Édition internationale

Raparigas in Tech au lycée français de Lisbonne : éveiller les vocations scientifique

La deuxième édition de Raparigas in Tech s'est tenue le 26 novembre 2025 à Lisbonne. Une initiative qui vise à encourager les collégiennes du Lycée Français Charles Lepierre à explorer les métiers scientifiques et numériques. Entre témoignages, ateliers immersifs et échanges directs avec des figures inspirantes (rôles-modèles), les élèves ont découvert des parcours qui bousculent les idées reçues.

Raparigas InTech au Lycée français Charles Lepierre à LisbonneRaparigas InTech au Lycée français Charles Lepierre à Lisbonne
©Lycée français Charles Lepierre
Écrit par Camille Ponsard
Publié le 18 décembre 2025, mis à jour le 19 décembre 2025

La sous-représentation des femmes dans les filières STEM (Sciences, Technologie, Ingénierie et Mathématiques) reste préoccupante en Europe. Malgré des évolutions, les filles demeurent minoritaires dans les études scientifiques, en particulier en informatique et en ingénierie. C'est dans ce contexte que Raparigas in Tech 2025 renforce son ambition, sensibiliser, inspirer, donner confiance.

L'événement a débuté au Lycée Français Charles Lepierre où la proviseure Madame Pascale Gautrot-Lamoureux a ouvert la session plénière. À cette occasion, l'ambassadrice de France au Portugal, Madame Hélène Farnaud-Defromont, est intervenue en visioconférence afin de saluer l'initiative et d'encourager les jeunes filles dans les filières scientifiques et numériques.

 

Raparigas in Tech au lycée français de Lisbonne
©Lycée français Charles Lepierre 


Une édition soutenue par trois acteurs clés

Cette nouvelle édition voit le jour grâce à la collaboration étroite de trois institutions incontournables, la French Tech Lisbonne, l'Alliance Française, et le Lycée Français Charles Lepierre de Lisbonne.

Une synergie rendue possible grâce à l'implication de Jacques Tollu, formateur et membre du bureau de la French Tech Lisbonne, qui joue un rôle moteur dans ce partenariat renouvelé. Lepetitjournal s'est rendu au lycée Charle LePierre et a pu s'entretenir avec Jacques Tollu. 


Jacques Tollu, formateur et membre de la French Tech Lisbonne

Jacques Tollu est un entrepreneur engagé, qui avec le lycée français ainsi que l’Alliance Française de Lisbonne, est à l'origine de l'initiative Rapariga in Tech. Après une première édition réussie, ils ont souhaité renouveler l'événement afin de répondre à un besoin toujours actuel qui est celui de motiver, inspirer et ouvrir de nouvelles perspectives aux générations futures dans un secteur encore largement masculin.

  • En 2021, seulement 32,8 % des diplômés en STEM en Europe étaient des femmes – la France se situant au 15e rang (Eurostat, 2024).
  • En 2023, les femmes n’occupaient que 24 % des emplois dans les professions numériques (INSEE /Grande École du Numérique).
  • À la rentrée 2022, elles ne représentaient que 30 % des effectifs des écoles d’ingénieurs (SIES 2024).
  • En France, seules 20 % des diplômées en informatique et 27 % en sciences sont des femmes (Fondation Jean-Jaurès, 2023).

 
Lepetitjournal : Pourquoi organiser une nouvelle édition de Raparigas in Tech ?

Jacques Tollu : La première édition avait été un succès. Et en tant que père de quatre filles, je me sens très concerné par leur avenir et leur orientation. Il manque vraiment des filles dans la tech.


Quel est le principal problème selon vous ?

Les filles n’osent pas toujours franchir le pas. Souvent surprotégées, elles sont encore majoritairement orientées dès le parcours scolaire vers des filières comme la santé ou les ressources humaines. Dans mon organisme de formation, Skills Creator Academy, spécialisé dans la reconversion vers les métiers de l’informatique, j’ai beaucoup trop régulièrement des promotions de quinze stagiaires sans aucune femme. La tech souffre également d’une image négative qui freine les vocations.


