Le ministre français des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, a appelé lundi la Chine à envoyer "des messages très clairs à la Russie" sur la guerre en Ukraine et défendu le maintien de relations économiques fortes avec le géant asiatique.
"Nous attendons de la Chine qu’elle passe des messages très clairs à la Russie", a déclaré le ministre, plaidant pour "un rapport de force favorable à l'Ukraine" lors d'une conférence de presse à Pékin avec son homologue chinois Wang Yi.
Car "évidemment la Chine joue un rôle clé dans l'indépendance, le respect du droit international y compris la souveraineté de l'Ukraine", a-t-il estimé.
La Chine, qui se présente comme une partie neutre mais dont la relation avec la Russie s'est approfondie depuis le début du conflit, prône un règlement politique pour mettre fin aux combats.
Elle est régulièrement appelée par les pays occidentaux à jouer un rôle plus actif dans ce conflit, en utilisant son influence sur Moscou.
"Cette guerre concerne l’ensemble de la communauté internationale", a lancé lundi Stéphane Séjourné à son homologue chinois, qui n'a pas évoqué spécifiquement le conflit en Ukraine dans son discours introductif en début de conférence de presse.
"Rééquilibrage"
"Nous avons une conviction, c’est qu’il n’y aura pas de paix durable si elle n’est pas négociée avec les Ukrainiens", a ajouté le ministre français. "Il n’y aura pas de sécurité pour les Européens s’il n’y a pas de paix conforme au droit international".
"C'est donc un enjeu essentiel pour nous, c'est pour cela que la France est déterminée à maintenir un dialogue étroit avec la Chine", a souligné M. Séjourné, en visite pour une journée dans la capitale chinoise.
Le ministre a également évoqué la relation économique: "Il n'est pas souhaitable de se découpler de la Chine", c'est-à-dire de réduire fortement les liens économiques entre les deux pays, a-t-il affirmé.
Ces derniers mois, plusieurs dirigeants politiques en Europe et aux Etats-Unis ont justement évoqué cette nécessité de réduire la dépendance de leur pays au géant asiatique, ce à quoi le gouvernement chinois se dit fortement opposé.
Le ministre français des Affaires étrangères a toutefois plaidé lundi pour un "rééquilibrage économique", car "nos échanges doivent aussi reposer sur une base saine et durable". Wang Yi a dit "apprécier" que son homologue rejette l'idée d'un découplage.
"Il n'est pas possible de se découpler de la Chine, et le découplage d'avec la Chine est le plus grand risque", a-t-il déclaré.
"Je crois qu'il a été prouvé, et ce sera encore prouvé, que la Chine est une opportunité et non un risque pour l'Europe. Les deux parties sont des partenaires et non des rivaux", a estimé le chef de la diplomatie chinoise.
Reprise des échanges
Après son entretien avec Wang Yi, le ministre français a été reçu au Palais du peuple par le Premier ministre chinois Li Qiang.
S'exprimant juste avant sa réunion avec ce dernier, il l'a appelé à discuter de "l'ensemble de ces situations mondiales qui fracturent et divisent aujourd'hui le monde. Je pense à la situation au Proche-Orient mais aussi en Ukraine".
"Nos deux pays ont une longue histoire et une grande civilisation, en particulier un esprit d'indépendance et d'autonomie", a salué Li Qiang. "Cela explique pourquoi la Chine et la France sont naturellement proches".
La visite de M. Séjourné s'inscrit dans le cadre du 60e anniversaire des relations diplomatiques entre la France et la Chine, et dans un contexte de reprise des échanges en face-à-face depuis la sortie du Covid.
C'est la deuxième fois en moins de six mois qu'un ministre des Affaires étrangères français se rend en Chine, après la visite en novembre dernier de la prédécesseure de M. Séjourné, Catherine Colonna.
Le président français Emmanuel Macron s'est lui rendu en Chine en avril 2023.
Lundi après-midi, Stéphane Séjourné a participé au lancement de l'exposition "Versailles et la Cité interdite", à la Cité interdite de Pékin, où sont présentés au public, jusqu'à fin juin, une soixantaine d'oeuvres d'art et objets précieux du château de Versailles.
"C'est la première fois" que des oeuvres du château de Versailles voyagent ainsi jusqu'à la Cité interdite, a expliqué à l'AFP Marie-Laure de Rochebrune, conservateur général du château de Versailles.
Vases, objets en porcelaine, tableaux, éventails... Les pièces présentées, parfois des cadeaux échangés entre les rois français et les empereurs chinois de l'époque. Elles montrent "les relations privilégiées entre la Chine et la France qui se tissent dans la seconde moitié du 17e siècle et qui durent jusqu'à la fin du 18e siècle", a souligné Mme de Rochebrune.