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CIDOB : "La France et l’Espagne ont des défis politiques en commun" 

 Francesc Fàbregues et Oriol Farres cidob Francesc Fàbregues et Oriol Farres cidob
Francesc Fàbregues et Oriol Farres
Écrit par Alexandra Pichard
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 25 juillet 2018

Cette année, à l’occasion des 50 ans de Mai 68, le Barcelona Centre for International Affairs CIDOB, le plus ancien think tank espagnol, a consacré toute une partie de son "Anuario Internacional" à l’étude de la France. L’occasion de rencontrer Francesc Fàbregues et Oriol Farres, en charge de l’édition, et d’en savoir plus sur leur vision des relations politiques entre la France et l’Espagne. 

 

Fondé en 1973, le think tank CIDOB est un des plus influents d’Espagne et d’Europe occidentale. Ce qui était au début un centre de documentation sur les relations internationales est devenu un centre de recherche et de réflexion, qui réalise des enquêtes, des publications, des conférences dans ce domaine, sur différentes zones géographiques, comme l’Asie ou l’Amérique latine, et différents sujets, notamment les migrations et les villes globales. En ce moment, CIDOB mène à bien six projets de recherche et le centre, qui se veut indépendant, est aujourd’hui financé à l’échelle européenne, au vu de l’étendue de ses domaines de recherche. Chaque année, CIDOB publie un "anuario" qui résume les publications réalisées et analyse la situation d’un pays en particulier. 


 
Pourquoi avoir choisi de se centrer sur la France pour réaliser le Profil Pays de cette année ? 

"Quand on choisit le Profil Pays, on recherche un pays qui est en train de vivre un moment important. Il y a quelques années, c’était l’Iran, et l’année dernière la Colombie, avec le processus de paix. On a choisi la France pour plusieurs raisons. D’abord, la révolution politique de Macron, qui a rendu possible l’accès à la présidence d’un inconnu du grand public quelques mois avant. Le cinquantenaire de Mai 68 également, qui est symbolique pour le pays, et représente l’occasion de faire un point sur les changements qui ont eu lieu depuis. Mais on a aussi étudié des sujets plus transversaux, comme le projet européen considéré depuis le France ou la complexité de la vie politique française". 


Qu’est-ce qui caractérise les relations politiques entre la France et l’Espagne ? 


"Nous avons l’impression que même si nos deux pays sont voisins, en réalité on se connaît peu. L’Espagne est peu présente dans les débats politiques français et vice-versa. Pourtant, nos sociétés traversent un peu les mêmes problématiques : le populisme, le terrorisme ou la montée de l’extrême droite, même si cela est plus visible en France qu’en Espagne. Les dynamiques sont plutôt semblables des deux côtés des Pyrénées : les citoyens sont fatigués de la gauche et de la droite traditionnelles et on voit de nouvelles formations politiques prendre de l’importance, qui sont comparables, même si les systèmes politiques sont différents. Il y a toujours eu une sorte de relation cordiale entre les deux voisins mais la France développe plutôt l’axe franco-allemand, alors que l’Espagne est davantage tournée vers l’espace méditerranéen. Pourtant chacune peut en apprendre beaucoup de l’autre car elles vivent des processus similaires". 


Quels sont les défis politiques communs pour les deux pays ? 

"Le principal défi commun aux deux pays, mais qui concerne également le reste de l’Union européenne, est celui de la crise de la Méditerranée, même si elle touche plus l’Espagne que la France pour l’instant, de par sa situation géographique. Et cela implique un autre objectif commun qui est de relancer l’UE et d’éviter la tentation de céder à l’entre soi et la fermeture des frontières. Au niveau national, dans les deux pays, il revient aux politiques de récupérer la confiance de la population, qui s’est détériorée au fil des dernières années, notamment en faisant face au défi des inégalités". 


Comment avez-vous fait pour avoir une vision globale de la situation ? 

"Aujourd’hui, il n’est plus difficile d’avoir accès à l’information, on en a même presque trop. L’anuario représente un filtre qui la sélectionne et l’analyse. On ne présente pas juste des données, mais on explique aussi les dynamiques de fond. Près de 100 auteurs ont participé à cette édition, et ceux qui ont écrit sur la France ont parfaitement couvert la vision globale qu’on souhaitait avoir. Les pages d’opinion permettent d’avoir différents points de vue et parmi les auteurs, des experts français très renommés ont permis une analyse depuis l’intérieur. Entre autres, Pascal Perrineau a analysé le phénomène Macron, Nonna Mayer celui de l’extrême droite et du FN, quand Thierry Chopin a évoqué le rôle de la France en Europe et Rokhaya Diallo le problème du racisme. C’est donc une radiographie politique dans divers domaines que l’on a essayé de faire". 


Y a-t-il des avantages et des inconvénients à être basés à Barcelone ? 

"N’étant pas dans la capitale, il est assez dur pour nous d’avoir accès aux ambassades, ou aux centre du pouvoir. Barcelone est la seconde ville d’Espagne, mais cela ne l’empêche pas d’avoir des vocations internationales, de se projeter au monde et d’avoir son propre agenda. Notre emplacement nous permet de mener à bien trois grands projets centrés sur la Méditerranée, avec des experts d’Algérie, de Turquie, etc. De plus, être éloignés de la capitale renforce l’indépendance de CIDOB, même si nous sommes en collaboration avec les think tank de Madrid et le gouvernement espagnol également". 

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