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Une affaire de viol suspicieusement conclue ?

Hyderabad viol accuses tues policeHyderabad viol accuses tues police
Credit : Unsplash
Écrit par Isabelle Bonsignour
Publié le 9 décembre 2019, mis à jour le 19 décembre 2023

Ces derniers jours, l’Inde a été secouée par plusieurs affaires de viol qui ont ravivé le souvenir de 2012 lorsqu’une jeune femme avait été violée dans un bus à Delhi. Les chiffres du National Crime Records Bureau dans son rapport pour l'année 2017 (lire notre article sur le sujet) ne sont pas encourageants : il établit que 32 559 cas de viol ont été rapportés à la police, soit une moyenne de 92 viols par jour. De plus, dans 93% des cas, la victime connaissait ses agresseurs. Toujours selon le même rapport, le nombre de crimes commis envers les femmes en 2017 a augmenté de 6% par rapport à 2016.
 

Les faits 

Vendredi au petit matin, quatre hommes accusés du viol et meurtre d’une jeune femme à Hyderabad ont été abattus par la police lors d’une reconstitution des événements. La découverte du corps à moitié brûlé et violé de la jeune vétérinaire avait soulevé des protestations véhémentes dans toute l’inde. 

 

Deux autres cas ont aussi ravivé les tensions sur ce sujet : A Unnao dans l’Uttar-Pradesh, une jeune femme qui avait déposé une plainte pour viol vient de décéder des suites de ses blessures après avoir été incendiée par les hommes qu’elle avait identifiés. Les accusés avaient été libérés sous caution quelques jours plus tôt. 

 

 

A Tripura, dans le nord est de l’Inde, une jeune fille de 17 ans a été brûlée vive par les hommes qu’elle avait dénoncés alors qu’elle se rendait au commissariat de police pour une audition. Elle avait déposé plainte contre son petit ami et des copains après avoir été séquestrée et violée à plusieurs reprises par ces derniers. La foule s’est rassemblée devant l'hôpital dans lequel la victime avait été admise et a attaqué l’accusé et sa mère (ces derniers ont été emmenés sur les lieux par les voisins ayant tenté de secourir la jeune fille).

Ces deux derniers événements ont à nouveau mis en évidence les risques encourus par les femmes qui ont le courage d’aller porter plainte à la police suite à des violences subies ainsi que la lenteur du système judiciaire. 


Le processus, notamment dans le cas de plaintes pour viol, est particulièrement lent. En 2017, le National Crime Records Bureau a recensé 14 406 cas de viol en cours de traitement au début de l'année auquel se sont ajoutés 32 559 nouveaux cas. Fin 2017, 13 765 affaires étaient toujours en cours soit 29,3%. Attention, ces chiffres ne prennent en compte que les cas enregistrés par la police. Ils ne sont pas comparables aux statistiques qui circulent actuellement en France qui prennent aussi en compte les tentatives de viol non rapportées à la justice (93 000 en 2016 selon l’ONVFF - Observatoire National des Violences Faites aux Femmes)


 

Légitime défense ?

L’annonce du décès des quatre accusés dans l’affaire de viol d’Hyderabad a soulevé de nombreuses questions gênantes. Il est vrai que certains députés ont déclaré lors d’une réunion de l'assemblée qu’il fallait livrer ces hommes à la fureur de la foule. Heureusement, cet avis extrême n’est pas partagé. Cependant, la clôture rapide de l’affaire ne donne pas une image positive du système judiciaire indien. 

 

Le Chief Justice of India (CJI), Sharad Arvind Bobde a affirmé que revanche et justice étaient deux choses séparées et que rendre la justice ne devait pas prendre la forme d’une revanche. 

 

Tweet du CJI, Bobde

 

 

De même, les membres d’organisation pour la lutte contre les violences faites aux femmes ont rappelé que ce n’est pas le type de justice que les victimes souhaitent. 
 

 

Mais, de nombreuses personnes politiques ont loué l'opération policière et considèrent que cela servira de leçons à de potentiels violeurs.
 

 

Selon le Times of India, le policier en charge de l'enquête a déjà été impliqué dans un incident similaire en 2008. Trois hommes accusés d’avoir perpétré une attaque à l’acide sur une jeune femme avaient été abattus par la police alors qu'ils avaient été emmenés sur la scène du crime pour une opération de recherche de preuves. Dans les deux cas, la même raison est invoquée : les accusés ont tenté d’attaquer et la police a riposté en légitime défense.

 

En janvier 2019, quatre experts du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Droits de l’Homme ont exprimé leur inquiétude envers plusieurs cas d’homicides extra-judiciaires ayant eu lieu dans l’Uttar Pradesh et a appelé la justice indienne à faire son travail plus rapidement.


 

De nouvelles mesures pour assurer la sécurité des femmes ?

Ce dimanche à Pune, les chefs de la police des états indiens se sont réunis en présence de Narendra Modi, Premier ministre et d’Amit Shah, ministre de l'Intérieur pour discuter de la sécurité des citoyens et en particulier de celle des femmes. Le Premier Ministre devrait annoncer dimanche soir les conclusions de la conférence.

 

Par ailleurs, le ministre de la Justice vient d’annoncer qu’il allait écrire une lettre aux Chief Ministers des Etats de l’Union indienne ainsi qu’aux présidents des Hautes Cours pour leur demander de veiller à terminer les enquêtes en deux mois maximum dans les cas de viol et de ceux réglementés par la loi sur la protection des enfants contre les violences sexuelles (Protection of Children from Sexual offence (POCSO) Act). Le jugement devra être rendu dans les six mois qui suivent le dépôt d'une plainte.

 

Tweet du ministre de la justice

 


 

 

 

 

 

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