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ROYAUTE - Huée, offensée et mal aimée en Catalogne ?

Écrit par Lepetitjournal Barcelone
Publié le 19 mars 2015, mis à jour le 19 mars 2015

La famille royale, c'est tout un symbole. Si les Français, eux, ont coupé la tête à leurs rois depuis longtemps, la monarchie constitutionnelle est toujours présente en Espagne. La famille royale représente la force emblématique du pays pour certains, mais elle est un poids issu d'une autre époque pour d'autres. Certaines régions comme la Catalogne sont bien connues pour leur forte hostilité à la monarchie. Et davantage encore en temps de crise économique. Bien au-delà de la politique, ce rejet s'exprime sous différentes formes.

Le dernier scandale en date est lié à l'annulation d'une exposition qui devait se tenir au MACBA (le Musée d'Art Contemporain de Barcelone) à partir de mercredi dernier. L'exposition "La Bèstia i el Sobirà" (La bête et le souverain) a été retirée au dernier moment, à cause d'une ?uvre polémique, "Haute couture 4. Transport", qui pourrait constituer une offense pour la monarchie. Un fait sans précédent au MACBA, rapporte La Vanguardia. La sculpture en papier mâché met en scène un chien en pleine pratique sexuelle avec une femme (l'activiste ouvrière et féministe bolivienne Domitilia Barrios), et l'ancien roi Juan Carlos, à quatre pattes, lui-même vomissant des fleurs sur un parterre de casques nazis. Chacun y trouvera son interprétation? L'artiste d'origine autrichienne Ines Doujak, est connue pour ses travaux sur le colonialisme. Cependant l'?uvre a été jugée trop provocatrice. Les commissaires du MACBA ayant refusé de la retirer de l'exposition, la direction du musée a décidé d'annuler l'inauguration.

Censure ou auto-censure ?
"Le MACBA s'auto-censure" titrait hier El Punt Avui, pendant que Elcorreo.com se demandait si le musée a reçu des menaces ou fait l'objet de pressions. "L'aspect polémique de l'?uvre n'a rien à voir avec le fait que l'exposition soit organisée en Catalogne", estime pour sa part le service de presse du musée, interrogé sur la question, soucieux de dissocier la polémique du contexte catalan. "Dans n'importe quelle autre partie d'Espagne, la même aventure aurait pu se produire". De nombreuses personnes se sont toutefois rassemblées devant le MACBA après l'annonce de l'annulation de l'exposition, réclamant "un musée démocratique". Des pancartes "Je suis Soberano" (je suis souverain) ont été installées, rappelant les manifestations pour la liberté d'expression après les attentats de Paris.

Bref historique des affronts les plus célèbres
Il faut dire que la descendance royale en prend régulièrement pour son grade lors de ses passages en Catalogne. On se souvient ainsi qu'en mai 2013, Felipe, qui n'était encore que Prince d'Asturies, accompagné de son épouse Letizia, avait été reçu par un concert de sifflements au Liceu de Barcelone, où il était venu assister à un opéra. A l'extérieur du bâtiment mais aussi à l'intérieur de la salle, le couple princier fut généreusement hué. L'image a fait le tour du pays, choquant les uns, réjouissant les autres.
Au Mobile World Congress de l'an dernier, l'entrepreneur catalan Alex Fenoll a pour sa part refusé de serrer la main du Prince. Sur une vidéo filmée par une participante au congrès, on voit l'entrepreneur expliquer au futur Felipe VI qu'il ne veut pas lui serrer la main car ce dernier ne veut pas laisser voter les Catalans. Décidément, toute apparition de la royauté à Barcelone est susceptible de générer des tensions du même ordre.


Et c'est pareil (voire pire) dans les stades
C'est devenu presque une habitude : la Coupe du Roi, comme son nom l'indique, compte sur la présence du roi d'Espagne dans ses tribunes lors du moment tant attendu de la finale. L'occasion pour les opposants à la monarchie de huer ouvertement un symbole qu'ils contestent. En 2009 déjà, alors que le FC Barcelone accède à la finale, ce sont par des sifflets et des hurlements que les supporters culés couvrent l'hymne national, sous les yeux du Roi, assis juste en face. Il faut dire que les supporters de l'autre équipe, l'Athletic Bilbao, sont eux aussi réputés pour être particulièrement hostiles à la famille royale. Ils n'ont pas hésité à huer à l'unisson l'hymne, rendant un effet impressionnant dans un stade de 50.000 personnes.
Et rebelote en 2012, avec le même duo finaliste, et toujours le prince Felipe qui serre les dents. En 2015, la finale de la Coupe du roi sera la première à se dérouler sous l'ère du nouveau roi Felipe VI. Et elle se disputera? entre Barcelone et Bilbao !

Des scandales dignes de la presse people
Depuis 2012, les membres de la famille royale ont connu une succession d'agissements qui n'ont absolument pas joué en faveur de leur côte de popularité en Catalogne. Après que Juan Carlos I se blesse à la hanche lors d'un polémique safari en Afrique, l'infante Cristina et son mari, qui résidaient à Barcelone, sont au c?ur des scandales de corruption qui agitent l'Espagne. Iñaki Urdangarin, mari de l'Infante, est accusé de détournement de fonds publics, et la s?ur de Felipe VI de blanchiment d'argent. A chaque apparition publique, ne serait-ce que furtives à la sortie du palais de justice de Barcelone, la foule ne manque pas de les siffler, voire de les insulter. Est-ce un jeu de cause à effet ? Ces dernières années, le fameux "caganer" catalan, figurine traditionnelle exposée dans la crèche pour les fêtes de Noël, est repris dans sa position peu flatteuse avec les visages de  toute la famille royale, avec un certain effet de mode, et à l'image, il faut bien l'admettre, du sort réservé à de nombreuses autres personnalités du pays. On aura cependant vu meilleure publicité pour la Royauté.

Comment réagissent-ils face aux attaques ?
En public, la famille royale essaie généralement de garder la tête haute, en ignorant la foule qui les hue et les siffle. Sourire figé, les membres de la Couronne se tiennent droits et continuent de saluer. Conscient du défi de popularité qu'il se doit de relever, le Roi Felipe VI s'exprime quant à lui en catalan lors de ses apparitions locales, transmettant une proximité que la Monarchie a bien besoin de réaffirmer en Catalogne.

Perrine LAFFON (lepetitjournal.com ? Edition de Barcelone) vendredi 20 mars 2015
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Publié le 19 mars 2015, mis à jour le 19 mars 2015

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