A partir du 8 novembre et jusqu’au 13 décembre 2025, la Galeria Oficina Impossível à Lisbonne accueille l’exposition artistique “Équilibrio”. Cette exposition réunit l’artiste céramiste française Géraldine Pillot et le photographe portugais Policas. Ensemble, ils explorent la notion d’équilibre, thème central de cette création commune. Ils présentent l’équilibre entre la force et la fragilité, entre la matière et la lumière. Lepetitjournal Lisbonne a rencontré les artistes afin de mieux comprendre le sens de cette exposition.


À travers ses sculptures en porcelaine, Géraldine Pillot crée un dialogue poétique avec les images qui les mettent en scène.
Lepetitjournal : Le titre de votre exposition est “Équilibrio”. Qu’est-ce qu’il signifie pour vous, dans votre vie et dans votre art ?
Géraldine Pillot : Le choix de ce titre s’est fait avec les organisateurs de l´exposition Jean-Michel Albert de Alfa, association Luso-Française d´Art et Catarina Pombo Nabais de la galerie Oficina Impossível mais aussi avec Policas qui participe à ce projet. Je le trouvais intéressant parce que dans le mot “equilibrio”, il y a aussi le mot “libre”. C’est un mot qui traduit bien ce que je veux représenter dans mes œuvres, qui est l’équilibre entre la force de la céramique ou de la porcelaine et la fluidité, la fragilité, tout ce qui accompagne le processus créatif. Je voulais aussi sortir de la notion matérielle de l’équilibre un objet qui tient, qui tombe pour aller vers quelque chose de plus spirituel, de plus philosophique. Nous vivons tous dans une recherche permanente d’équilibre, entre nos émotions, nos relations, nos états intérieurs. C’est cela que je veux transmettre à travers cette exposition.
Qu’est-ce qui différencie cette exposition des précédentes ?
En 2024, j’avais présenté une grande œuvre suspendue, composée d’environ 200 pièces, dans une ancienne église transformée en galerie. C’était un vrai défi technique. Il a fallu deux jours de montage pour suspendre la pièce à plus de six mètres de haut. Pour l’exposition Equilibro, grâce à Jean-Michel et Catarina, j’ai pu bénéficier de plus d’espace, ce qui me permet de présenter mon travail de manière plus étendue et plus profonde.
Cette nouvelle exposition est aussi une collaboration avec Policas. Comment s’est-elle créée ?
Elle s’est faite naturellement. Policas est aussi artiste, donc nos échanges se sont imposés comme une évidence. J’aime cette idée de regards croisés. L’exposition présente mes œuvres, mais aussi les photographies de Policas. L’ensemble crée un dialogue, un espace lumineux et vivant.
Pourquoi avez-vous choisi un cheval noir lors de la séance photo pour la couverture ?
Je voulais un cheval noir, parce que mes porcelaines sont blanches, et je voulais ce contraste entre force et fragilité. Le cheval, pour moi, est la représentation parfaite de ce que ça peut transmettre, c’est un animal d’une puissance extraordinaire, mais aussi d’une sensibilité, d’une fragilité incroyable. On a trouvé ce fameux cheval noir magnifique, et on est allés dans un centre où il y avait de l’espace pour pouvoir prendre des photos. Policas a accepté de relever le défi dans les conditions réelles, on n’était pas en studio, on était dans les écuries, avec une lumière indirecte.

