Une prouesse médicale vient d’être atteint par une équipe spécialisée en Procréation Médicalement Assistée (PMA) dans une clinique indienne : une femme de 73 ans, ménopausée depuis plus de 25 ans, vient de mettre au monde des jumelles après une grossesse surveillée par trois équipes médicales. C’est probablement la femme la plus âgée à avoir mis au monde des enfants (comme la mère n’a pas de certificat de naissance officiel, l’équipe médicale n’est pas sûre de son âge). L’ancienne détentrice du record avait 66 ans lors de la naissance.
Une fécondation in vitro réussie, nouveau record dans le Guiness book
Les bébés ont été conçus avec un ovule provenant d’une donneuse et le sperme du mari, âgé de 80 ans. La conception a été un succès dès la première tentative de fécondation in vitro. Pour s’assurer du succès de la grossesse, le médecin en charge a hospitalisé la future maman et réuni à son chevet trois équipes pour la suivre au quotidien : une en charge de la nutrition, une deuxième en charge de la santé de la mère et la dernière pour le suivi de la grossesse.
Les parents, anciens fermiers, étaient dans une maison de retraite de l’Andhra Pradesh, dans le sud de l’Inde, lorsqu’ils décidèrent de s’adresser au docteur Shankar pour une tentative de fécondation in vitro après avoir vécu plus de cinquante ans ensemble sans réussir à avoir d’enfant. Ce dernier a avoué aux différents médias avoir hésité au premier abord, puis, après avoir été rassuré sur les capacités de sa patiente à supporter une grossesse, il a donné le feu vert pour une procréation médicalement assistée.
Rappelons que la PMA est un gros marché en Inde et alimente un important tourisme médical vu son faible coût par rapport à d'autres pays. La procédure est réglementée par la loi, The Assisted Reproductive Technology Bill, mais aucun âge limite n'y est stipulé. Ce qui permet au docteur Shankar d’affirmer qu’il est en règle.
Les jumelles sont nées par césarienne et la mère est toujours sous surveillance médicale : “C’est le plus beau jour de notre vie”, ont déclaré les “jeunes” parents. Mais, la joie semble trop intense pour eux : le lendemain de la naissance, le père, a subi une attaque cardiaque et est actuellement hospitalisé.
De plus, le couple, aujourd’hui retraité, n’avait pas les moyens de financer un tel traitement et on soupçonne que ce soit la clinique qui ait pris intégralement en charge les frais associés.
Faut-il s’en réjouir ? Record médical ou oubli de l’éthique médicale ?
La naissance a soulevé de nombreuses questions dans la société indienne sur l’éthique d’une telle prouesse et sur le futur des jumelles :
- L’attrait de la notoriété a-t-il voilé les yeux de l’équipe médicale et leur a-t-il fait oublier que la naissance est le début de la vie et pas l’aboutissement d’une opération médicale ?
- A 73 et 80 ans, avec une maigre pension de retraite, comment les parents vont-ils pouvoir s’occuper des bébés et financer leur éducation ?
Lepetitjournal.com Bombay s'est livré à un petit micro-trottoir digital pour essayer de comprendre le ressenti de la population indienne.
Nombreux sont les Indiens qui sont choqués par la décision des parents et des médecins et considèrent que cette grossesse et la naissance n’auraient pas dû avoir lieu : “C’est très égoïste de leur part de donner la vie alors que la leur est presque terminée.”, déclare une jeune femme. Un jeune entrepreneur renchérit : “C’est injuste de la part des parents de prendre une responsabilité qu’ils ne seront probablement pas capables d’assumer. ”
Une des personnes interrogées explique que, comme l’a souligné le docteur en charge du traitement, en Inde, la pression sociale et familiale pour avoir des enfants est très forte surtout dans les campagnes. "Cette femme a été considérée toute sa vie comme une “incapable” parce qu’elle ne pouvait pas avoir d’enfants. Elle s’est sentie obligée, même après plus de cinquante ans de mariage, de prouver au yeux de sa communauté qu’elle était une “vraie femme” et pouvait avoir des enfants ! C’est triste de voir que l’identité d’une femme dans notre société passe encore par le fait d’être une mère.”, déclare-t-elle.