John Neumeier est un géant et grand maître de la danse, un chorégraphe légendaire unanimement respecté et admiré qui a profondément transformé le monde du ballet. Le Hong Kong Art Festival lui rend un bel hommage avec une rétrospective sur son œuvre alors qu’il fête cette année ses 80 ans et 45 ans de règne à la tête du ballet de Hambourg.
"Mon monde est la danse" proclame sans ambiguïté John Neumeier. Né en 1939 à Milwaukee dans le Wisconsin. Il est américain. C’est dans cette ville qu’il commence la danse. Il continuera sa formation à Chicago puis à la Royal Ballet School de Londres et à Copenhague. Sa carrière prendra son essor en 1963 lorsqu’il suivra John Cranko (1927-1973), rénovateur du ballet romantique à Stuttgart en Allemagne où la danseuse-étoile de la compagnie Marcia Haydée le fera engager. Il y deviendra soliste et signera son premier ballet avant de devenir le chorégraphe principal de la compagnie en 1969 et de passer à l’Opéra d’Etat de Hambourg en 1973. Il y créera en 1978, l’Ecole de danse du Ballet de Hambourg.
Il est aujourd’hui toujours directeur du Ballet de Hambourg, tout en étant fréquemment invité par les plus grandes compagnies internationales dont le Ballet de l’Opéra de Paris. Il a créé plus de 100 ballets dont les plus célèbres de l’histoire de la danse. En 2017, il est lauréat du premier Prix de Lausanne récompensant « l’ensemble d’une œuvre ». Il sera donc en mars 2019 à Hong Kong pour présenter une rétrospective Le monde de John Neumeier, Casse-noisette et Beethoven project.
Une inspiration puisée chez les grands compositeurs et littérateurs
La force de Neumeier est l’étendue de son inspiration qu’il puise à la fois dans la littérature, la philosophie et surtout la musique dont il a une connaissance approfondie. Si sa chorégraphie reste assez classique favorisant la narration, elle explore par contre les profondeurs de la nature humaine par le jeu des danseurs qu’il met en avant, développant souvent les multiples personnages d’une pièce. Il donne ainsi une nouvelle lecture des classiques comme dans La Dame aux Camélias, adaptation de Dumas Fils qu’il chorégraphia en 2013 à l’Opéra de Paris.
"L’idée dans cette histoire est celle du sacrifice de l’amour, un amour qui est tellement fort qu’il aboutit à la mort de la dame en quelque sorte. Il y a un sens symbolique, c’est un défi pour une compagnie de danse, car ce n’est pas seulement une œuvre pour une seule ballerine mais une œuvre pour un ensemble. L’œuvre démontre qu’une compagnie peut créer une nouvelle forme de ballet dramatique qui n’est absolument pas un ballet du 19ème siècle. L’histoire est du 19ème, mais la structure est moderne et la scénographie très simple. On voit plusieurs angles de l’histoire en même temps, il y a une étendue de personnages intéressants et même les premiers rôles peuvent être interprétés de manières très différentes. Ce que nous voulons faire à chaque représentation, c'est recréer l’histoire de façon nouvelle."
Neumeier pense aussi que la musique de Chopin qu’il a choisie est idéale car elle montre en parallèles les deux côtés de Chopin, la frivolité et la gaieté de l’époque et en même temps, en raison de son origine polonaise et sa maladie, une ombre et grande tristesse qui expriment le sens profond de La Dame aux Camélias.
Une relation approfondie et presque intime avec la musique
Son talent vient aussi de sa profonde connaissance de la musique qui lui permet de chorégraphier ces œuvres classique d’une façon nouvelle et très approfondie. Le meilleur exemple est Gustav Mahler dont il a chorégraphié toutes les symphonies, même celles qui semblaient presque impossibles à chorégraphier comme en 2015, Le chant de la terre qu’il a demandé à Brigitte Lefèvre, directrice de la danse à l’Opéra de Paris.
"John Neumeier est un maître, un maître dans le studio, un maître dans la maîtrise qu’il a de son art, il a une relation presque intime avec Gustav Mahler, il l’a prouvé, il a fait plusieurs symphonies. Il m’a fait savoir plusieurs fois qu’Il avait envie de chorégraphier Le chant de la terre. Quoi de plus beau ! Cela permet de réunir une très belle distribution de danseurs et de chanteurs et cette sensibilité qui est si forte, si émotionnelle je veux pas dire mystique, mais tellement reliée à l’univers de la danse, la musique, l’espace qui habite John Neumeier et évidemment chorégraphier. Le chant de la terre, c’est extraordinaire, même aux yeux des musicologues cela doit paraitre invraisemblable, mais c’est ce qu’arrive à faire John Neumeier."
À Hong Kong, sa rétrospective montrera des extraits de ses grandes pièces, comme La dame aux camélias, Mort à Venise, Peer Gynt, des ballets symphoniques sur des musiques de Bach, Mahler et de son hommage intense autant physique que psychologique au dieu de la danse, Nijinski. Il montrera aussi deux ballets complets , Casse-noisette et le Beethoven project, une autre immersion dans la musique du grand compositeur, notamment dans ses Variations héroïques et sa Symphonie no 3
John Neumeier et le Ballet de Hambourg au HKFA
The Nutcracker, les 13 et 15 Mars
Beethoven Project, les 19 et 20 Mars
The Word of John Neumeier, les 23 et 24 Mars