Qu'espérez-vous avec cette édition 2025 ?

Ancrer l'initiative dans le temps. Idéalement, proposer des ateliers toute l'année au lycée. Et créer un lien direct avec les entreprises, pour des stages ou des rencontres.


Comment est née la collaboration avec la French Tech Lisbonne et l'Alliance Française ?

Je suis membre de la French Tech et pour la mission French Tech l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est un enjeu majeur dans le cadre du Pacte Parité lancé en 2022, j'ai donc proposé l'idée. C'est une collaboration fluide et évidente.

Quel message souhaitez-vous transmettre aux jeunes filles ?
Ne pas hésiter. Croire en elles. L'orientation n'est pas un chemin linéaire et tout reste possible.


Trois rôles-modèles ont participé à l´événemnt Raparigas in Tech. Inês Macedo Santos, senior associate chez Armilar et ancienne élève du lycée ; Manuela Doutel Haghighi, directrice mondiale de l'engagement client chez Microsoft, également ancienne élève et Hélène Guillaume Pabis, fondatrice de Wild.AI. Toutes trois ont dialogué avec les collégiens pour partager leurs parcours et leurs expériences.
À l'issue de la rencontre, Hélène Guillaume Pabis a accepté de répondre à quelques questions pour Lepetitjournal/Lisbonne.

Hélène Guillaume : un rôle-modèle qui bouscule les codes !

Ancienne athlète, data scientist, fondatrice et ex-CEO de Wild AI, qu'elle a vendue il y a un mois, Hélène Guillaume a partagé un parcours singulier avec les élèves.

Lepetitjournal : Pourquoi avoir accepté de participer à Raparigas in Tech ?

Hélène Guillaume : Parce que je n'avais pas de rôle-modèle féminin quand j'étais jeune. Voir des femmes CEO m'a beaucoup marqué. C'est important de montrer aux filles qu'elles peuvent tout faire.

Aviez-vous déjà envie de travailler dans la tech quand vous étiez adolescente ?

Pas du tout ! Je voulais être plein de choses comme vétérinaire, pilote de chasse, médecin... mais certainement pas dans la finance, où travaillait mon père. Et je ne savais même pas ce qu'était une entrepreneure.

Qu'est-ce qui vous a poussée à créer Wild AI ?

Je voulais comprendre le corps des femmes. Wild AI était une application qui permettait de s'entraîner et de manger en fonction du cycle qu'on soit réglée, sous contraceptif ou en péri-ménopause.

Avez-vous rencontré des obstacles en tant que femme dans la tech et la finance ?

Énormément. En maths sup, nous étions six filles sur cent. On me disait "Toi, tu fais des maths ? On ne dirait pas." En finance, on se moquait ouvertement de moi. Les stéréotypes sont forts.

Quels messages voulez-vous transmettre aux collégiennes ?

Que le numérique n'est pas seulement fait de maths et de coding. Tout est technologique aujourd'hui. On peut aimer la science, aimer s'habiller, être féminine et être forte. Les femmes sont extraordinaires.

 

Hélène Guillaume
©Camille Ponsard

 

La parole aux élèves de 3ᵉ

Alice (14 ans, franco-portugaise), Jeanne (14 ans, franco-portugaise), Sarah (14 ans, française installée au Portugal depuis quatre ans) et Emeline (14 ans, australienne arrivée au Portugal en début d'année scolaire), ont partagé leurs impressions après les ateliers de découverte des métiers scientifiques et technologiques. Elles ont partagé leurs impressions à la suite de ces deux journées pendant lesquels elles ont assisté à une conférence et participé à des ateliers découverte.

Lepetitjournal : Est-ce que vous aviez déjà une idée des métiers liés aux nouvelles technologies ?

