Vestige d’une Allemagne nazie qui inscrivait l’architecture au cœur de son projet de mise en place de « l’ordre nouveau », retour sur l’histoire de ce stade historique qui trône au cœur du quartier de Charlottenburg-Wilmersdorf.
Un désir de grandeur
Tout commence par l’arrivée d’Adolf Hitler au pouvoir le 30 janvier 1933. Dans un pays écrasé par la crise économique et le chômage, le leader nazi devient chancelier, 6 mois après avoir obtenu la majorité des voix au parlement. Il va rapidement anéantir l’opposition (notamment grâce à l’incendie du Reichstag en février 1933) et en juillet le parti national-socialiste devient le seul légal. La mort du président Hindenburg va permettre d’assoir définitivement la position d'Hitler au sommet de l’Allemagne. Désormais il ne va avoir de cesse de modeler Berlin (et l’Allemagne) à la hauteur de son délire impérialiste. Grand amateur d’art (refusé 2 fois aux Beaux-Arts de Vienne avant de se lancer dans la politique), et s’imaginant un temps architecte, Adolf Hitler va s’acharner à faire de la capitale allemande le symbole du succès de l’idéologie national-socialiste. Un projet pour lequel il va s’appuyer sur un de ses intimes : Albert Speer, premier architecte du Reich.
En accord avec la vision d’Hitler, ce dernier va rapidement développer la représentation matérielle de la grandeur du IIIème Reich, que l’on qualifiera plus tard d’architecture nazie. Un mélange d’utilitarisme, de gigantisme architectural et de façade épurée se croise avec une fascination des monuments antiques. C’est en effet une période qui fascine Hitler, qui a construit tout le discours de l’idéologie aryenne sur l’idée que les nazis seraient les glorieux descendants des civilisations antiques. Cette architecture traduit donc directement la volonté du Führer de magnifier le peuple allemand et de porter son discours « d’ordre nouveau ». C’est ainsi que va être lancé l’un des plus grands projets architecturaux du 20ème siècle : la Welthauptstadt Germania, le projet de renouvellement de la capitale allemande, dont Albert Speer est le principal auteur. Salué à l’époque par la presse internationale, ce projet extrêmement ambitieux vise à faire de Berlin une représentation moderne d’une capitale romaine, au cœur du future empire germanique. Traversé d’un cardo (axe Nord -Sud) et d’un decumanus (axe Ouest-Est), ce projet prévoyait la construction d’une multitude de bâtiments à la hauteur de la mégalomanie nazie. Un projet qui ne verra jamais le jours en raison de la guerre et de la défaite nazie, mais qui permet de se représenter la folie architecturale d’Adolf Hitler et d’Albert Speer.
Les "Jeux de la Honte" de 1936
En 1936, les Jeux Olympiques arrivent à point nommé pour Hitler : après 3 ans au pouvoir, c’est l’occasion de faire étalage de la supériorité du mode de vie à l’ère du nazisme. Dans la continuité de sa fascination pour l’antiquité classique, il y voit l’opportunité de démontrer la supériorité de la race aryenne au travers du sport, dans la lignée directe des premiers affrontements sportifs qui se déroulaient sur le mont Olympe dans la Grèce antique. Ces Jeux ont donc une signification politique très importante pour Hitler. Le documentaire Les Dieux du Stade de Leni Riefenstahl fait à cette occasion la part belle à cette grandeur architecturale caractéristique du régime nazi.
Pour accueillir les délégations du monde entier, Hitler commande alors la construction d’un gigantesque Olympiastadion à l’architecte Werner March sur les bases de l’ancien stade Deutsche Stadion. Dans la lignée directe du style nazi, le stade se veut être le monument majeur de ces jeux, traduisant la puissance de l’Allemagne. Après un chantier ayant coûté près de 42 millions de marks, le stade est achevé pour la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques. Comportant plus de 110.000 places, ce stade à proximité du centre de Berlin est alors l’un de plus grands du monde. Son entrée est composée de deux gigantesques tours de 35 mètres de haut, sur lesquelles sont suspendus les anneaux olympiques. Un stadium qui va devenir le symbole de l’architecture nazie à travers le monde.
Le stade aujourd'hui
La fin de la guerre et la défaite du IIIème Reich vont empêcher la construction des différents bâtiments nazis. Mais le Stadium Olympique lui est déjà là. Délaissé durant une grande partie de la guerre froide, le stade est totalement rénové en 1974 pour la Coupe du monde de Football qui se déroule en Allemagne de l’Ouest. Une histoire avec le ballon rond qui va se poursuivre avec la Coupe du Monde de Football en 2006. A cette occasion sont installées les iconiques enceintes de toit sur l’ensemble des tribunes, qui donnent au stade sa forme si particulière. Désormais, le stade abrite le club de football Hertha Berlin, qui évolue en première division de football allemande, la Bundesliga. Un stade qui vibre donc désormais aux chants des supporteurs des bleus et blancs. Vestige de l’architecture nazie, il est également possible de le visiter, un circuit étant prévu à cet effet.
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