Suite au fort ralentissement de l'activité économique de la Chine, l’Inde s’attend à un impact majeur sur ses importations et ses exportations dans divers domaines et notamment dans les secteurs pharmaceutique, électronique, téléphonie mobile et pièces pour l’industrie automobile.
Les marchés indiens accusent le coup
Comme toutes les bourses mondiales, la dernière semaine de février, la bourse indienne a enregistré une forte dévalorisation, notamment le vendredi 28 février quand l’indice SENSEX (le Bombay Stock Exchange Sensitive Index) a chuté de plus de 1 100 points soit 2,77 %. L’indice regroupe 30 sociétés indiennes dont Tata Steel, Tech Mahindra, Infosys, Mahindra and Mahindra, Bajaj Finance, HCL Tech et Reliance Industries.
Selon les analystes, jusqu'à la semaine dernière, les marchés considéraient que le coronavirus aurait un impact minime sur l'économie mondiale parce que la Chine était parvenue à contenir le virus. Cependant, avec l’apparition de cas un peu partout dans le monde et plus particulièrement en Europe, les investisseurs commencent à s'inquiéter et à craindre un ralentissement économique mondial.
L’Inde est dépendante de la Chine dans de nombreux secteurs
La Chine est le premier fournisseur de l’Inde, suivi par les Etats-Unis et les Emirats Arabes Unis. En 2018-2019, l’Inde a importé pour 70,4 milliards de dollars de biens en provenance de Chine, alors qu’elle n’a exporté vers la Chine que pour 10,2 milliards de dollars (source CMEI).
En 2017, les cinq premiers produits importés de Chine étaient :
- les instruments pour les télécommunications,
- les composants électroniques,
- le matériel informatique et les périphériques,
- les outillages industriels pour l’industrie laitière,
- les produits chimiques organiques.
Ils représentaient 46 % des importations en provenance de Chine.
De plus, 27 % des composants utilisés par l’industrie automobile indienne sont achetés en Chine.
L’Inde se fournit aussi à hauteur de 1,5 milliards de dollars (soit 3 % des importations de Chine) en médicaments en gros et produits intermédiaires pour l’industrie pharmaceutique. Selon l’organisme en charge de la promotion du commerce extérieur indien (Trade Promotion Council of India), environ 85 % des ingrédients actifs utilisés dans l’industrie pharmaceutique (active pharmaceutical ingredients - APIs) sont fournis par la Chine à des sociétés indiennes. L’Inde est le premier producteur mondial de médicaments génériques.
L'industrie automobile indienne ralentit sa production
Selon The Hindu qui cite une association des industriels de ce secteur, les restrictions en cours sur les produits en provenance de Chine ont commencé à impacter de manière négative l’industrie automobile indienne.
S. Muralishankar, Président de l’Association of Indian Forging Industry (AIFI), a déclaré : “Le Coronavirus aura un effet négatif sur l’industrie automobile indienne ainsi que sur les secteurs des pièces automobiles et de la forge, qui ont déjà réduit leur production suite aux conditions de marché peu favorables et à l'entrée en vigueur de la modification des normes sur les émissions des véhicules au 1er avril 2020.”
Des rapports récents indiquent que l’impact sur la production indienne dans les segments des véhicules utilitaires, des véhicules particuliers et des deux roues sera important.
“Le gouvernement chinois a interrompu l’envoi de cargaisons par la mer jusqu'à nouvel ordre et n’autorise que le transport aérien, ce qui n’est pas du tout adapté pour les composants dans les industries automobiles et de la forge.” a-t-il ajouté.
L’industrie pharmaceutique indienne, un impact à plus long terme
L’Inde est particulièrement dépendante de la Chine pour l'approvisionnement en ingrédients actifs (API). Le gouvernement indien a récemment formé un comité pour superviser les importations de matières premières pharmaceutiques en provenance de Chine et a recommandé des restrictions sur les exportations de douze ingrédients pharmaceutiques actifs dont certains antibiotiques et des vitamines.
Actuellement, les industries indiennes disposent d’un stock de deux mois en ingrédients actifs. Chaque année, le secteur anticipe le ralentissement de la production chinoise pendant la période de vacances du nouvel an lunaire.
Selon un CEO d’une société pharmaceutique indienne, les usines chinoises n’ayant pas toutes redémarré après les vacances, la chaîne d’approvisionnement de l’industrie indienne est donc interrompue. Celui-ci estime que le temps de remise en route de la chaîne sera au moins de trois/quatre mois et que donc l’industrie indienne devrait se trouver confrontée à des pénuries de matières premières lors du deuxième trimestre de l'année fiscale.
Cependant, la situation profite à certaines entreprises indiennes : le ralentissement momentané de la production pharmaceutique des sociétés chinoises leur apporte une opportunité d’augmentation de parts de marché. Selon le Economic Times, IOCL Chemicals and Pharmaceuticals, premier producteur mondial d'Ibuprofène, devrait réaliser un mois record en février. Suite à l'isolement de la province de Hubei, le prix de l'Ibuprofène sur le marché mondial est passé de 3 dollars le kilo à 18 dollars. IOCL Chemicals and Pharmaceuticals fournit un tiers des besoins mondiaux, en concurrence avec la société Biocause Pharmaceutical Co basée dans la province de Hubei qui elle en fournit 10 %.
Vijay Kumar Garg, codirecteur d’IOCL a déclaré : “Il va y avoir un déficit dans la production mondiale et nous devrions en bénéficier.”
Risques importants pour la production électronique indienne
A la différence du secteur pharmaceutique, les secteurs des appareils électroniques ménagers ne disposent pas de stocks de composants à long terme. Si l’isolement de la Chine perdure, les sociétés devront trouver d’autres sources d’approvisionnement et les prix seront probablement plus élevés.
Un gestionnaire de fonds indien affirme : “De nombreux producteurs d'électroménager, de téléviseurs et d’appareils de climatisation dépendent fortement de la Chine pour les composants utilisés. La Chine représente 75 % de la valeur totale des composants pour la fabrication des téléviseurs indiens et presque 85 % pour les smartphones. Des alternatives doivent être trouvées rapidement.”
Quelques gagnants
La chute des prix du pétrole suite au ralentissement de l'activité économique chinoise devrait favoriser les fabricants de peintures et de plastiques indiens, d’autant plus que la province de Hubei regroupe un nombre important de producteurs de produits chimiques, eux aussi en concurrence directe avec les sociétés indiennes.
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