Expatriés, vous avez peut-être vu passer récemment sur Facebook une photo de Wonder woman, alias la "Femme d'expat, cette héroïne". De sa plume acérée et pleine d'humour, Mathilde sait croquer les clichés accolés à l'expatriation pour les détourner dans son blog, et cela fait mouche, si l'on en croit les réactions de ses lecteurs de plus en plus nombreux.
Mathilde vit en Thaïlande depuis plus de 4 ans avec son mari anglais et ses deux petits garçons. Elle a débuté son blog il y a trois mois, après avoir travaillé dans la communication et le journalisme, au Mexique au Yémen ou en Australie. « A Bangkok, j'ai travaillé, j'ai accouché, je n'ai plus travaillé... Et puis, j'ai recommencé: un nouveau job, un nouveau bébé, plus de job mais cette fois, à la place: un blog tout neuf ! » Ce sera My Tailor is an expat, un nom « absurde », trouvé par son mari. « Il n'y a rien à expliquer, c'est ce qui me plait ! »
Ce blog, Mathilde y pensait depuis longtemps : « Je ne veux pas réintégrer le monde professionnel tout de suite. A l'étranger, devant le nombre de femmes d'expat qui peinent à trouver un travail, certains profitent de la situation. Je connais beaucoup de femmes surdiplômées qui sont sous-payées et se voient refuser par exemple un congé maternité décent sous prétexte qu'on n'est pas en France ». Elle a d'abord pensé à réaliser un guide pour les enfants. « Ça m'a ennuyée au bout de deux minutes, je me suis recentrée sur le blog. Mon propos c'est de raconter ma vie et celle des expats en rigolant. Je n'ai pas vocation à donner des tuyaux pour les femmes d'expat qui cherchent un job, à militer. J'aime bien remettre en question le mythe de la femme d'expat notamment, expliquer qu'elles ne sont pas complètement stupides. Si on n'a pas de job et que l'on vit dans des conditions faciles, oui on va à la manucure ! C'est humain ! »
Et c'est d'ailleurs son texte sur « La femme d'expat, cette héroïne », qui a contribué au succès du blog : « La légende raconte que chaque femme qui suit son mari à l'étranger se transformerait en créature oisive partageant ses journées entre le tennis, la manucure, ses déjeuners entre amies et le tea-time dans un luxueux hôtel colonialiste. Selon la légende encore, les principaux sujets de conversation de cette femme d'expat seraient: critiquer son ?'personnel de maison'', critiquer son pays d'accueil et critiquer son pays d'origine. »
A l'encontre des préjugés
Beaucoup de contre-pieds, d'humour, un soin particulier apporté à l'écriture et aux illustrations, il n'en fallait pas plus pour que les lecteurs (et pas seulement les lectrices !) se reconnaissent dans ce texte qui a fait le tour du monde. « Il ne faut pas s'en cacher, on écrit pour être lu. Je suis ravie ».
Mathilde part de son expérience en Thaïlande et sait mettre le doigt sur nos petits travers. Tout expatrié se reconnaît par exemple dans son ?Tour d'horizon des meilleures techniques et atouts pour ?sociabiliser efficace?. « Si on n'a rien contre l'idée de se faire des amis Catholiques et qu'on n'est pas allergique aux enfants, la paroisse Francophone (par exemple) offre de très belles opportunités. C'est une technique qui plaira aux plus organisés. L'approche de nouveaux amis à l'église se passe en effet en deux temps (avec possibilité de rattrapage la semaine suivante si nécessaire) : la phase d'observation pendant la messe, suivie de la phase d'action à la sortie.»
Ou encore aller aux ventes des femmes d'expat « Pour mettre toutes les chances de votre côté, il conviendra d'observer quelques règles de bienséance concernant, notamment, le nombre de tasses de café bues aux frais de l'organisatrice (surtout si elle a sorti ses capsules Nespresso rapportées de France), la discrétion avec laquelle on a regardé toute sa déco et ses photos de famille, ou le montant des achats effectués. Celui-ci doit-il être proportionnel au temps passé à piétiner devant les étales et profiter de la clim de la gentille organisatrice ? » (Lire la suite ici !)
Si les textes sont autant appréciés des lecteurs, c'est peut-être aussi parce que Mathilde invite les expats à déculpabiliser. « Est-il acceptable de ne point parler la langue locale et de n'en point rougir? » ou encore « Laissons la femme d'expat s'ennuyer (ferme)» rassureront ceux qui ont la flemme de prendre des cours et préfèrent les activités proposées par l'Accueil ou le sport à la recherche active d'un boulot.
Mathilde a envie de continuer longtemps tout en développant une activité de rédactrice freelance: « Plus je creuse sur l'expatriation, plus j'ai l'impression qu'il y a des sujets. J'ai envie de rigoler avec ça ». Ça tombe bien, nous aussi !
MPP (www.lepetitjournal.com) jeudi 18 juin 2015