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Coronavirus et contrats: force majeure, or not force majeure?

Utilisation clause force majeure coronavirusUtilisation clause force majeure coronavirus
Avez-vous pensé à la force majeure?
Écrit par Patricia Herau-Yang
Publié le 1 mars 2020, mis à jour le 1 mars 2020

La crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19 et les mesures mises en place par les autorités des pays les plus touchés, sont inédites. Des régions entières sont à l’arrêt, rien ne sort plus des chaînes de production de l’usine du monde. Les entreprises chinoises et leurs acheteurs, qui ne peuvent plus honorer leurs contrats commerciaux, peuvent-elles invoquer la clause de force majeure?

Des conséquences directes du virus lourdes et immédiates

Les conséquences directes du virus les plus évidentes sont:

  • Fermeture de lieux de travail et de hubs de livraison,
  • Interruptions de la supply chain et des canaux de distribution,
  • Impossibilité d’effectuer des vérifications et audits de réception,
  • Restriction de mouvements des personnels, pénurie de personnel,
  • Annulation, suspension ou report d’événements,
  • Demande régionale fortement réduite.

 

Utilisation clause force majeure coronavirus
Interruptions de la supply chain d'Apple, les limites du just-in-time 

 

La force majeure, joker en cas de défaut?

L’apparition de Covid-19 semble correspondre à la définition d’une force majeure, puisqu’il s’agit sans ambiguïté d’un événement hors du contrôle des industriels impactés. Quoique, le monde des professionnels du droit discute encore des critères cumulatifs de la force majeure: extériorité, irrésistibilité, insurmontabilité, inévitabilité et imprévisibilité…

Les contrats qui sont soumis au droit Français se réfèrent à l’Article 1218 du Code Civil qui traite de la force majeure. Mais cet article est peu détaillé et les contracts commerciaux finissent souvent par lister ce qui relève de la force majeure (technique de la casuistique), d’un commun accord entre les parties signataires du contrat. Or l’épidémie ne fait en général pas partie de cette liste limitative. On peut l’interpréter comme un Act of God, mais ça reste de l’interprétation. Par ailleurs, de nombreux contrats internationaux ne sont pas régis par le droit français.

La force majeure peut-elle jouer le rôle de joker, en permettant de se défausser de toute ou partie de ses obligations? Ca serait trop beau. Alors, pour gagner en objectivité, la preuve de la force majeure vient souvent d’un tiers, qui peut être le gouvernement, via des certificats de force majeure. Les discussions entre partenaires commerciaux victimes des problèmes de défaut de supply chain sont par conséquent à considérer au cas le cas.

 

Utilisation clause force majeure coronavirus
Le tremblement dévastateur au Sichuan en 2008

 

China Inc.: certificats en vue

Le premier certificat a ainsi été émis dans la province du Zhejiang le 2 février dernier. Il vise à protéger un fournisseur de pièces pour une usine africaine du constructeur automobile Peugeot. Le fabricant chinois en défaut faisait face à 30 millions de Yuans de dédommagement.  

The China Council for the Promotion of International Trade, émetteur dudit certificat, indique que ses certificats ont été acceptés par le passé par des gouvernements, douanes, associations professionnelles et entreprises dans plus de 200 pays. Elle s'attend donc, et fait pression, pour que ce certificat soit accepté. D’autres entreprises en Chine ont depuis déjà tenté la même opération pour se dédouaner de toute obligation. Parions que les autorités chinoises se montreront compréhensives et émettront les certificats. La réaction des partenaires commerciaux et de leurs conseils sera riche d’enseignements pour l’avenir.

Une solution alternative est d’utiliser les clauses de suspension des contrats commerciaux: les obligations ne disparaissent pas par enchantement, elles sont simplement repoussées. Mais il faut alors que le produit ou le service que votre partenaire vous doit, vous intéresse encore au même titre dans X mois…

 

Utilisation clause force majeure coronavirus
Le typhon Mangkhut arrive sur Hong Kong en 2018

 

Recommandations pour les contrats commerciaux

Quelques recommandations générales s’imposent:

  1. Relisez la clause de force majeure de vos contrats en exécution pour vérifier si vous pouvez vous appuyer sur elle si vous êtes en défaut, ou encore si votre partenaire est en défaut.
  2. Vérifiez si la clause de force majeure stipule la forme et les délais de notice. Soyez extrêmement rigoureux et assurez-vous que vous respectez ces aspects.
  3. En cas de non-performance d’un contrat, notez et documentez avec le plus de détails possible les faits: dates, parties impliquées, chiffrage des impacts.
  4. Réfléchissez aux moyens alternatifs vous permettant de respecter vos engagements (s’approvisionner auprès d’un autre fournisseur, si vous êtes un chaînon dans la supply chain).
  5. Réfléchissez à des moyens de mitigation des conséquences de la situation (recommandations inspirées de bakerxchange.com).

 

Utilisation clause force majeure coronavirus
Du pain sur la planche pour les juristes, médiateurs, arbitres et juges

 

Si dans les cas en cours la crise sanitaire est bien assimilée à un cas de force majeure, il va falloir, pour les futurs contrats comme pour les contrats en exécution (via des avenants):

  1. Repenser la rédaction des clauses en prenant en compte la crise sanitaire,
  2. Anticiper la responsabilité de la preuve et le type de preuve opposable,
  3. Définir le rôle des autorités dans le traitement du différend.

Un avis du Village de la justice peut vous éclairer, et un forum peut répondre à vos questions.

 

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