruxelles, elle m´a montré des photos et j´ai dit "C´est ça". On a aussi tourné en Roumanie.

Vos prochains films seront-ils aussi dans le genre fantastique ? Seront-ils tournés en Suisse ?
Je pense que ça sera, à chaque fois, des variations d´une histoire d´amour, dans le genre fantastique ou pas. En tous cas, le plus important c'est un bon scénario. Le plus important c´est qu´il y ait de l´amour pour le projet. Pour l´endroit où je vais tourner, je ne sais pas. J´irai où la production ou le sujet m´emmèneront.  

Comment se porte le cinéma suisse ?
Il y a une production non négligeable mais pas très grande, non plus. Mais il y a le problème des trois langues qui font que les films ne sortent pas forcément dans toute la Suisse. La Suisse francophone exporte en Belgique, en France et la Suisse allemande en Allemagne ou en Autriche. Il y a quelques noms et l´animation et les documentaires font la fierté du cinéma suisse en ce moment. Le documentariste Fernand Melgar est un des noms récurrents depuis une dizaine d´années, par exemple. On a surtout des exportations de films suisses dans les festivals ou du type "rétrospective à la Cinémathèque de"? On n´a pas vraiment un star system international suisse. Ou alors, il faut faire un film avec Federer ! Mais, au niveau acteur, de qui ferait-on un poster, une affiche ?

Carmen PINEDA (www.lepetitjournal.com - Espagne) vendredi 13 juin 2014
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Publié le 12 juin 2014, mis à jour le 13 juin 2014
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