Alice : Un peu, oui. Je ne connaissais pas énormément de métiers, mais quelques-uns. J'ai pu apprendre de nouvelles choses mais je veux être pédiatre et ça n'a pas changé. Les ateliers m'ont appris de nouvelles choses mais cela ne m'a pas donné d'ouverture car je sais ce que je veux faire plus tard. J'aime bien la science, mais pas vraiment la technologie. Néanmoins, lorsque les rôles modèles féminins ont partagé leurs expériences, le moment était particulièrement touchant et vraiment bien.

Jeanne : Je pense qu'avec les nouvelles technologies, il y aura beaucoup de métiers qui vont disparaître, parce que l'intelligence artificielle peut les remplacer. Mais moi, j'ai déjà une idée de ce que je veux faire, je veux être œnologue en viticulture. Les ateliers m'ont aidé à mieux comprendre les choses et la vie en général. Ce qui m'a interpellé est surtout l'atelier sur l'intelligence artificielle. 


Comment avez-vous vécu les ateliers, et qu'est-ce que vous en retenez sur les métiers du numérique, les inégalités et ta propre orientation ?

Sarah : Je connaissais déjà quelques métiers scientifiques ou numériques, mais les ateliers m'ont appris beaucoup de choses, surtout sur la manière dont les femmes sont perçues dans le travail. Ce qui m'a vraiment inspirée, ce sont les histoires des intervenantes : elles racontaient des situations qu'elles ont vécues, et on se dit que ça pourrait aussi nous arriver. Elles étaient passionnées et elles montraient qu'il ne faut pas s'arrêter juste parce qu'on pense qu'on n'y arrivera pas. J'avais conscience qu'il existait des inégalités, mais l'entendre de personnes qui en ont réellement été victimes, ça change tout : on réalise que ce ne sont pas juste des idées qu'on raconte. Je ne sais pas encore ce que je veux faire, peut-être médecine, mais rien n'est sûr. Les ateliers ne m'ont pas donné une idée précise, mais ils m'ont beaucoup enrichie. Je trouve important qu'il y ait des femmes dans ces domaines, parce qu'elles apportent des idées différentes : on a même parlé d'Apple, où certaines fonctionnalités n'existaient pas parce qu'il n'y avait pas de femmes dans l'équipe. 

Pour les garçons, c'était utile aussi : à l'école, on dit qu'il n'y a pas de différences mais dans le monde du travail ce n´est pas ce qui se passe. Ça leur a ouvert les yeux sur des inégalités dont ils ne se rendent pas toujours compte. Cependant certains n'arrivaient pas à s'identifier à certaines histoires des rôles modèles. 
 

Avant de participer aux ateliers, aviez-vous déjà une idée des métiers scientifiques ou numériques, et en quoi cette expérience a-t-elle influencé vos envies pour votre futur métier ? 

Emeline : Je savais qu'il y en avait, mais pas autant. Les ateliers nous ont aidés à comprendre tous les métiers possibles, pour les femmes comme pour les hommes. Ça m'a vraiment ouvert des horizons. J'avais déjà une idée de ce que je voulais faire, plutôt dans le commerce, vendre des produits pour des entreprises. Mais hier, une intervenante a parlé de son travail dans une start-up, et ça m'a beaucoup intéressée et inspirer avec le côté dynamique, le développement... ça me correspond aussi.

Ce qui m'a le plus marquée, c'est de découvrir qu'il existe encore beaucoup de différences entre hommes et femmes dans le monde du travail, je pensais que ça avait beaucoup évolué, mais apparemment pas autant que je l'imaginais. 
 

L'édition 2025 confirme une volonté commune, ouvrir la voie, année après année, vers une meilleure représentation des femmes dans la tech.

French Tech Lisbonne, déjà impliquée via ses membres, pourrait jouer un rôle encore plus pertinent dans les prochaines éditions avec des stages, rencontres avec des entrepreneures, immersion dans des start-up locales. Une manière d'inscrire durablement Raparigas in Tech dans l'écosystème technologique lisboète... et de continuer à élargir le champ des possibles.

 

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