Pays ouvert sur la mer s’il en est, le Vietnam a quelques îles enchanteresses à revendre. Il y a bien sûr Phu Quoc, au Sud, avec ses plages de cartes postales. Il y a Con Dao, l’ancienne Poulo Condor, avec ses célèbres cages à tigre. Et puis, si l’on prend la peine de remonter le littoral à hauteur de Quang Ngai, il y a aussi Ly Son. Que les amateurs de bronzette sur sable blanc passent leur chemin, Ly Son n’a rien d’un paradis tropical d’opérette, et c’est tant mieux. Ly Son, c’est une île volcanique, ceinturée de récifs. C’est une île âpre et sauvage qui, dans son mélange de rudesse et de douceur, a un je-ne-sais-quoi de celtique : un paysage rugueux, sculpté par le vent du large, qui aurait fait le bonheur d’un Gauguin.
L’île n’est accessible que par la mer. Il en coûte, à qui veut s’y rendre, trois quart d’heure d’une traversée chaotique à bord d’un vieux rafiot qui fait la navette depuis le petit port de Sa Ky.
C’est à l’ouest de l’île principale que l’on débarque, dans un petit village de pêcheurs du nom d’Anh Vinh qui, avec celui d’Anh Hai, se partage les 20.000 habitants du district, lequel comprend également l’îlot de Dao Be, à quelques encablures de là.
Le paysage, lui, se résume à d’anciens cratères qui surplombent une incroyable mosaïque de champs de sable blanc, eux-mêmes séparés par de petits murets de pierre volcanique et parsemés ça et là de cocotiers : vu sous une lumière vespérale, c’est absolument superbe !
Au pied des falaises
Les amateurs de baignade, eux, doivent aller tout au nord de l’île, à Hang Cau, au pied d’immenses falaises volcaniques qui tombent tout droit dans la mer, sur un tapis de coraux blancs. L’eau y est presque irréelle à force de limpidité.
On est évidemment bien loin de « la » plage de rêve, façon paradis tropical de supermarché. L’endroit ne se prête pas spécialement au style cocktail-transat-crème à bronzer, mais on ne s’en plaindra pas, bien au contraire.
On n’y trouve pas non plus de ces marchands du temple pour île paradisiaque qui vous harcèlent pour vous refourguer le pire de leur camelote. Non, la seule chose que Ly Son propose en guise de souvenir est aussi la seule chose qui - terre basaltique oblige - y pousse, et à foison pour le coup : de l’ail et de l’oignon.
De l’ail, des pagodes, un phare
Les spécialités culinaires du cru s’en ressentent, d’ailleurs, et mieux vaut ne pas fixer de rendez-vous romantique juste après y avoir goûté. Cela étant, celles et ceux qui se trouvent à Ly Son et qui souhaitent éviter d’avoir l’haleine trop chargée à force d’aillade seront certainement reconnaissants au Petit Journal pour ce tuyau : il existe, dans le village d’Anh Vinh (voir la carte ci-dessous), un petit boui-boui qui sert tous les jours, entre 13 et 16 heures, une salade de canard aux mangues et aux herbes aromatiques.
C’est... Même réunis tous ensemble, les synonymes du mot « sublime » ne suffiraient pas à rendre compte de ce moment d’extase gustative ! C’est à tomber à la renverse, à se damner, à en perdre la raison : on en redemanderait à genoux. Voilà en tout cas une excellente raison de se rendre à Ly Son et d’y retourner, l’écume aux lèvres.
De bonnes raisons de se rendre à elle, Ly Son n’en manque de toute façon pas, mais elle n’en fait pas du tout étalage, ce qui lui donne encore plus de séduction.
Elle abrite néanmoins un certain nombre de sites qui passent pour être des attractions touristiques : la porte de To Vo, qui est une arche en pierre particulièrement convoitée par les amateurs de photos kitsch ; la montagne Thoi Loi qui domine le tout du haut de ses 170 mètres d’altitude et qui, en tant que tel, offre un panorama superbe ; la pagode Hang, qui est nichée dans une grotte, au pied d’une falaise ; la pagode Duc et sa statue géante qui semble veiller jour et nuit sur la population ; le phare, qui du haut de ses 45 mètres, est le plus haut de tout le pays.
Il faut bien convenir qu’on a vite fait le tour du propriétaire : l’île est toute petite, à peine 10 kilomètres carrés. Mais c’est un monde complet, une entité à part entière où il fait décidément bon vivre.
Au petit matin
C’est, comme souvent au Vietnam, au petit matin, que l’île dévoile tout son charme. Rien ne vaut alors une balade le long de la côte, à l’heure où la brume s’estompe.
Le petit marché qui jouxte le port est délicieusement animé et il fait bon en arpenter les étals à la recherche de rien du tout si ce n’est de cette atmosphère unique, composée de couleurs, d’effluves et de cris, qui fait pousser des cris d’orfraie ou qui enchante, selon que l’on est très à cheval la propreté ou pas du tout.
On peut ensuite s’offrir une petite virée à Dao Be. Il suffit pour cela de prendre une petite navette à l’embarcadère principal : la traversée dure dix minutes à peine.
Un îlot enchanteur
Une fois sur place, c’est l’enchantement. L’îlot est presque inhabité. Quelques maisons de pêcheurs, une petite école dont on se demande bien à quels enfants elle est destinée, un temple dédié à la Baleine, une jetée où accostent les bateaux.
Sinon, des parcelles de sable blanc, séparées par des murets de pierre volcanique, quelques cocotiers, quelques bananiers, des filaos. Et par-dessus-tout, une légère brise marine, qui ne fait que donner un peu plus de douceur et de bonhommie à l’endroit.
On revient de là avec l’impression d’avoir touché un petit coin de paradis, où le temps est suspendu. C’est bucolique et revigorant à souhait.
« Et la mer se déchire, infiniment brisée par des rochers qui prirent des prénoms affolés », chantait Jacques Brel à propos des îles Marquises : là-aussi, d’anciens volcans surgissant des eaux.
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