Si les 58 milliards d'excédent annoncés mercredi viennent grossir la cagnotte du gouvernement, les dépenses en 2019 devraient tout de même croître de 13% avec 150 milliards d'HK$ d'engagements exceptionnels et un prochain surplus fortement diminué.
Particularité bien hongkongaise, le budget de la ville n'est jamais déficitaire. La loi ne le permet pas, et de toute évidence, Hong Kong, rarement qualifié d'Etat providence, n'a pas un niveau de dépense publique qui le justifierait.
Pour fin mars 2019, l'excédent budgétaire est estimé par le Secrétaire aux finances à 58 milliards de HK$, ce qui portera les réserves de la ville à 1.160 milliards de HK$.
C'est un excédent important, mais deux fois moins qu'en 2018 où il atteignait 138 milliards HK$, un record. Le gouvernement explique ce chiffre modeste par la baisse des recettes sur les ventes de terrains immobiliers (la baisse du nombre de transactions pour être précis) et des droits d'enregistrement affectés par des cours de bourse défavorables. Il souligne quand même que la maîtrise des dépenses aura contribué à maintenir un excédent dans des niveaux raisonnables: 31,9 milliards de HK$ de dépenses votées n'ont pas été utilisées sur les 570 initiales.
En ouverture de son discours, le secrétaire aux finances Paul Chan a parlé d'environnement économique compliqué. La croissance a été de 3% en 2018 – dans le bas des prévisions officielles qui tablaient entre 3 et 4%. Pour 2019, le gouvernement l'estime entre 2 à 3%. Le taux de chômage par contre devrait rester à des niveaux record, il est actuellement de 2,8%, le plus bas niveau depuis 20 ans.
Il a averti que les excédents budgétaires à Hong Kong diminueraient considérablement au cours des cinq prochaines années. Du côté des recettes, parce qu'elles sont pour certaines directement impactées par la volatilité des prix (immobilier / marché financier), et du côté des dépenses avec une population vieillissante.
Le message est donc clair pour lui: Hong Kong doit réfléchir à la diversification de son économie et investir dans l'avenir.
Il cite parmi les défis et les opportunités: la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine, les changements en termes de coopération internationale, le développement des pays asiatiques et des économies émergentes, les opportunités stratégiques avec la Chine continentale (Greater Bay Area et Belt and Road Initiative), l’innovation et la technologie.
Paul Chan défend une stratégie autour de quatre objectifs: soutenir les entreprises, sauvegarder les emplois, stabiliser l'économie et renforcer les mesures sociales.
150 milliards de HK$ ont été prévus pour compléter un budget avec des dépenses récurrentes qui se situent à 440 milliards de HK$ (parmi lesquelles 60 % vont à l'éducation, la santé et les prestations sociales).
Les grands gagnants semblent être les secteurs de la santé (professionnels et hôpitaux), l'innovation et la technologie, et les ménages et les PME avec, comme à l'accoutumée, des cadeaux fiscaux exceptionnels.
Santé:
- 10 milliards dans un fonds de stabilisation pour les dépenses de santé,
- 1,36 milliards dans les services aux personnes âgées<
- 700 millions pour les équipes médicales et la rétention des talents.
Logements:
- 100.400 logements publics seront livrés dans les 5 prochaines années
- 93.000 logements privés dans les 3 à 4 ans.
Soutien aux plus démunis:
- un mois d'allocation supplémentaire (allocation vieillesse ou allocation sociale),
- chèque pour les dépenses de santé des personnes âgées (1.000HK$) et pour les étudiants dans le besoin (2.500 HK$)
Innovation:
- le développement d'un fonds de recherche avec 20 milliards d'HK$ supplémentaires pour de nouveaux projets,
- l'accueil de nouvelles entreprises technologiques à Cyberport (5,5 milliards HK$)<
- le développement d'un programme de ré-industrialisation,
- une finance plus digitale avec une réglementation pour les banques virtuelles, plus connectée à la Chine continentale et plus verte.
Cadeaux fiscaux:
- diminution de l’impôt sur les revenus (réduction de 75% dans un plafond de 20.000 HKD)
- réduction de l’impôt sur les bénéfices (75% dans la limite de 20.000 HKD)
L'excédent qui en résulterait en mars 2020 devrait être de 16,8 milliards HK$. Un chiffre faible aux yeux de Secrétaire aux finances, mais pas aussi menaçant que ceux qui suivront. Il avertit que les surplus seront d'à peine 8 milliards HK$ en 2024/2025. Et pour bien faire comprendre qu'on ne badine pas avec les surplus, il explique que la cagnotte totale de 1.160 milliards permet aujourd'hui de couvrir 26 mois de dépenses sans recette, mais demain probablement que 19 mois en raison des besoins de la population.
Les arguments pour la rigueur budgétaire et les arbitrages ne sont pas au goût de tous, certains parlent de budget social insuffisant et l'enquête de satisfaction conduite par l'Université de Hong Kong donne un taux d'approbation du budget de 47,1%, le niveau de satisfaction le plus bas depuis le lancement de l'enquête en 2008.