Seule une entreprise pharmaceutique peut stopper la propagation d'un virus en Asie, mais à quel prix? Avec The Leakers, Herman Yau filme une intrigue sur la recherche de la vérité et les pressions financières.
De tous les réalisateurs ayant officié durant l'âge d’or du cinéma de Hong Kong, Herman Yau est le seul qui parvient à conserver une productivité digne de cette période. Il est aussi l'un des rares à essayer de donner du sens à ses films en réagissant de manière directe ou subtile aux évolutions sociales et politiques qui agitent Hong Kong. Mais The Leakers se veut d’ampleur plus internationale avec des sujets larges, en tête desquels on trouve la place des lanceurs d’alerte et l’influence des grandes multinationales (les "megacorps").
Un dangereux virus originaire de la Malaisie se propage dans toute l’Asie. Seule une compagnie, la Amanah, possède l’antidote pour contrecarrer sa propagation. Mais la firme est en plein tumulte suite à l’apparent suicide de son héritier annoncé, Teo Chun Loong (Vincent Sze). L’inspecteur Lee Weng Kan (Julian Cheung) qui enquête sur l’affaire est persuadé qu’il s’agit d’un assassinat. Ses soupçons sont renforcés quand le cadet de la famille Teo, désormais nouvel héritier direct et étudiant à Hong Kong, disparait mystérieusement. Lee se rend dans le port parfumé pour le retrouver. Là, il doit faire équipe avec l’extravagant David Wong (Francis Ng). Leurs soupçons se portent rapidement sur une mystérieuse organisation qui se fait appeler les Leakers.
Le scénario de The Leakers, écrit par son habituelle comparse Erica Li, défend deux visions contraires. La promotion de la vérité, d'un côté, incarnée ici par les lanceurs d’alerte et les journalistes d’investigation. Et dans le même temps, l'idée que les "big pharma" manipulent évidemment la vérité… une des hypothèses préférées des conspirationnistes. Ainsi, la firme n’hésite pas à provoquer la mort de multiples individus pour augmenter ses gains. Cette posture ressemble un peu à quelqu'un qui voudrait mettre en avant la science dans un film en faisant prouver à ses personnages que la terre est plate… La clarté du message "pro-vérité" est rendue encore plus floue avec les motivations des personnages au cœur des révélations, ils sont plus poussés par leurs frustrations familiales que par de nobles idéaux affichés. En découle un propos plein de bonnes intentions mais à la force considérablement amoindrie.
Si l’on accepte ce postulat discutable, The Leakers est heureusement un divertissement réalisé avec la compétence qu’on est en droit d’attendre de la part d’Herman Yau et de ses équipes. La dynamique Julian Cheung/Francis Ng marche bien, les personnages sont humanisés, les séquences d’action sont solidement menées et le contexte malaisien apporte un peu de nouveauté visuelle au spectacle. Par moments, les automatismes du genre (narratifs et mise en scène) reviennent trop facilement, laissant à penser qu'en dépit du professionnalisme des équipes, il manquait une certaine passion. Ce type de films étant de plus en plus rare avec les difficultés économiques de l’industrie, il serait pourtant injuste de ne pas le saluer.
Photos courtesy: GSC Movies