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La Chine retire une image insultant l'Inde sur les réseaux sociaux

buchers en inde pour les morts du Covidbuchers en inde pour les morts du Covid
Écrit par Didier Pujol
Publié le 5 mai 2021, mis à jour le 6 mai 2021

Il y a quelques jours, les autorités chinoises ont supprimé un message controversé sur l’un des comptes affiliés au Parti Communiste comparant la mise à feu de la fusée chinoise aux flammes des bûchers funéraires en Inde à la suite du Covid. Ce message a déclenché un tollé parmi une grande partie des internautes chinois et une large réprobation parmi les commentateurs à l’étranger.

Un image choquante

Le premier mai, alors que la Chine célébrait la fête nationale du travail, un montage photo présentant à gauche le lancement du module central de la station chinoise par la fusée Longue Marche 5 et à droite les crémations rituelles hindoues autour de Delhi, qui en sont venues à symboliser la deuxième vague dévastatrice de COVID-19 en Inde, était posté sur l’un des comptes officiels du gouvernement chinois. La légende, "Mise à feu en Chine versus mise à feu en Inde", a déclenché de nombreux commentaires dont certains sur les différents moyens en Chine et en Inde pour envoyer les gens au paradis.

image d'une fusée chinoise et d'un bucher en Inde

L'image a été postée par la puissante Commission centrale des affaires politiques et juridiques du Parti communiste chinois sur Weibo, l'équivalent chinois de Twitter. Les critiques ont alors fusé pendant les 5 heures lors desquelles le photo-montage était en ligne, accusant les jeunes internautes en charge du compte officiel de manque total de la décence et de discernement. En ce moment en effet, l’Inde connait une situation des plus dramatiques avec quelques 400.000 nouveaux cas reportés chaque jour, chiffre probablement en dessous de la réalité. Les morts hindous sont incinérés quotidiennement sur de grands buchers dont les photos ont fait le tour du monde.

Armée à cinq sous

Cet incident souligne la place aujourd’hui dévolue par le gouvernement chinois aux réseaux sociaux, vecteur essentiel du contrôle de l’opinion. L’une des composantes de cette politique est la mise en place dès 2004 au niveau provincial de ce qui a été ironiquement surnommée « l’armée à cinq mao » en référence au paiement supposé de cinq mao (cinquante centimes chinois et 5 centimes d’euro), pour chaque commentaire à la gloire de la Chine et du régime chinois. Dès 2007, le président Hu Jintao, proposait que le Comité Central et le Bureau Général du Conseil d’Etat constituent  des « équipes de commentateurs dotés de bonnes qualités politiques » . Ceux-ci sont dès lors recrutés parmi les bureaucrates, étudiants ou membres des ligues de jeunesse affilées au Parti mais aussi les retraités et autres volontaires dont une partie sont des étrangers, prêts à dédier du temps à commenter les réseaux sociaux au service de la Chine.

commentateurs et contrôleurs internet en Chine

Ils seraient aujourd’hui plusieurs centaines de milliers à arrondir ainsi leurs fins de mois, certains se mettant même gracieusement au service de la Chine en postant des éléments de langages reçus tous les mois sur leur boite e-mail. En 2008, le groupe était évalué à 300.000 personnes et dès 2016, on estimait le volume annuel à 488 millions de posts issus de ce groupe. Les commentaires provocateurs envers les opposants (« traitres à la solde des Etats-Unis », « cafards » de Hong Kong) ont par exemple été postés dans différentes langues sur les comptes Facebook, dont celui du journal, à la seule fin de provoquer des réactions en chaine et donc des posts patriotiques rémunérés, les intéressés ne parlant visiblement pas la langue du site attaqué.

Relations diplomatiques complexes

Bien que le site officiel chinois ait fait depuis des excuses, commentant le caractère déplacé de ce message et expliquant les commentaires xénophobes qui l’ont accompagné par les "différences culturelles entre les peuples", les relations diplomatiques entre la Chine et l’Inde sont extrêmement tendues depuis près de 70 ans en raison de plusieurs disputes frontalières dans la zone himalayenne. Le 15 juin 2020, une altercation entre troupes frontalières indiennes et chinoises a en particulier fait plusieurs morts au Ladakh, officiellement 4 chinois et 7 indiens mais probablement 5 fois plus selon les experts de ce conflit.

soldats indiens au Kashmir

Cet épisode a ravivé les accusations respectives de violation des espaces nationaux, abondamment commentées sur les réseaux chinois, avant que plusieurs posts spéculant sur les pertes subies par les troupes chinoises ne soient supprimés et des déclarations d'apaisement exprimées. Ce 9 janvier 2021, une nouvelle altercation causait à nouveau 20 blessés. C’est donc dans ce contexte que l’opinion publique chinoise, confortée par les succès remportés sur le front du Covid, s'exprime parfois violemment sur les malheurs du peuple indien. Lors de la signature des accords commerciaux sur la zone Asie en novembre 2020, il n’est pas anodin de constater que l’Inde n’ait pas rejoint l'alliance visant à contrôler les origines des produits et supprimer les droits de douane dans un espace d’échange dominé par la Chine. Aussi, même si les discours officiels tentent de montrer une ouverture et avec l'envoi en Inde d'une aide humanitaire, les commentateurs d’état et autres internautes à cinq sous n’ont pas fini de sévir.

 

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