Les « Populations Indigènes en Situation d’Isolement et de Contact Initial » (PIACI) sont au cœur d’un projet de modification de la loi qui porte leur nom. Leur protection est en jeu.
Le Parlement péruvien doit s’exprimer sur un projet de loi, une proposition qui vise à modifier la loi PIACI et qui permettra ainsi d’améliorer la protection de 7.000 péruviens qui vivent en isolement volontaire ou qui sont au stade du contact initial. Cette population est considérée comme la plus vulnérable du Pérou.
Qui sont les PIACI (Populations Indigènes en Situation d’Isolement et de Contact Initial) ?
L’Amazonie péruvienne héberge de nombreux peuples indigènes. Parmi eux, on retrouve deux groupes de populations avec des situations distinctes :
PIACI – en situation d’isolement : ce sont des populations indigènes qui n’ont pas eu de relations avec le reste de la société (ou les ont évitées).
PIACI – contact initial : il s’agit de groupes qui ont décidé de commencer un processus d’interrelation avec d’autres groupes.
Ces deux groupes de populations se retrouvent dans un état de grande vulnérabilité (sanitaire, territorial, socioculturel et démographique) face au contact avec des populations externes à leurs groupes, qui présentent des styles de vie très éloignés des leurs.
Comment les PIACI sont-elles protégées actuellement ?
Dans le but de protéger leurs droits et de sauvegarder leur existence et leur intégrité, l’État péruvien a mis en place un cadre normatif qui garantit leur protection, le respect de leur choix à l’autodétermination et leur décision de ne pas maintenir de contact avec le reste de la société.
- L’État (Loi 28736) reconnaît l’obligation de protéger la vie et la santé de ces populations, ainsi que de protéger leur culture et leur mode de vie traditionnel.
- Pour protéger les PIACI, l’État a établi des Réserves Indigènes Territoriales : Réserve Indigène Isconahua, Réserve Indigène Murunahua, Réserve Indigène Mashco Piro, Réserve Territoriale Madre de Dios, Réserve Territoriale Kugapakori Nahua Nanti…
Pourquoi modifier la loi PIACI ?
Les populations indigènes en situation d’isolement volontaire et de contact initial sont parmi les groupes les plus vulnérables de la société péruvienne à cause des épidémies mais aussi parce qu’elles sont particulièrement exposées à des risques de migration dus au tourisme irresponsable, aux exploitations minières illégales, à la déforestation illégale, au narcotrafic… Actuellement, selon le Ministère de la Culture du Pérou, les PIACI compteraient 7.000 péruviens, indigènes, regroupés dans au moins 20 groupes.
« Le peuple Nahua est un exemple emblématique et lamentable de l’impact que peut avoir le contact et la pression des activités économiques sur les territoires PIACI… La déforestation illégale, les entreprises d’hydrocarbures… ont donné jour à des foyers de contaminations épidémiques qui ont causé la mort de 46% de leur population » mentionne la proposition présentée par la Commission des Populations Andines, Amazoniennes, Afro-péruviennes, de l’Environnement et de l’Écologie du Parlement péruvien.
De son côté, la Société Péruvienne des Droits de l’Environnement (SPDA) précise « Nous considérons important de modifier la loi PIACI parce qu’il est nécessaire de doter ces populations d’une protection maximale en abordant les trois thèmes suivants » :
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L’intangibilité territoriale
La loi PIACI signale le caractère intangible des réserves indigènes mais y autorise malgré tout l’exploitation des ressources naturelles en cas de nécessité publique. Le projet de modification de la loi cherche à éliminer cette exception à l’intangibilité.
La SPDA indique que l’exploitation des ressources naturelles dans les réserves indigènes met en danger la vie et l’intégrité physique et culturelle des PIACI. « Ces populations se trouvent en situation de forte vulnérabilité, beaucoup d’entre elles sont en danger de disparaître complètement ».
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La création de zones tampons
La proposition de la commission est d’établir des zones tampons autour des réserves indigènes afin de leur garantir, par précaution et prévention, le principe de non contact et d’intangibilité de ces territoires.
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Pouvoir de sanction du Ministère de la Culture
Le projet de modification de la loi PIACI prévoit également un dispositif permettant au Ministère de la Culture de sanctionner le non-respect des dispositions de la loi.
À ce jour, plus de 40.000 personnes ont exprimé leur soutien à cette réforme de la loi PIACI à travers une pétition publique. Par ailleurs, près d’une centaine d’organisations nationales et internationales appuient cette proposition de modification de la loi par l’intermédiaire de cette lettre ouverte.