Comment travaillez-vous la matière ?
J’utilise différentes terres. J’aime le contraste entre la rugosité du grès et la douceur de la porcelaine. Le grès, souvent noir, je le laisse brut, il représente la force. La porcelaine, elle, symbolise la délicatesse et la fluidité. C’est une matière très difficile, presque volatile, qui accepte peu les contraintes. J’aime cette dualité entre résistance et fragilité.
Combien de temps avez-vous mis pour créer cette exposition ?
Environ un an et demi. Ce n’est pas un travail ponctuel, mais un processus continu.
Je crée régulièrement, et les expositions viennent ensuite comme des étapes naturelles.
Cette exposition, on en parlait depuis un moment.
Que souhaitez-vous que les visiteurs retiennent ?
J’aimerais qu’ils viennent avant tout pour voir, pour ressentir. C’est une expérience à la fois visuelle et sensorielle. Et peut-être que cela les amènera à réfléchir à leur propre notion de l’équilibre.
Après cet échange avec Géraldine, nous avons également rencontré Policarpo Brito connu sous le nom de Policas. Photographe et artiste visuel portugais, il mêle émotion et symbolisme dans son travail. Partenaire de ce projet, il revient sur cette collaboration artistique et sur la manière dont la lumière et la photographie mettent en valeur le travail de Géraldine Pillot.
Lepetitjournal : Comment s’est passée votre rencontre avec Géraldine Pillot ?
Policas : C’est une grande artiste, elle a une grande créativité. Travailler avec Géraldine est toujours un défi, mais un beau défi. C’est une artiste avec une grande créativité et une vision très forte. Dès notre première collaboration, j’ai senti qu’on partageait une même sensibilité. Cette nouvelle exposition, “Équilibrio”, a été un projet exigeant mais passionnant.
Comment s’est passée la séance photo avec le cheval noir, pour la couverture de l’exposition ?
C’était une idée de Géraldine. Elle voulait un cheval noir, pour contraster avec la blancheur de la porcelaine. Ce contraste entre la force et la fragilité résume parfaitement son travail. Le cheval représentait cette puissance et cette sensibilité à la fois. Nous avons trouvé un cheval noir magnifique et avons fait les photos dans un centre équestre, pas en studio. Pendant la séance, il y avait des enfants, du bruit, d’autres chevaux… C’était un vrai défi ! J’ai installé un grand drap blanc en fond, avec une lumière naturelle. Géraldine a rapidement créé un lien incroyable avec l’animal, on sentait une vraie connexion entre eux. Le cheval s’est calmé, il était attentif, presque complice. À un moment, elle a posé une pièce de porcelaine sur son dos. C’était un moment suspendu, fragile, parfait. Pour moi, c’était l’image même de l’équilibre, un animal puissant, libre, et un objet délicat posé sur lui, sans contrainte. J’ai pris la photo, et tout était là. C’était magique.

Qu’est-ce qui vous a inspiré dans cette collaboration ?
Quand Géraldine m’a expliqué son idée, je n’étais pas sûr de comment la réaliser. Mais l’inspiration est venue sur place, pendant la séance. Ce moment avec le cheval a tout déclenché. C’est ça qui me plaît dans l’art, ce sont les défis, les émotions, l’imprévu.
Comment travaillez-vous ensemble, Géraldine et vous ?
Nos deux approches se complètent. Elle travaille la matière, la terre, la forme. Moi, j’interprète son univers à travers l’image, la lumière, le symbole. Avec le cheval, j’ai voulu prolonger ce qu’elle exprime dans ses céramiques, c’est-à-dire l’équilibre entre la force et la fragilité. C’est un dialogue entre nos deux arts.
Vous faites de la photo, du graphisme, de la peinture... Quelle discipline préférez-vous ?
J’aime tout. Je n’ai pas de préférence. Ce qui m’importe, c’est le projet et l’émotion qu’il dégage. J’ai un atelier où je peins sur des pièces automobiles, comme des capots de voiture. Je travaille aussi pour le Jardin Zoologique de Lisbonne, sur des œuvres graphiques. Tout ce qui touche à la création me passionne.
Comment voulez-vous que le public ressente votre travail ?
Je souhaite qu’il ressente de l’émotion. L’art, pour moi, c’est ça, c’est une émotion. Quand on regarde une œuvre, on doit ressentir quelque chose. Je me souviens que la première fois que j’ai vu le “Guernica” de Picasso, j’ai été bouleversé. L’histoire derrière l’œuvre amplifie cette émotion. J’aimerais que les visiteurs de notre exposition ressentent la même chose, qu’ils voient la beauté, la force, mais aussi la fragilité. Et qu’ils comprennent qu’il y a une histoire derrière chaque photo, chaque sculpture.
L’exposition “Equilibrio” est à découvrir du 8 novembre au 13 décembre 2025 à la Galeria Oficina Impossível, Calçada Marquês de Abrantes, nº 100-102 à Lisbonne.
Vernissage : le 7 novembre de 18h30 à 21h
















