L’inauguration s’est faite le 2 décembre dernier, en présence de Daw Aung San Suu Kyi et de tout une ribambelle d’officiels, ministres et hauts fonctionnaires : la Birmanie a ouvert son premier centre technique d’enseignement médical et de recherche, sur le campus de l’université de Médecine (1), dans Yangon. Le nouveau bâtiment est imposant : 8 étages, 60 mètres de long pour 30 de large. Ils disposent d’un auditorium et d’un amphithéâtre pour des cours et des conférences, d’un laboratoire, de nombreuses salles d’enseignement technique équipées de simulateurs numériques, de mannequins, de matériel médical, d’autres salles destinées à l’enseignement théorique... et même de chambres tout au sommet pour accueillir des conférenciers ou des chercheurs et enseignants invités. Décidée en 2017, la construction du centre s’est faite entre janvier 2018 et septembre 2019, pour un coût total de 12 milliards de kyats (environ 7,3 millions d’euros) supporté pour les trois-quarts par l’état fédéral et pour le dernier quart par divers bailleurs.
Comme l’explique le recteur de l’université de Médecine (1) de Yangon, le professeur Zaw Wai Soe, « cet outil va transformer l’enseignement de la médecine en Birmanie. Nous avons enfin du matériel de niveau international. Jusqu’ici, tout se faisait en imaginant les situations, nous ne pouvions pas réellement nous entraîner, nous manquions de savoir-faire pratique. Maintenant, avec les simulateurs et les mannequins, nous allons pouvoir travailler beaucoup plus les gestes médicaux, tant pour les médecins que pour les infirmiers/infirmières les aide-soignant(e)s. Nous allons pouvoir développer une culture de respect du patient et de sécurité dans les interventions médicales. Nous voulons que cela bénéficie à la fois aux soignants aujourd’hui en formation mais aussi à ceux qui ont déjà leurs diplômes mais ont besoin d'une mise à niveau. »
Une vision que partage bien sur le ministre de la Santé et des Sports, U Myint Htwe, pour qui « avec ce laboratoire, ces simulateurs, tout ce matériel, c’est un véritable nouveau départ pour le secteur de la santé dans le pays. C’est le tout premier centre du genre en Birmanie. Maintenant, il faut en tirer le meilleur parti afin de bien l’entretenir et de bien l’utiliser, et même de le développer progressivement ». Le ministre a d’ailleurs annonce qu’un centre similaire allait être construit à Mandalay, sans préciser quand exactement.
Les enseignements prévus ne se limitent cependant pas aux aspects techniques. Des cours d’éthique et de communication seront par exemple assurés. Parler aux malades, prendre le temps de bien leur expliquer ce qu’ils ont, pourquoi et donc comment se soigner et prendre leur traitement correctement, mais aussi comment modifier leurs comportements pour éviter certaines maladies… sont autant d’informations importantes pour des soins efficaces, mais que l’écrasante majorité des soignants birmans négligent totalement, lorsqu’ils n’y voient pas tout simplement une forme de déchéance à devoir « s’expliquer » devant leurs patients. C’est donc bien toute une culture médicale qui est à créer, et beaucoup de formation va être nécessaire. En tout, se sont 9 formations non-techniques et 16 formations techniques qui seront dispensées dans le centre, lequel est d’ores et déjà associé à 16 universités de médecine du pays et à 50 écoles de formation infirmière.
Enfin, une composante de recherche médicale est également mise en place dans l’établissement. Car, estime Daw Aung San Suu Kyi, « la recherche est aujourd’hui un élément vital du développement d’un pays. Le niveau de nos universités augmente dans les classements mondiaux mais baisse en comparaison des autres pays de la région. Pourquoi ? Parce que dans ces autres pays, les universités se développent et s’améliorent encore plus vite que chez nous car elles se consacrent non seulement à l’enseignement mais aussi à la recherche. C’est le modèle que nous devons suivre. »