À 33 ans, Zakaria Mansour tire de ses années de Paris et de Barcelone le portrait d’un homme passionné qui cultive ses ambitions sans rien sacrifier de ses envies personnelles. Entrepreneur tech, créateur de Bsport, une plateforme SaaS qui accompagne les studios de sport collectif, il raconte sans détour les hauts et les bas d’une carrière construite sur la mobilité, la résilience et le goût du risque.
Barcelone, c’est d’abord une histoire ancienne pour Zakaria. “J’ai toujours voulu venir à Barcelone, je passais au moins un mois par an ici depuis que j’ai 18 ans,” confie-t-il. Ce rêve, concrétisé à 25 ans lors d’une première expatriation en 2016, s’ancre vite dans la volonté de vivre ailleurs tout en apprenant le métier “sur le terrain, en mode soldat.” Pourtant, ses premiers pas sont laborieux ; ses diplômes parisiens sont peu reconnus, et il débute dans un call center, loin de ses ambitions commerciales et technologiques.
“Je perdais mon temps, clairement, je n’étais pas venu pour ça.” Rentré à Paris, il rebondit — puis, grâce à une start-up barcelonaise, progresse vite jusqu’à devenir Head of Sales. Cette montée fulgurante, il la doit à son sens du travail et sa faculté d’adaptation. “Le CEO était assez impressionné par ma capacité de travail, surtout par rapport à l’environnement général qu’il peut y avoir à Barcelone.” Mais Zakaria ne se contente pas de gérer, il veut créer : “Faire des jolis tableaux Excel, je sais faire, mais je voulais vraiment être un métier de terrain.” Il fonde Bsport, où il retrouve sa dynamique commerciale et son esprit d’indépendance.
Un retour à Barcelone marqué par l’obstination
De 2017 à 2020, Zakaria alterne entre Paris et Barcelone, vivant parfois chez ses parents faute de revenus, affrontant le “choc thermique” du retour parisien après un été barcelonais. “Revenir chez mes parents, c’est assez dur, pour être transparent. Je suis parti de chez eux à 18 ans et… revenir en banlieue parisienne, en plein hiver, c’est un choc.” Malgré ces défis, son projet de revenir à Barcelone ne vacille jamais.
Je m’étais dit qu’avant 30 ans, je devais être revenu à Barcelone. Je travaillais dur à Paris pour ensuite revenir.
Bsport se développe, il saisit l’opportunité du déconfinement en 2020 pour s’installer définitivement à Barcelone, au lendemain de la réouverture des frontières.
Les défis de l’expatriation et du quotidien
Trouver un logement à Barcelone est un autre parcours du combattant. Les prix ont explosé, “C’est les prix de Paris sans aucun problème,” observe-t-il ; mais il profite d’un marché post-Covid encore accessible. Il trouve “un atico Plaça Catalunya à 750 euros par mois, exceptionnel parce que personne ne le louait pendant le Covid”.
Côté professionnel, Bsport connaît une croissance rapide, “quand on est arrivé en 2020, on était 4, aujourd’hui on est 180.” Pourtant, la ville révèle ses ambivalences : “Barcelone manque de profils socio-professionnels élevés comparés à Paris ou Londres… Ici, il faut vraiment vouloir faire carrière et se donner les moyens.” Il dénonce la tentation de “se perdre dans la fête et le lifestyle barcelonais”, expliquant qu’on peut vite s’épuiser “à sortir littéralement tous les soirs”.
La douceur du climat, les promenades à pied et la “ville agréable” contrastent avec le bruit et la pression de la Barceloneta, le quartier touristique qu’il évite : “Pour moi, Born, Gothique, c’est totalement exclu. Mon quartier, c’est Sarrià- San Gervasi ou Gràcia, un paradis pour bobos de 30 ans, ce que je suis aujourd’hui et que j’assume”, dit-il en rigolant. Aussi, il entretient un va-et-vient régulier avec Paris : “Quand tu as fait le tour de Barcelone, que tu es en down, tu peux rentrer à Paris… Ça aide, surtout dans les moments où tu te sens un peu seul ici”.
Son réseau social demeure entre les deux villes, amis, famille, partenaires professionnels ; et il s’appuie sur cette mobilité pour garder un équilibre émotionnel et mental. “Barcelone, c’est aussi une ville dans laquelle tu peux te sentir seul très vite. C’est difficile de créer des liens forts, des liens profonds avec les gens qui viennent souvent pour une saison ou deux ans avant de repartir”.
No te pierdas en Barcelona
Si son parcours est jalonné de périodes de doute et de résilience, Zakaria souligne l’importance des pauses et du retour aux essentiels. Il revendique une volonté de construire, d’évoluer et d’investir dans des quartiers plus tranquilles. Il songe même à acheter un appartement, véritable ancrage dans cette ville qui l’a vu grandir et s’affirmer. Une ville qu’il décrit aussi comme « compliquée lorsqu’on n’est pas sûr de ce qu’on veut ».
Il se souvient d’ailleurs d’une mise en garde entendue à ses débuts : son avocate, qui l’accompagne toujours, avait lancé à l’un de ses stagiaires fraîchement embauché en CDI : « No te pierdas en Barcelona », autrement dit, « ne te perds pas à Barcelone ». Une phrase qui résonne encore pour lui aujourd’hui.
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